Lettner

De DHIALSACE
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Letzener, Letenarium (latinisation de lettner), jubé.

Le mot Lettner, dérivé du latin (lectoriumlect(o) rinum, lectricum) révèle l’une des fonctions d’un jubé, qui comportait un ambon pour la lecture de l’Évangile. Il s’agissait d’une tribune ou d’un simple séparation – en pierre ou en bois – entre le chœur, réservé aux clercs, et la nef d’une église. Le jubé jouait ainsi le rôle de l’iconostase des églises orthodoxes.

Les jubés ont succédé aux ambons et aux chancels de l’époque romane à partir de la fin du XIIe siècle, dans les églises dont le clergé formait une communauté (chapitre, abbaye…). En Alsace, il en a existé une quarantaine, mais il n’en subsiste qu’une demi-douzaine : celui des Dominicains à Guebwiller, ceux de Saint-Pierre-le-Jeune et le-Vieux ainsi que de Saint-Guillaume (déplacé et réduit) à Strasbourg, à Saverne (déplacé), dans l’église des Franciscains à Colmar, et des vestiges de quelques autres : cathédrale de Strasbourg, le plus large de la chrétienté (Haug, p. 57), Andlau, Rouffach, Vieux-Thann, Wissembourg. Celui de l’église Saint-Georges de Sélestat, érigé en 1489-1490, n’a été détruit qu’à la Révolution (Recht, 152). Le concile de Trente, qui a exigé que le chœur soit visible par les fidèles, est à l’origine de la plupart des suppressions.

La récente découverte (vers 2010) d’un dessin d’Arhardt a permis de constater qu’en 1670, dans l’ancienne église romane de l’abbaye de Saint-Étienne, il existait une cloison à claire-voie, apparemment en bois, avec portes ouvrantes, au bas de l’arc triomphal, qui séparait le carré du transept de la nef dans laquelle se trouvaient les stalles des chanoinesses protestantes et deux autres séparations (en pierre ?) fermaient les bras du transept.

Dans les chartreuses, le jubé sépare le chœur des pères de celui des frères. Il en allait ainsi à celle de Molsheim, dont l’église a été démolie, mais il subsiste à celle d’Ittingen (Suisse), construite sur le même plan. Chez les Cisterciens, une clôture séparait également les frères lais des moines de chœur.

Il arrive que le terme soit employé improprement pour désigner une tribune d’orgue. Il est vrai que, sur le jubé de Saint-Pierre-le-Jeune et de Saint-Guillaume, quelques siècles après leur construction, des orgues Silbermann ont été installées.

Bibliographie

HAUG (Hans), « Les œuvres de miséricorde du jubé de la cathédrale de Strasbourg », Archives Alsaciennes d’Histoire de l’Art, 1931, p. 99-122.

HAUG (Hans), L’art en Alsace, Paris, 1962.

RIEGER (Théodore), Jubés, EA, vol. 7, p. 4353-4354.

RECHT (Roland), L’Alsace gothique de 1300 à 1365, Colmar, 1974, p. 152.

SCHLAEFLI (Louis), « Un dessin inconnu de Jean-Jacques Arhardt : L’intérieur de l’église Saint-Étienne de Strasbourg en 1670 », CAAAH LIX (2016), p. 117-122.

Louis Schlaefli