Nachlass
Sommaire
Héritage, succession d’un défunt, transmis à ses héritiers
On dit aussi Erbe, Erbschaft, Verlassenschaft.
Notice connexe
Papiers, archives privées
Se dit d’un ensemble d’archives d’une personne déposé dans des archives publiques ou dans une bibliothèque publique. Pour le chercheur en histoire de l’Alsace, le terme est connu surtout pour son emploi en archivistique. Le statut du dépôt est défini par la loi et les réglementations relatives aux archives privées. Il fait l’objet d’un classement et d’un répertoire et peut être consulté, sauf dispositions contraires.
Ce sont les bibliothèques qui ont les premières inventé le « Nachlass ». En France, les bibliothèques, par exemple la Bibliothèque Royale, recueillent livres et chartes manuscrits puis imprimés (souvent par achat des bibliothèques), mais aussi les « papiers » des écrivains comme Bossuet (1753) ou Jean Racine (1756) ou des historiens comme du Cange (ouvrages, mémoires, manuscrits (1756) (Delisle, Le cabinet des manuscrits, p. 420, p. 424). Ces ensembles, qualifiés de « papiers » réunis en bibliothèques ou portefeuilles, font l’objet de répertoires particuliers, même si leurs composantes peuvent être réparties dans des répertoires généraux par matières ou par ordre alphabétique.
Au milieu du XIXe siècle, les Archives publiques françaises se décident à distinguer dans leurs fonds les archives manuscrites des personnalités déposantes dites « entrées par voie extraordinaire », à commencer par celle des souverains, jusqu’alors réparties dans les différentes séries du cadre général de classement. Mais il faut attendre 1917 pour la création de la série AJ et l’après-Deuxième Guerre mondiale pour affiner et distinguer AP, AQ (entreprises), AR (presse) et AS (sociétés, associations).
Il en va de même dans l’espace germanophone : au XVIIIe, les Archives des États conservent ensemble les archives publiques et les papiers personnels des souverains réunies dans une des séries du plan de régistrature. Alors que les bibliothèques (des princes, des universités, des villes) collectent livres, manuscrits et « papiers » ou Nachlässe des écrivains, administrateurs et érudits les classent et les mettent à la disposition des lecteurs.
À Strasbourg, en 1771, le professeur Jean-Daniel Schoepflin fait don à l’Université et à la Ville d’une bibliothèque de 11425 livres, ouvrages et manuscrits. C-G. Koch a dressé le catalogue et la description des ouvrages et manuscrits, publiés dans la Bibliothèque de l’Histoire de France de Fevret de Fontette, et Philippe-Xavier Horrer a reproduit le « catalogue des manuscrits et ouvrages qui traitent de l’Alsace » dans son Dictionnaire p. 550-581 (Dictionnaire géographique, historique et politique de l’Alsace, Strasbourg, 1787). Les papiers de Jean-Michel Lorenz, lui aussi professeur d’éloquence et d’histoire, entrent également dans cette catégorie. Lorenz avait mis en chantier des Tabulas historiae Argentoratis ab antiquissimo aevo usque ad annum 1800 et « commencé en 1789 à le faire imprimer avec des ampliations par forme de dissertations » et l’aurait publié de cette manière successivement « sans les évènements politiques qui y ont mis obstacle ». Jean-Fredéric Hermann les a utilisés pour son précis historique où il déclare avoir suivi à peu près l’ordre adopté par Lorenz (Hermann, Notices historiques, statistiques et littéraires…).
Très recherchés aussi les papiers de Grandidier, que Jean de Turckheim emmène en émigration et qui y sont dispersés : une partie est récupérée par la Ville de Strasbourg, et fournira la matière des Œuvres historiques publiées par J. Liblin, avant de brûler avec la bibliothèque Schoepflin et ses papiers, l’autre est déposée aux Generallandesarchiv de Karlsruhe pour un Nachlass Grandidier, où puisera Ingold pour les Nouvelles Œuvres inédites de Grandidier (F. Igersheim, L’Alsace des historiens, p. 33).
La saisie opérée pendant la Révolution des biens du clergé et le versement des archives et bibliothèques ecclésiastiques dans les Archives départementales et bibliothèques des chefs-lieux imposera aux générations d’archivistes et de bibliothécaires un travail de classement pour plusieurs décennies, encadrés par une législation et une réglementation de plus en plus précise.
Parmi les AP ou Nachlässe précieux, celui de Julius Kindler von Knobloch. Ce dernier n’ayant pu terminer la publication de son Oberbadisches Geschlechterbuch au-delà de son tome 2 (1918), ses notes manuscrites pour les lettres S à Z sont conservées au Generallandes Archiv de Karlsruhe (C. Wolff ).
Bibliographie
FEVRET DE FONTETTE, Bibliothèque historique de la France : contenant le catalogue des ouvrages, imprimés & manuscrits, qui traitent de l’histoire de ce royaume ou qui y ont rapport avec des notes critiques et historiques par feu Jacques Lelong, Paris, 1768-1778, t. 3. Dans le livre IV, Histoire civile de la France, Section II, Histoire des provinces réunies à la couronne par les dernières rois, l’art. 3, « Alsace », p. 586.
HORRER (Philippe-Xavier), Dictionnaire géographique, historique et politique de l’Alsace ; Strasbourg 1787. Catalogue des ouvrages et manuscrits qui traitent de l’Alsace. p. 549-576.
HERMANN (Jean-Frédéric), Notices historiques, littéraires et statistiques sur la ville de Strasbourg, 1817.
DELISLE (Léopold), Le cabinet des manuscrits de la bibliothèque impériale, Paris, 1868.
GASS (Joseph), Strassburgs Bibliotheken, ein Rück-und Überblick auf Entwicklung und Bestand, Strasbourg, 1902.
SCHMIDT (Charles), « Livres et bibliothèques à Strasbourg au Moyen Âge », RA, 1877, p. 59-85, p. 433-454.
ECKEL (Auguste),VIDIER (Alexandre), État général par fonds des Archives départementales, Département du Bas-Rhin, précédé d’une notice historique sur les Archives du Bas-Rhin, Strasbourg, 1925.
HARNACK (Axel von), « Handschriftliche Nachlässe von Politikern und Gelehrten – Bedeutung, Verzeichnung und Verwertung », Zentralblatt für Bibliothekswesen, 61 (1947), p. 162-271.
WENIG (Otto), « Bibliotheksgut und Archivgut », Zentralblatt für Bibliothekswesen, 68 (1954), p. 321-334.
MEISNER (Heinrich Otto), « Archive, Bibliotheken, Literaturarchive », Archivalische Zeitschrift, 50/51 (1955), p. 167-183.
MOMMSEN (Wolfgang), Die schriftlichen Nachlässe in den zentralen deutschen und preußischen Bibliotheken (Schriften des Bundesarchivs 1), Koblenz, 1955.
VOSS (Jürgen), Universität, Geschichtswissenschaft und Diplomatie im Zeitalter der Aufklärung: Johann Daniel Schoepflin (1694-1771), Mannheim, 1979, Annexes p. 352-359.
BRANDIS (Tilo), Denecke, Ludwig: Die Nachlässe in den Bibliotheken der Bundesrepublik Deutschland, t. 2, Boppard am Rhein, 1981.
KUSSMAUL (Ingrid), Die Nachlässe und Sammlungen des Deutschen Literaturarchivs Marbach am Neckar. Ein Verzeichnis, Marbach, 1983.
KNOCH-MUND (Gaby), Repertorium der handschriftlichen Nachlässe in den Bibliotheken und Archiven der Schweiz, Basel, 1992.
TADDEY (Gerhard), « Nachlasserschließung. Ein Programm der deutschen Forschungsgemeinschaft (DFG) », DEGREIF (Dieter), Archive und Kulturgeschichte, 2001, p. 159-164.
VOSS (Jürgen), Jean-Daniel Schoepflin (1694-1771). Un Alsacien de l’Europe des Lumières, Strasbourg, 1999.
MARIOTTE (Jean-Yves), Les sources manuscrites de l’histoire de Strasbourg. 1. Des origines à 1790, Strasbourg, 2000.
Notices connexes
François Igersheim