Coiffe (à l'époque moderne)

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Schirmütze, Schneppenkappe, Spitzhüte, Pelzkappe, Toschen Huet

La coiffe est un couvre-chef en forme, porté par les femmes et les enfants.

Techniquement, elle est montée sur un fond, une armature ou une calotte servant de support. Symboliquement, c’est à travers le mot « coiffe » que la variété et l’identité régionales se lisent pleinement sous l’Ancien Régime.

A l’époque moderne, les couvre-chefs sont parmi les signes les plus importants du rôle social du costume en devenant le repère et le symbole d’un état, permettant de distinguer l’individu au sein du groupe, de l’y rattacher ou de l’exclure.

La première moitié du XVIIe siècle est une étape transitoire au cours de laquelle les couvre-chefs sont encore proches des modes Renaissance, elles-mêmes fortement influencées par le caractère médiéval. On y rencontre des coiffures de tête mobiles et d’autres rigides. C’est une période culturellement riche pour la coiffe alsacienne. On passe progressivement du voile (Schleyer), dont les formes sont multiples, aux toques ou larges bérets, dits Barett en Allemagne, aux chapeaux à larges bords en feutre ou velours garnis de plumes et de branlants d’orfèvrerie dits Doschenhuet ou Toschen Huet, ou encore aux petits chapeaux de feutre aux bords relevés, à l’arrière et sur les côtés, contre la calotte, la Schirmmütze, aux célèbres bicornes, coiffes à becs et bonnets de fourrure rendus célèbres par l’iconographie.

Le chapeau bicorne est un chapeau à deux pointes qui apparaît soudainement dans l’art de la gravure dans la deuxième moitié du XVIIe siècle pour disparaître progressivement un siècle plus tard. Ces grands chapeaux sont souvent cités dans les ordonnances somptuaires (v. costume) sous le terme de Baurenhutten (Bauernhüte). Ce terme signifiant « chapeaux paysans » laisse supposer que les classes populaires rurales ont déjà adopté le bicorne, en principe réservé aux femmes des catégories sociales aisées. On distingue les Spitzenhüte, chapeaux décorés de dentelles (Spitzen) noires ou dorées, des Spitzhüte, chapeau en pointe (Spitz) des servantes et paysannes. L’ordonnance de 1678 réserve aux Strasbourgeoises les plus aisées l’ajout de dentelles noires et différencie la longueur et le coût des dentelles en fonction de la catégorie sociale.

De la seconde moitié du XVIIe siècle à la fin de l’Ancien Régime, une petite coiffe à trois pointes, une frontale et deux latérales revenant sur les joues, dépassant parfois des bords d’un second couvre-chef, est souvent représentée sur les portraits bourgeois et dans les gravures. Selon qu’il s’agit d’un bonnet plat à couture médiane, couvrant bien la tête, ou d’une calotte rigide, montée sur armature métallique et de dimension réduite, sa dénomination change. Le bonnet à becs est tantôt nommé Schneppenkappe et la coiffe à becs Schneppenhüb, Schnepper ou Schnepperle. La langue allemande se révèle moins riche que le français puisque Haube désigne autant le bonnet que la coiffe, mais Kappe veut aussi dire bonnet. Dans sa forme la plus précieuse, la coiffe est décorée sur le dessus de plaquettes et de feuillets métalliques d’or et d’argent, rebrodés de fils d’or, de chenillettes précieuses, sur lesquels se fixent des rosettes et des cabochons à pétales, en métal doré ou argenté. L’intérieur se compose d’indiennes ou de grosses toiles. La proclamation des représentants du peuple Le Bas et Saint-Just, datée du 25 Brumaire an II, prononce la fin des coiffes à becs au nom de l’unité nationale. Un mois auparavant, la sommation de la Société républicaine de Strasbourg exige la livraison des coiffes et des bonnets pour les transformer en numéraire. L’inventaire qui en découle permet de juger de la multitude et de la valeur de ces coiffes : 1 061 toques en or ou coiffes à becs d’une valeur de 10 450 livres, auxquelles s’ajoutent les 431 coiffes d’argent estimées à 2 544 livres.

Quant au bonnet de fourrure, aux formes parfois extravagantes, il connaît de nombreuses dénominations. Le bonnet est fabriqué à partir de peaux comme la loutre, la martre, le putois ou toute autre fourrure, et les ordonnances réglementaires le désignent sous les termes de Schwabenkappe (bonnet de Souabe), Beltzkappe ou Pelzkappe (Pilzkappe), soit bonnet de fourrure. A la lecture des ordonnances, toutes les catégories sociales des grandes villes de l’espace rhénan du sud l’ont adopté. En Alsace, son existence est attestée dès le XVIe siècle puisqu’un édit de 1568 fait défense aux femmes d’en porter. Les édits suivants en réglementent les peaux, le coût et le volume. A Strasbourg, la zibeline, la martre et toutes les fourrures précieuses ainsi que les plumes de cygne utilisées pour la confection des vêtements sont interdites aux femmes des couches sociales populaires.

 

Sources - Bibliographie

AMS, 6.R.15, Ordonnances et règlements de police de la ville, 1628.

AMS, 1.MR.32, Mandats et règlements 1650-1680, Der Statt Strassburg Neu Verbesserte Kleiderordnung, 1678.

DUFLOS-PRIOT (Marie-Thérèse), Système descriptif du costume traditionnel français. Typologies du vêtement et du couvre-chef. Matières, morphologie, décor. Aspects culturels, Musée national des arts et traditions populaires, Paris, 1988.

NETH (Jean-Luc), WOLFF (Anne) (dir.), Quelques paillettes, un peu de soie…Coiffes d’Alsace du XVIIIe et du début du XIXe siècle, Catalogue d’exposition, Musée Unterlinden, Colmar, 2009.

 

Notices connexes

Costume (féminin)

Costume religieux

Léone Prigent