Bangard(e)

De DHIALSACE
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garde champêtre, Bannwart(h), en alsacien Bangert.

Officier seigneurial, puis municipal (XIIe - XXIe siècle) chargé de « garder le ban », au sens de « finage », et d’y faire respecter la discipline agraire pour que les productions sur pied ou les récoltes ne soient pas exposées aux vols et aux dégradations des hommes et du bétail. En-dehors des atteintes à la propriété collective, l’un des buts était de prévenir toute violation de la propriété privée.

La première mention date de 1188 (Obermorschwihr). En dehors des atteintes à la propriété collective, la priorité était de prévenir toute violation de la propriété privée. Au XVIIIe siècle, c’est la communauté assemblée qui, s’opposant aux revendications seigneuriales et s’appuyant sur un règlement de 1694 qui lui-même sanctionnait un usage ancien, devait procéder à la nomination du Bannwart, appelé à prêter aussitôt serment (Bannwarteid). D’ordinaire la fonction, assumée à tour de rôle par les bourgeois du lieu, était annuelle. Le nombre de bangardes – en général entre 1 et 5 – variait selon les besoins de la communauté, l’étendue de son ban, la nature des productions agricoles et la saison dans l’année. C’est ainsi que pendant la période de la moisson et celle des vendanges, les bangardes, parfois accompagnés d’aides bangardes (Bannwartknechte), pouvaient être occasionnellement plus nombreux, car ils devaient remplir le rôle de garde-moisson (messiers, Kornbannwarten) ou de garde-vignes (Rebenbannwarten). La spécialisation de la fonction ne va pas de soi : il arrivait, ne serait-ce que pour l’occuper à temps plein et pour faire faire des économies à la commune, que le Bannwart fût simultanément Weibel ou Gerichtsbott (sergent communal, ancêtre de l’appariteur), garde forestier, voire collecteur d’impôts.

Traditionnellement la communauté leur versait, en échange des services rendus, un salaire (Bannwartlohn) en argent ou en nature, à savoir une certaine quantité de grains ou de vin, la jouissance d’une portion de communal ou encore l’exemption, partielle ou totale, des impositions personnelles telle que la corvée. On prélevait parfois une redevance spéciale sur les terres du ban soumises à leur surveillance (Bannschatz ; Bannwartfrucht, -korn, -garben, -wein ; Mattengeld) au prorata des terres que chaque propriétaire mettait en valeur. Pour stimuler leur zèle, il arrivait que la communauté leur consentît une part des amendes prélevées. Ce n’est qu’en 1775 (AHR C 1119) que l’intendant d’Alsace réglemente le montant des gages du bangarde : 60 livres en espèces, dont la moitié était imputable au budget de la communauté et l’autre moitié sur les biens-fonds au prorata des impositions royales acquittées par les propriétaires.

Quoique rémunérée, la fonction n’était pas toujours très prisée, compte tenu des responsabilités qu’elle impliquait : certains bangardes étaient accusés de négligence par les propriétaires ou les préposés de la communauté ; d’autres étaient au contraire soupçonnés de ménager les délinquants par crainte de représailles. Une ordonnance de 1667 les autorisait à porter, outre la traditionnelle pique ou hallebarde (Spiess), insignes de leur charge, un pistolet en bandoulière pour la défense de leur personne.

À Thann, où la chronique des Franciscains révèle leurs noms depuis 1483, les bangards font partie du paysage institutionnel de la Ville. Ils sont choisis parmi les bourgeois les plus aisés et leur fonction est entourée de prestige, puisque – cas sans doute unique – nul ne peut prétendre entrer au Magistrat s’il n’a pas été au préalable bangarde. 

Dans les archives communales, municipales ou départementales, voir les Feldeinungen et les Dorfordnungen (à titre d’exemple, celle de Hochfelden – datée de 1512, renouvelée en 1578, puis en 1665, retranscrite en 1763 – a été reproduite par Alphonse Wollbrett dans le Bull. SHASE, 72, IV/1970, p. 21‑45).

 

Sources - Bibliographie

SPECKLIN, Alsatia diplomatica, t. I, p. 228 (XIIe siècle).

GRIMM (Jacob), Weisthümer, rééd. Berlin, 1957, t. I, p. 688 (XVe siècle).

De BOUG, Ordonnances d’Alsace, t. I, p. 225 (arrêt de règlement du 18 juin 1694) ; t. II, p. 286 (5 mai 1747), 467 (27 mars 1753) et 729-746 (18 septembre 1766 et 29 janvier 1767).

CHAUFFOUR (syndic), Recueil des règlements de police, (année 1791).

Notes d’arrêts du Conseil souverain, t. II, p. 234 (6 décembre 1776 et 3 septembre 1782).

HOFFMANN (Charles), L'Alsace au XVIIIe siècle, 1906, I, p. 662‑665 et 704‑724.

BOEHLER (Jean-Michel), La paysannerie de la plaine d’Alsace (1648-1789), 3 vol., Strasbourg, 1994., t. II, p. 1 527‑1 529.

HEIDER (Christine), « Le vignoble de Thann à travers les siècles », in : Annuaire de la Société d’histoire de Thann-Guebwiller, XXI, 2004/2005, p. 26‑28.

 

Notices connexes

Bannwarteid

Bannwartfrucht

Bannwartgarben

Bannwarthäuslein

Bannwarthütte

 

Jean-Michel Boehler