Indemnité

De DHIALSACE
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Besserung, Entschädigung, Ersatz, Réparation, Satisfaction, Schadloshaltung, Wiederaussantwortung, Wiedergutmachung.

- Ce qui est donné a quelqu’un, pour empêcher qu’il ne souffre quelque dommage (Guyot, Répertoire).

- Dédommagement qu’on doit à la personne à qui l’on a causé quelque préjudice.

Réparations, indemnité, satisfaction

Compensation monétaire ou territoriale donnée à un Etat pour réparer les dommages infligés par les opérations de guerre.

« LI-51. De plus, on est tombé d’accord que, pour la restitution des places occupées pendant cette guerre et sous forme d’indemnité, il soit payé à Madame la Landgrave de Hesse…

Uber dieses ist verabschiedet / daß für deren in diesem Kriege eingenommenen Oerter Wiederaußantwortunge vnd Schadloßhaltunge / der Frawen Landgräffin zu Hessen Vormunderin… » Voir aussi l’article LVII, Traité de paix signé à Munster-en-Westphalie le 24 octobre 1648.

Négociations et traités s’efforcent de trouver une solution aux demandes de réparations ou satisfactions à accorder aux Puissances belligérantes pour mettre fin à la guerre. À Munster-en-Westphalie, d’avril à septembre 1646, on négocia sur « la satisfaction de la France » (Entschädigungsgesuche), puis sur celle de la Suède… « Avec la satisfaction de la Suède, on régla aussi celle du Landgrave de Hesse » (C.-G. Koch, Abrégé, p. 103 et s).

Droit d’indemnité (Ancien régime)

a) Lorsque le roi [l’État] acquiert un immeuble relevant d’un seigneur, outre les lods et ventes dus du fait de cette acquisition, il lui constitue une rente d’un montant équivalent à ce que le seigneur aurait pu toucher en lods et ventes sur soixante années.

b) Les particuliers expropriés pour construire des routes se voient verser une indemnité. Quand il s’agit d’une communauté religieuse, l’indemnité consiste en une rente annuelle de 5% du prix du terrain.

c) Les ecclésiastiques « gens de mainmorte » qui acquièrent des héritages doivent dédommager les seigneurs de qui relèvent ces héritages d’une indemnité, pour les dédommager de ne plus pouvoir prélever de lods et ventes et tout autre droit de mutation, sur ces biens puisque désormais possédés par des gens de mainmorte, ils ne sont plus dans le commerce. Ainsi le roi peut affranchir les religieux Capucins qui établissent un couvent à Blotzheim, de payer « Finance ni indemnité, droits de lods et ventes, quints, requints et francs-fiefs, nouveaux acquets, et autres droits quelconques » qui seraient dus à la couronne, « à la charge par eux de satisfaire aux indemnités, droits et devoirs dont lesdits fonds, terrains et emplacements peuvent être tenus envers d’autres que Nous »… et « à condition que lesdits religieux… outre leurs prières ordinaires, disent à la fin de leurs grands messes le verset, Domine Salvam fac Regem… » « Lettres patentes d’avril 1738, enregistrées par le Conseil Souverain » (Ordonnances d’Alsace, II, p. 195).

Indemnité pour abolition des droits féodaux

L’art. 1 des lois du 4 août 1789 a détruit entièrement le régime féodal. — Par le même article, « ceux des droits et devoirs, tant féodaux que censuels, qui tiennent à la mainmorte réelle ou personnelle et à la servitude personnelle et ceux qui les représentent sont abolis sans indemnité ; tous les autres sont déclarés rachetables ».

D’après la loi du 17 juillet 1793, les droits féodaux que l’Assemblée Constituante avait convertis en droits fonciers n’existent plus : ils sont abolis entièrement et sans indemnité. (Merlin, Répertoire, « Indemnité »).

D’après le Dictionnaire de Droit canonique de Migne : « Le traitement accordé par le gouvernement au clergé n’est qu’une indemnité légitimement due pour la spoliation des biens ecclésiastiques. Elle n’est point un salaire, comme on se plaît à le dire » (Migne, Dictionnaire, p. 849).

Les communes sont responsables des délits commis à force ouverte ou par violence par des rassemblements ou attroupements : dommages et intérêts dus à l’État

Le 28 floréal an 10 (18 mai 1803) à 8 et demie heures du soir, à Kembs, les préposés des douanes se heurtent à une bande d’une quarantaine d’hommes, chargés de ballots, et de 5 cavaliers et piétons armés. Ils déclarent les ballots saisis, mais sont attaqués et ne conservent que 2 ballots, qui contiennent mouchoirs, mousselines et chapeaux de paille. Ils dressent procès-verbal. Le commissaire du tribunal d’Altkirch condamne la commune de Kembs, en vertu de la loi du 10 vendémiaire an IV (2 octobre 1795) qui rend responsable la commune où s’est produit attroupement à force ouverte et rébellion à 40 000 francs de dommages et intérêts envers la République et à 600 francs de dommages et intérêts envers les préposés. Le maire fait appel. Il est débouté. Le préfet envoie les garnisaires à Kembs. Avec le maire, les 20 citoyens les plus imposés, portent plainte, sont déboutés et, font appel. Appel rejeté, d’autant plus que le maire a été « l’âme et le chef de la société des contrebandiers » (arrêt du 1er Brumaire An XI, 23 octobre 1802, Journal de Jurisprudence de la Cour d’appel de Colmar, 1805-1806, p. 245-263 http://gallica.bnf. fr).

5. Indemnité, Dommages-intérêts (Code Napoléon 30 ventôse an XII, 21 mars 1804)

Application de l’article 1142 du Code Napoléon 

« Toute obligation de faire ou de ne pas faire, se résout en dommages et intérêts, en cas d’inexécution de la part du débiteur ».

Nombre d’arrêts cités par le Journal de Jurisprudence de la Cour de Colmar concernent l’inexécution des promesses de mariage et les dommages et intérêts en cas d’inexécution. La Cour se rattache volontiers à la jurisprudence du Conseil Souverain. (Le Journal de Jurisprudence transpose en francs les sommes d’Ancien régime libellées en livres).

En 1745, le Conseil souverain confirme le jugement du Magistrat de Colmar qui refuse 600 francs de dommages et intérêts à une fille de Turckheim qui avait rompu ses fiançailles parce que son fiancé avait proclamé qu’elle n’était plus vierge : il n’en avait pas moins offert de l’épouser (Fiançailles).

À Strasbourg, par contre, on retient deux affaires classiques, celle de l’étudiant en droit volage (avec une future belle-mère abusive) et celle du capitaine séducteur. En 1745, c’est le fiancé qui bénéficie de dommages et intérêts. En effet, « le Sr F., pendant qu’il faisait son droit à Strasbourg, fit la connaissance de la Demoiselle C. Il parla de mariage ; la Demoiselle (mineure) y consentit avec sa mère, et contrat notarié s’ensuivit ». Il quitte Strasbourg pour s’en retourner chez lui, et ne donne pas de ses nouvelles pendant quelques mois… La mère de concert avec la fille lui font signifier qu’elles n’entendent plus accomplir les promesses de mariage ; elles offrent de lui rendre en nature les habits de noces et autres présents achetés par le Sr F. depuis le contrat. L’officialité déclare les promesses valables et renvoie au juge compétent pour les dommages et intérêts. Devant le Grand Sénat de Strasbourg, le Sieur F. réclame des dommages et intérêts. Le Grand Sénat se contente d’exiger des défenderesses l’indemnisation des frais et dépenses que le fiancé a eus. Il fait appel et demande 3 000 francs, dénonçant « les discours indécents et injurieux tenus à son égard par la mère, qui faisaient obstacle au mariage ». Le Conseil souverain condamne la mère et la fille au remboursement des frais déboursés et à 1 000 francs de dommages et intérêts.

Le capitaine de cavalerie avait promis le mariage à une fille d’un tailleur de Strasbourg contre un dédit de 6 000 francs et lui avait fait trois enfants. Mais il était « fils de famille » et ne pouvait se marier sans consentement de la famille, qui le lui refuse. La fille actionne le capitaine « en paiement du dédit si mieux n’aime l’épouser ». La première instance annule les promesses ; et adjuge à la fille 600 francs de dommages et intérêts ; elle appelle et se fonde sur ce que les promesses sont par écrit. Le capitaine dit qu’il n’a pu s’engager étant fils de famille ; qu’il offrait de se charger des trois enfants. Le Conseil déboute la fille, « sous le mérite des offres du capitaine » (arrêt du 6 juillet 1761). La priorité avait été donnée au droit des familles (Divorce). « Au reste la justice accorde rarement une indemnité au garçon, et elle en accordé presque toujours à la fille. La cause de cette différence est que l’inexécution des promesses ne fait perdre au garçon ni ses biens, ni sa réputation ; libre, et dégagé il peut se dédommager ailleurs ; si c’est un désagrément pour lui d’être refusé, il peut former d’autres liens, porter ses vues sur un autre objet. Au contraire, la fille trompée a pour elle la faiblesse de son sexe, les soupçons attachés à un pareil abandonnement, le manque d’autres partis ». Mais « c’est une erreur » affirme le Conseil souverain. « Le refus fait à un garçon, peut lui faire beaucoup de tort dans l’esprit du public. Ainsi, c’est pour l’homme et la femme matière à dommages et intérêts ».

En 1806, la Cour de Colmar confirme cette jurisprudence. Elle doit juger de la rupture de promesses de mariage avec communauté universelle d’apports et d’acquêts entre une fille et un garçon de Fontaine, contractés devant notaire de Belfort le 8 juin 1804. La fille refuse ensuite le mariage. Le fiancé porte plainte et réclame les frais et des dommages et intérêts. La fille se défend : elle a rompu « parce que la conduite du fiancé l’y a forcé ». Le tribunal civil de Belfort accorde des dommages et intérêts modérés au fiancé. La fille est riche et a 40 ans, le garçon 27, et la fille n’a agi qu’à l’instigation de ses frères qui veulent garder l’héritage. Appel devant la Cour, qui confirme le jugement (Jurisprudence de la Cour d’appel de Colmar 1806, p. 454 à 463. Gallica bnf).

Application des articles 1382 et 1383 du Code Napoléon

« Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

« Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non-seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ».

Cet article s’applique au cas de l’insensé qui commet un délit ; il répond dans ses biens de la réparation civile.

Le 27 fructidor an XIII (14 septembre 1805), Thiébaut Reibel, maire de Nordhouse, effectue sa tournée pour faire le recensement des foins, en conséquence d’une réquisition pour la grande armée. Il sort de la maison de Jean Sprauel, qui lui tire un coup de fusil. Le 30 vendémiaire an XIV (22 octobre 1805), la Cour de justice criminelle de Strasbourg, juge que Sprauel est l’assassin, mais qu’il ne jouissait pas de la plénitude de sa raison et le condamne à être enfermé à vie à l’hospice civil de Strasbourg. Reibel décède un mois plus tard. Les héritiers Reibel actionnent le curateur de l’incapable en frais de chirurgie et dommages et intérêts. Le Tribunal de Schlestadt leur accorde 3 000 francs, le 14 novembre 1806. Jean Sprauel décède ; sa veuve et ses enfants font appel du jugement. Ils rappellent que d’après le droit romain, l’on ne peut prononcer de condamnation contre l’enfant, l’impubère, le furieux accusé d’homicide. La jurisprudence d’Ancien régime n’est pas unanime. Sous le Code civil il y a moins de doute, et le fait de la cause est postérieur à la promulgation du Code, lequel est conforme aux lois romaines. Sur les conclusions du procureur général Merlin, la Cour de Cassation avait établi que la femme Gouget de Caen ne pouvait être condamnée au criminel pour n’avoir pas provoqué l’enfermement de son mari insensé, car ce n’était pas une obligation. Par contre, les parents pouvaient être tenus civilement des dommages et intérêts faute d’avoir tenu les insensés et furieux en sûre garde (Cour de cassation 26 juin 1806). La Cour de Colmar affirme donc : la disposition de l’article 1382 est claire et précise ; Sprauel et ses héritiers, femme et enfants, devaient être condamnés à verser des dommages et intérêts (Journal de jurisprudence civile et commerciale, ou Recueil des arrêts notables de la Cour d’appel, séant à Colmar, publié… par Me. Jourdain, greffier-en-chef de ladite cour. Colmar 1807-1808, p. 442 à 451).

Bibliographie

DRW.

GUYOT, Répertoire, « Indemnité ».

MERLIN, Répertoire, « Dommages-intérêts ».

KOCH (Christophe-Guillaume), Abrégé de l’histoire des traités de paix entre les puissances de l’Europe depuis la paix de Westphalie, Strasbourg, 1796, p. 103 et s.

Journal de jurisprudence civile et commerciale, ou Recueil des arrêts notables de la Cour d’appel, séant à Colmar, 1805, 1806, 1807-1808.

Notices connexes

Besserung

Munster (traité de)

Réparations

Satisfaction

Wiedergutmachung

François Igersheim