Mont-de-Piété
Leihhaus, Pfandhaus
Établissement où l’on prête, sur gages, de l’argent, à un taux d’intérêt réduit, à des personnes dans le besoin.
En 1482, Strasbourg dispose d’un établissement, une Leihhaus qui a « tous les caractères d’un mont-de-Piété » rattachée à la Monnaie et confiée à trois « Münzer ». « Tout bourgeois peut, moyennant gages, obtenir de l’argent frais et sans embarras au taux ordinaire de 5% ; il a le droit de rembourser sa dette dès qu’il le veut. C’est une excellente institution qui manque en bien des lieux, écrit le conseiller de Strasbourg et spécialiste des finances et monnaies, Elias Brackenhoffer (1618-1682). Elle était alimentée par les institutions d’assistance strasbourgeois (Hôpital, Pauvres Passants) et adossée au Trésor municipal ou Pfennigturm qui la tire d’affaire en cas de crise (F.-J. Fuchs, Histoire de Strasbourg II, p. 335). L’historien populaire du protestantisme strasbourgeois, Timothée Roehrich, critique l’œuvre (Geschichte der Reformation, p. 113). Hanauer (Études économiques sur l’Alsace I, p. 553-571) en a fait un historique et reconnaît que l’activité de cette banque municipale ne remplit « qu’en partie » la fonction de mont-de-Piété. De fait, son action ne s’était guère inscrite dans la grande politique d’assistance et de lutte contre la pauvreté déployée par la Strasbourg réformée des années 1520. La banque municipale disparut en 1752. Dans le sillage de la politique royale, la Ville crée un nouveau mont-de-piété en 1785, qui disparaît pendant la Révolution. Simon-Muscheid rappelle que le mont-de-piété crée à Francfort-sur-le Main à la même époque, avait aussi pour fonction de dépanner fils et pères de famille criblés de dettes de jeu, tant le jeu d’argent faisait des ravages à l’époque. Se rattachant à sa tradition, Strasbourg fonde un nouveau mont-de-Piété en 1827. La Leihhaus strasbourgeoise devient un symbole de l’intervention publique dans l’économie, l’assistance, et le micro-crédit, de régulation du taux d’intérêt et de lutte contre l’usure, honnie et combattue par les uns et louée par les autres après la grande crise allemande de 1873, débat marqué par les travaux et les positions de Gustav Schmoller, alors professeur d’économie politique à l’Université de Strasbourg.
Bibliographie
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DRW, Leihhaus, Pfandhaus.
Notices connexes
François Igersheim