Monnaie de compte

De DHIALSACE
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Prix et valeurs en monnaie de compte, paiements et règlements en monnaie réelle

Jusqu’en 1914, en France, la monnaie réelle circule : les espèces, faites de métal précieux (or et argent), sont acceptées, en théorie, pour leur valeur intrinsèque. Dans la réalité, les choses sont beaucoup plus complexes. D’une part, les espèces frappées ne le sont jamais au titre de 1000‰, d’autre part les petites divisionnaires sont souvent de faible aloi. Afin de permettre de pouvoir compter l’argent, on a été amené à utiliser un système où chaque espèce en cours avait son évaluation, en fonction d’une mesure stable que l’on appelle monnaie de compte.  

Monnaies de compte

Le système le plus fréquent était fondé sur la livre (Pfund), divisée en 20 sous (Schilling), le sou valant lui-même 12 deniers (Pfennig). Si la livre n’a jamais été frappée, le Schilling et le Pfennig ont circulé sous différentes formes. On pouvait également prendre comme base une monnaie dont la valeur avait été fixée à un moment donné. Au cours du Moyen Âge, par exemple, le Pfennig, en Basse-Alsace, comme le Rappen, en Haute-Alsace, monnaies réelles, servaient de base aux évaluations. Il en fut de même pour le Kreuzer, dont le cours fut immobilisé à 2 Pfennig tandis que le Rappen de compte valait 1 Pfenning ou ½ Kreuzer.  

À titre d’exemple, le Reichsgulden en 1559 était évalué à 60  kreuzers, et l’écu royal, après 1726, à 6 livres de France. Cette détermination des espèces était fixée par le pouvoir : seigneur, Magistrat des villes, diètes ou roi. Il pouvait, à sa convenance, changer la parité de telle pièce, fixer le cours de telle autre à la valeur qui lui convenait. C’est ce que fit plusieurs fois Louis XIV pour financer ses guerres ruineuses (voir : Réformation).  

Si l’on prend le cas du thaler réel, sous la dénomination de Reichsthaler, en mars 1639, il était évalué officiellement à Strasbourg à 1 gulden 9 batzens, soit 96 kreuzers (ou un thaler de compte et un schilling) puis, en octobre de l’année suivante, 1 gulden 5 schillings, soit 90 kreuzers (ou un thaler de compte) alors qu’il avait eu son cours fixé à 27 Batzen, soit 108 kreuzers (un thaler de compte et 18 kreuzers) en décembre 1619. Cela montre à la fois l’extrême facilité avec laquelle on pouvait changer d’unité de compte et la fluctuation importante des monnaies.  

Pour la conversion des monnaies de compte, une multiplicité de monnaies réelles possibles

Dans un tel système d’évaluation, une créance de 50 livres tournois en 1789 pouvait être réglée avec 1 louis et 4 écus, chacun évalué, respectivement, à 26 et à 6 livres. De même, sur les bases de l’époque, en 1619, un héritage de 100 Dukat de Strasbourg évalués à 43 Batz avait une valeur de 143 livres 6 schillings 8 pfennigs.   La livre de Strasbourg, valait 4 livres tournois, mais elle n’était pas la seule référence. Il convenait de préciser en quelle unité l’on comptait. En Haute-fAlsace, au cours du Moyen Âge, on utilisait :  

  • la livre de Bâle, divisée en 480 Stebler, évaluée au 2/5e de la livre strasbourgeoise,
  • la livre de Colmar, divisée en 240 Rappen, évaluée au double de la livre de Bâle et aux 4/5e de la livre de Strasbourg.

Après l’annexion de Strasbourg, en 1681, le pouvoir royal imposa un nouvel étalon de compte, la livre d’Alsace évaluée à 10/11e de la livre tournois. Elle fut définitivement remplacée par la livre tournois après le 28 juin 1718, date qui marque la fin du cours particulier des monnaies en Alsace.  

La conversion des monnaies de comptes en monnaie réelle, au cours du jour

À cela s’ajoute le cours marchand qui connaît parfois de grandes variations, en fonction de l’offre et de la demande. Rédigée à Strasbourg au lendemain de la crise de la Kipperzeit, une note manuscrite écrite après le la mise en place d’un nouveau règlement, en octobre 1623, montre l’évolution du cours du thaler. Pour en faciliter la lecture, les évaluations ont été converties en kreuzers :  

Le Franc, monnaie réelle et monnaie de compte

L’introduction du franc mit fin à ce système hybride. La nouvelle monnaie est alors à la fois monnaie réelle et monnaie de compte. Bien que l’on ait continué un temps à compter en franc-or après la guerre de 1914, le franc, devenu monnaie fiduciaire, garda ce double usage.  

Taxes, cens et prélèvements, prestations, pension libellés en nature

Au cours du Moyen Âge et dans une moindre mesure à l’époque moderne, un grand nombre de prélèvements, taxes, cens, accises, péages, etc. étaient libellés en nature : poules, bovins, fagots, céréales, vin, etc. Souvent, à la demande des bénéficiaires qui, avec la reprise du commerce préféraient de l’argent comptant, ils furent convertis en monnaie sur la base des prix du marché. Avec la dévaluation permanente, au fil du temps, certaines redevances qui avaient pu être lourdes à l’origine devinrent dérisoires. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, au grand mécontentement des paysans, des seigneurs cherchèrent à réévaluer les redevances en exigeant de les recevoir à nouveau en nature ou en réévaluant les produits au prix du marché.  

Bibliographie

VAN WERVEKE (H.), « Monnaie de compte et monnaie réelle », Revue belge de Philologie et d’Histoire, 1934, p. 123-152.  

GREISSLER (Paul), Les systèmes monétaires d’Alsace depuis le Moyen Age jusqu’en 1870, Fédération des Sociétés d’histoire et d’archéologie d’Alsace, coll. « Alsace-Histoire », Strasbourg, 2011.  

HANAUER, Études économiques (1876-1878), t.  1, Les Monnaies.  

Notices connexes

Comptes  

Finances des villes  

Imposition  

Rechnungsrett  

Rechnungskammer

Paul Greissler