Mutterkirche

De DHIALSACE
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Mutterkloster, ecclesia matrix, église-mère  

À la campagne, les premières paroisses, fondées à partir de l’époque mérovingienne, étaient très vastes. Leur église était souvent en-dehors des lieux habités, dans les champs (d’où le nom de Feldkirch que portaient quatre d’entre elles : près de Niedernai, de Guemar, de Wettolsheim, de Bollwiller (la seule qui ait donné naissance à un village), au bord d’une voie romaine (Betbur pr. Kleingoeft, Hochkirch pr. Sierentz), d’une rivière (Illkirch, Scherkirch = Saint-Ludan, Burnkirch pr. Illfurth) ou sur une hauteur (Seltz, Hochfelden, Barr, Epfig, Bollenberg, Dürrengebwiller, Dannemarie, Gildwiller, etc. : sites sans valeur défensive, mais visibles de loin). Ces églises avaient souvent pour vocable la Vierge, saint Jean-Baptiste, un apôtre, saint Étienne, saint Laurent, saint Michel, saint Martin, etc., mais comme on a encore dédié plus tard des églises à ces saints très populaires, ces vocables ne sont pas des indices sûrs de datation. En l’absence de sources précises, on suppose que ces premières églises ont été fondées par le roi, l’évêque, des abbayes ou des seigneurs laïcs. C’est à tort que Pfleger, influencé par une théorie aujourd’hui dépassée sur le grand âge des marches communes (Markgenossenschaften), a cru que certaines, qu’il appelle freie 'Landkirchen, ont été fondées par les habitants de la marche. Ces églises précoces sont appelées ecclesia baptismalis, publica ou popularis, ou basilica ; elles ne deviennent « églises-mères » qu’à partir du moment où elles ont des « filles ». En effet, peu à peu, la plupart des villages de la paroisse primitive sont dotés de leur propre église, en général liée à une cour seigneuriale, et qui souvent devient paroissiale à son tour. Or, depuis l’époque carolingienne, c’est à l’église paroissiale – en fait en grande partie à son propriétaire ou Eigenkirchenherr – que revient la dîme. Créer une nouvelle paroisse, c’est réduire le territoire dîmier de l’église-mère, d’où de fortes résistances, que le roi et les seigneurs ecclésiastiques ont surmontées plus facilement que les seigneurs laïcs. Le rapport entre les églises paroissiales primitives et les nouvelles qui se sont fondées sur leur territoire est pensé comme une filiation. Les paroisses filiales reconnaissent leur ancienne dépendance envers leur église-mère en y allant en procession et en y apportant une offrande à certaines fêtes. Dans certains cas, le curé de la filiale est « présenté » (en fait nommé) par celui de l’église-mère, dans d’autres celle-ci garde la dîme de la filiale. Nombreuses sont enfin les filiales qui n’ont obtenu que très tard ou jamais les droits paroissiaux, et dont les habitants, par conséquent, devaient continuer à venir à l’église-mère, aussi distante fût-elle, pour la messe du dimanche.  

Par un abus de langage, le terme d’église-mère a fini par désigner toute paroissiale. C’est déjà le cas lorsqu’en 1143 l’église [Saint-Georges] de Haguenau est détachée de la paroisse de Schweighouse et devient matrix ecclesia (MGH DD IX 162 n°91), alors qu’elle n’a à cette date aucune filiale. L’ecclesia matrix de Hüttenheim, qu’Ebersmünster, selon sa chronique, aurait reçue du duc Eticho (MGH SS 23, 436 l. 6, vers 1160), et que lui confirme un faux du XIIe siècle (MGH DD karol. II/2, 593 n°238), n’en avait sans doute pas davantage. Qu’à Neuwiller, en 1162, l’abbatiale soit présentée comme l’église-mère de la paroissiale Saint-Adelphe (SCHOEPFLIN, Als. Dipl. I 250 n°303) est un autre abus de langage.  

Bibliographie

PFLEGER, Pfarrei (1936), en part. p. 7-146.   HIMLY (François Jacques), « Recherches sur les origines du culte de saint Martin en Alsace », AEA 23, 1956, p. 37-65.  

BARTH, Handbuch, passim.  

Notices connexes

Eigenkirche  

Paroisse

Bernhard Metz