Excommunication

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excommunicatio, Exkommunikation, Kirchenbann

Censure ecclésiastique, l’excommunication, à l’inverse de l’anathème, sanction permanente, est une expulsion temporaire de la communauté des fidèles catholiques, pratique pénitentielle concrétisée par l’exclusion des sacrements. Elle relève généralement du pape, qui peut absoudre l’excommunié. Fulminée pour des raisons de doctrine, l’excommunication majeure sanctionne aussi le non-respect de la justice et des règles de la procédure judiciaire et ouvre la voie à des pratiques du type de l’excommunication pour dette. Certains délits, comme les violences envers les clercs, entraînaient l’excommunication ipso facto ou ipso iure, sans intervention de la justice, latae sententiae, alors que d’autres étaient infligées par sentence (ferendae sententiae).

Elle peut frapper des individus ou des collectivités. Ainsi, en 1287, le légat pontifical avait fulminé l’excommunication contre Strasbourg dans le cadre de la querelle entre le clergé séculier et les ordres mendiants. Mathias, chanoine à Saint-Etienne, fut alors chargé d’intervenir ; il annula la sentence du légat, ce qui lui valut d’être à son tour excommunié (Pfleger, Pfarrei, 156). De même, Benoît de Buchs, chanoine à Lautenbach, a été nommé procureur par la Ville de Bâle pour obtenir la levée de l’interdit et de l’excommunication qui pesaient sur la ville (1367) (Trouillat, IV, 710). En 1506, Mulhouse a été excommuniée pour le renvoi de Jean Schüler, chapelain (AM Mulhouse, charte 2835).

Elle frappe plus souvent des clercs que les laïcs ; ces derniers le sont souvent pour voies de fait sur des clercs. Ainsi Jean Adam Truchsess a été excommunié en 1638 pour avoir frappé Adam Straub, recteur de Brunstatt (Arch. Porrentruy, Ms 6223, 196). En 1546, le praefectus (prévôt ?) de Montreux-Château et ses complices, qui avaient incarcéré le pléban et le chapelain du lieu, sont relevés de l’excommunication (AAEB, A 85/43, Not. 2545/46, Absol. 1546 nos 37 et 38). Mais des raisons plus futiles peuvent entraîner cette sanction ; ainsi Jean Buntschuh, recteur de Bergheim, est chargé d’exécuter une sentence d’excommunication contre Clewelin Hutlin, du lieu, s’il ne paie pas une rente dans les 30 jours (1438) (AHR 4 G 47 b).

Les clercs encourent souvent la sentence pour de vulgaires raisons financières. Berwardus, curé de l’Oberkirche de Marmoutier, est excommunié par le pape pour n’avoir pas renoncé à une pension que lui devait jadis l’abbaye du lieu (1248) (RBS no 1282). Jean Nauerius, recteur de Sigolsheim, obtient en 1360 l’absolution de la sentence d’excommunication encourue pour n’avoir pas payé des droits à la date convenue (KIRSCH, Annaten, 179). De même, Hugo Spanner, chanoine à Andlau, est excommunié en 1360 pour n’avoir pas payé les annates pour son bénéfice (KIRSCH, Annaten, 95). De nombreux prêtres ont été menacés d’excommunication par Guillaume de Diest pour non-paiement de taxes, notamment Jean Wachter, archiprêtre de la cathédrale (1415) (AMS AA 1446). Jean Striegel, curé de Balgau et de Nambsheim, est excommunié pour dettes en 1576 (AHR E 1262).

Le fait devait être si courant au XVIe siècle que l’officialité de Strasbourg en était arrivée à faire imprimer des formulaires pré-imprimés pour sommer des débiteurs de donner satisfaction à leurs créanciers. En 1558, un pareil exemplaire est expédié au curé de Dinsgsheim pour qu’il fasse savoir à l’un de ses paroissiens que, s’il ne payait pas dans les huit jours, il était excommuniéipso facto (AMS KS 92/III/2).

Des motifs plus graves peuvent motiver la sentence, comme les affaires relevant de la discipline ecclésiastique. Walter de Mengen, custos à Neuwiller-lès-Saverne, ainsi que trois de ses confrères ont été excommuniés pour avoir « pernocté » en-dehors de l’abbaye en 1369. L’un d’eux, Rulmann Vogt, a, de plus, célébré la messe malgré l’excommunication : il est déclaré entaché d’irrégularité et devra se purger auprès du Saint-Siège (ABR G 5363/12, 14, 17-22). Wolfgang Schultheiss, augustin à Strasbourg, fut excommunié en 1519 pour avoir quitté son couvent (NDBA, 3550). Jean Kreutzer, théologien de renom et pléban de la cathédrale, excommunié et mis au ban à la suite de ses querelles avec les réguliers à propos de l’ultimum vale, quitte Strasbourg pour Bâle en 1456 (Grandidier, Cathédrale, 1782, p. 324 ; Sitzmann, I, 331 ; NDBA, 2114). Jean Abertin (Aubertin), recteur à Montreux-Jeune, est excommunié en 1549 pour intrusion dans son poste (AHR 1 C 3799). Joachim Haldenberger, curé et chanoine à Saverne, et Jean Zimmermann, curé de Monswiller et d’Eckartswiller, sont excommuniés en 1622 pour altercation (ABR G 6305, 426 vo). Jean de Nordheim, prébendier à Saint-Pierre-le-Jeune, est menacé par Eberhard de Kibourg, chantre du Grand Chapitre, d’être mis au ban pour avoir fréquenté des excommuniés (1355) (UBS V1, 312, note 1).

Bien évidemment, la sanction frappe les concubinaires, voire les criminels. En 1298, Henri de Berchtoldskirch, chanoine à Lautenbach, est excommunié pour concubinage avec l’abbesse de Waldkirch et cumul de bénéfices (Schmutz, Juristen no 1206). Recteur intrus à Sélestat, Jean Pistorius, relégué hors du diocèse comme concubinaire incorrigible et réfractaire, est interdit dans le diocèse sous peine d’excommunication en 1631 (ABR G 6308, 147 vo). Jacques Lichtenberger, chanoine à Surbourg, est excommunié pour avoir laissé sa servante étouffer son fils (1515/16) (ABR G 1434/2). Bernard Brun, chapelain à Herrlisheim (68) obtient l’absolution de l’excommunication encourue du fait du meurtre d’André N., prêtre (1517/18) (ABR G 1434/1).

Restent à signaler des cas plus singuliers : Hugelmann de Fénétrange, doyen du Grand Chapitre, a été excommunié pour avoir incarcéré l’évêque Guillaume de Diest (1416-1418) (NDBA, 921). Wernher de Gundolsheim, chanoine à Bâle, l’a été pour avoir voté contre le candidat du pape à l’évêché de Bâle (1309) (Schmutz, Juristen, n° 1322 ; Guillaume Mazzerellus, chanoine à Colmar en 1297, puis chanoine à Bâle, est démis et excommunié en 1309 pour le même motif (Schmutz, Juristen, n° 3498).

Bibliographie

DURAND de MAILLANE, Dictionnaire (1787), p. 277-293.

TROUILLAT (Joseph), Monuments de l’histoire de l’ancien évêché de Bâle, 5 vol., Porrentruy, 1852-1867.

KIRSCH (Johann Peter), Die päpstlichen Annaten in Deutschland während des XIV. Jahrhunderts. I.- Von Johann XXII. bis Innocenz VI, Paderborn, 1903.

SITZMANN (Edouard), Dictionnaire de biographie des hommes célèbres de l’Alsace, Rixheim, 1909-1910.

PFLEGER (Lucien),Die elsässiche Pfarrei : Ihre Entstehung und Entwicklung. Ein Beitrag zur kirchlichen Rechts- und Kulturgeschichte..., Strassburg, 1936

Lexikon des Mittelalters (1980-1998), IV, col. 170.

SCHMUTZ (Jürg), Juristen für das Reich. Die deutschen Rechtsstudenten an der Universität Bologna 1265-1425. Teil 2 : Personenkatalog und Ortsregister, Bâle, 2000.

GAUVARD (Claude), LIBERA, (Alain de), ZINK (Michel), Dictionnaire du Moyen Âge, Paris, 2002, p. 506-507.

 

Notices connexes

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Censure ecclésiastique

Communion

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Ketzer

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Kirchenacht

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