Officier militaire : Différence entre versions

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Titulaire d’une charge d’office. En français, officier peut désigner le titulaire d’une charge d’office et toutes les sortes d’offices (v. Office).
 
Titulaire d’une charge d’office. En français, officier peut désigner le titulaire d’une charge d’office et toutes les sortes d’offices (v. Office).
  
''Offizier'', en allemand, désigne exclusivement l’officier militaire. Emprunté au vocabulaire et à la réglementation française, le terme se répand dans d’autres armées et langues européennes. Le mot français « officier »''finira par désigner prioritairement l’officier militaire.
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''Offizier'', en allemand, désigne exclusivement l’officier militaire. Emprunté au vocabulaire et à la réglementation française, le terme se répand dans d’autres armées et langues européennes. Le mot français « officier »''finira par désigner prioritairement l’officier militaire.''
  
 
Après la guerre de Trente Ans, les réglementations de Louis XIV et de ses secrétaires à la guerre ont inspiré toutes les organisations militaires des États européens et en particulier celles, quelques décennies plus tard, de l’État prussien.
 
Après la guerre de Trente Ans, les réglementations de Louis XIV et de ses secrétaires à la guerre ont inspiré toutes les organisations militaires des États européens et en particulier celles, quelques décennies plus tard, de l’État prussien.
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== Les hiérarchies fluctuantes des armées de mercenaires ==
 
== Les hiérarchies fluctuantes des armées de mercenaires ==
  
Succédant à celles des armées féodales, le modèle dominant de l’organisation des unités militaires des armées européennes de la fin du Moyen Âge et de la Renaissance est celui de la compagnie de lansquenets des Suisses ou des Allemands (v. ''Landsknecht'') avec son capitaine (''Hauptmann ou Fähnlein'', v.''Fähnlein'') et ses ''Gemeinämter'', soit un ou plusieurs « ''Führer ''» et ses sous-officiers, les ''Waibel'' ou ''Gemeinwaibel'' et ses composantes, les escouades (''Rotte'') commandées par les ''Rottmeister'', élus par les lansquenets (v. ''Krieg'' – la guerre au Moyen Âge et à l’époque moderne). Ces unités adoptent pour la guerre la formation des ''Tercios ''espagnoles (v. Infanterie), soit les grands carrés de mousquetaires et de hallebardes (Parrott, ''The Business of War'').
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Succédant à celles des armées féodales, le modèle dominant de l’organisation des unités militaires des armées européennes de la fin du Moyen Âge et de la Renaissance est celui de la compagnie de lansquenets des Suisses ou des Allemands (v. ''Landsknecht'') avec son capitaine (''Hauptmann ou Fähnlein'', v.''Fähnlein'') et ses ''Gemeinämter'', soit un ou plusieurs « ''Führer ''» et ses sous-officiers, les ''Waibel'' ou ''Gemeinwaibel'' et ses composantes, les escouades (''Rotte'') commandées par les ''Rottmeister'', élus par les lansquenets (v. ''Krieg'' – la guerre au Moyen Âge et à l’époque moderne). Ces unités adoptent pour la guerre la formation des ''Tercios ''espagnoles (v. Infanterie), soit les grands carrés de mousquetaires et de hallebardes (Parrott, ''The Business of War'').
  
 
== Les entrepreneurs de guerre, colonels et capitaines ==
 
== Les entrepreneurs de guerre, colonels et capitaines ==
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== Une hiérarchie standardisée pour des unités bien coordonnées ==
 
== Une hiérarchie standardisée pour des unités bien coordonnées ==
  
Intervenant dans la guerre de Trente Ans contre la Ligue catholique, dans ces campagnes militaires qui balaient le Saint Empire de la Baltique jusqu’au Danube, le roi de Suède Gustave-Adolphe impose un nouveau modèle d’armée, mieux articulée, avec une hiérarchie de grades militaires : général, colonel, major, capitaine, lieutenant. Un des corps de son armée, celui de Bernard de Saxe-Weimar, est embauché par le roi de France, pour le prix d’une principauté – la Haute-Alsace des Habsbourg –, et, pour ses colonels, les nombreux fiefs de cette principauté donnés pour pillage et contribution (Humbert, ''Offizier,'' ''Historische Rechtswörterbuch'', p. 1217-1223). La France reprendra ces territoires à partir de la mort de Bernard de Saxe-Weimar, puis les annexe à partir des traités de Westphalie (Kintz, ''La conquête de l’Alsace'').
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Intervenant dans la guerre de Trente Ans contre la Ligue catholique, dans ces campagnes militaires qui balaient le Saint Empire de la Baltique jusqu’au Danube, le roi de Suède Gustave-Adolphe impose un nouveau modèle d’armée, mieux articulée, avec une hiérarchie de grades militaires : général, colonel, major, capitaine, lieutenant. Un des corps de son armée, celui de Bernard de Saxe-Weimar, est embauché par le roi de France, pour le prix d’une principauté – la Haute-Alsace des Habsbourg –, et, pour ses colonels, les nombreux fiefs de cette principauté donnés pour pillage et contribution (Humbert, ''Offizier,'' ''Historische Rechtswörterbuch'', p. 1217-1223). La France reprendra ces territoires à partir de la mort de Bernard de Saxe-Weimar, puis les annexe à partir des traités de Westphalie (Kintz, ''La conquête de l’Alsace'').
  
 
== Notice connexe ==
 
== Notice connexe ==
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== Les armées de Louis XIV ==
 
== Les armées de Louis XIV ==
  
Cette hiérarchie des grades militaires a été reprise par Louis XIV et ses secrétaires d’État à la guerre, les Le Tellier père, fils (Louvois), petit-fils (Barbezieux). Louis XIV, qui souhaite prendre le contrôle des armées, l’étend en 1663 à toutes les armes de son armée : infanterie, artillerie, cavalerie, avec une hiérarchie correspondante pour la marine. Les tarifs de capitation des officiers français de 1701 énumèrent ces grades pour l’infanterie : « les Colonels d’Infanterie, & autres Officiers qui ont rang de Colonels, les Lieutenants-Colonels d’Infanterie, les Majors, les Capitaines, les Aides-Majors, les Lieutenants, Les Enseignes, Les Officiers Reformés''». Suivis des sous-officiers et soldats : « les Sergents<span style="color:#5d6c7d">, </span>les Soldats, les Fifres & Tambours, les Aumôniers, le Chirurgien, le Prevost, le Greffier, les Fourriers, les Archers & Executeur''(…) ». Dans certains régiments de cavalerie, le colonel prend l’appellation de « mestre de camp ». La hiérarchie des officiers généraux est arrêtée comme suit : « Lieutenans généraux des armées du Roy, Mareschaux de Camp des armées du Roy, Mareschaux des logis des camps & armées, Brigadiers des armées du Roy, Mareschaux généraux de la Cavalerie ». (''Tarif. Capitation des troupes 1713''…).
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Cette hiérarchie des grades militaires a été reprise par Louis XIV et ses secrétaires d’État à la guerre, les Le Tellier père, fils (Louvois), petit-fils (Barbezieux). Louis XIV, qui souhaite prendre le contrôle des armées, l’étend en 1663 à toutes les armes de son armée&nbsp;: infanterie, artillerie, cavalerie, avec une hiérarchie correspondante pour la marine. Les tarifs de capitation des officiers français de 1701 énumèrent ces grades pour l’infanterie&nbsp;: «&nbsp;les Colonels d’Infanterie, & autres Officiers qui ont rang de Colonels, les Lieutenants-Colonels d’Infanterie, les Majors, les Capitaines, les Aides-Majors, les Lieutenants, Les Enseignes, Les Officiers Reformés''». Suivis des sous-officiers et soldats&nbsp;: «&nbsp;les Sergents<span style="color:#5d6c7d">, </span>les Soldats, les Fifres & Tambours, les Aumôniers, le Chirurgien, le Prevost, le Greffier, les Fourriers, les Archers & Executeur''(…)&nbsp;». Dans certains régiments de cavalerie, le colonel prend l’appellation de «&nbsp;mestre de camp&nbsp;». La hiérarchie des officiers généraux est arrêtée comme suit&nbsp;: «&nbsp;Lieutenans généraux des armées du Roy, Mareschaux de Camp des armées du Roy, Mareschaux des logis des camps & armées, Brigadiers des armées du Roy, Mareschaux généraux de la Cavalerie&nbsp;». (''Tarif. Capitation des troupes 1713''…).
  
<span style="letter-spacing:.2pt">Cette norme est imitée désormais par toutes les armées européennes, un des éléments institutionnels de ce que les historiens appellent « la Révolution militaire de l’époque moderne ». Elle procède de l’œuvre réglementaire accomplie par Louis XIV et ses collaborateurs, ministres, intendants, commissaires des guerres, généraux et officiers dans la réalisation de l’outil militaire français exposée dans les compilations des ''Codes militaires''. Mais avec cette réglementation et le bagage professionnel qu’il impose à un corps d’État, c’est dans les sociétés des grands États européens que se répand le type social de l’officier militaire issu de la noblesse, avec son bagage professionnel, son idéologie, sa culture, et … ses intérêts.</span>
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<span style="letter-spacing:.2pt">Cette norme est imitée désormais par toutes les armées européennes, un des éléments institutionnels de ce que les historiens appellent «&nbsp;la Révolution militaire de l’époque moderne&nbsp;». Elle procède de l’œuvre réglementaire accomplie par Louis XIV et ses collaborateurs, ministres, intendants, commissaires des guerres, généraux et officiers dans la réalisation de l’outil militaire français exposée dans les compilations des ''Codes militaires''. Mais avec cette réglementation et le bagage professionnel qu’il impose à un corps d’État, c’est dans les sociétés des grands États européens que se répand le type social de l’officier militaire issu de la noblesse, avec son bagage professionnel, son idéologie, sa culture, et … ses intérêts.</span>
  
== L’armée d’un État entrepreneur de guerre ou celle d’un État avec ses associés : la vénalité des grades et offices ==
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== L’armée d’un État entrepreneur de guerre ou celle d’un État avec ses associés&nbsp;: la vénalité des grades et offices ==
  
 
Mais l’armée de Louis XIV n’est pas celle de l’entrepreneur militaire, elle est celle d’un État qui entend contrôler les différents éléments d’une armée, dont il arrête la structure et la composition.
 
Mais l’armée de Louis XIV n’est pas celle de l’entrepreneur militaire, elle est celle d’un État qui entend contrôler les différents éléments d’une armée, dont il arrête la structure et la composition.
  
Entre la vénalité des charges civiles (v. Offices) et celles des grades militaires, imposées toutes deux par un pouvoir qui entend associer les élites du pays à l’État en ponctionnant une partie de leurs ressources, il y une différence : la vénalité des grades militaires, qui ne sont pas héréditaires, prolonge, en la contrôlant, la pratique du recrutement des mercenaires, par les capitaines et les colonels. Surtout, elle prolonge les levées des bans et arrière-bans de la période féodale, auxquelles on a renoncé au début du XVII<sup>e</sup> siècle, du fait de l’impossibilité de fondre ces contingents dépareillés en unités militaires efficaces.
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Entre la vénalité des charges civiles (v. Offices) et celles des grades militaires, imposées toutes deux par un pouvoir qui entend associer les élites du pays à l’État en ponctionnant une partie de leurs ressources, il y une différence&nbsp;: la vénalité des grades militaires, qui ne sont pas héréditaires, prolonge, en la contrôlant, la pratique du recrutement des mercenaires, par les capitaines et les colonels. Surtout, elle prolonge les levées des bans et arrière-bans de la période féodale, auxquelles on a renoncé au début du XVII<sup>e</sup> siècle, du fait de l’impossibilité de fondre ces contingents dépareillés en unités militaires efficaces.
  
 
Mais le commandement des soldats est en principe réservée à la noblesse, dont la vocation est le métier des armes et qui s’exclut des autres carrières par l’interdit de la dérogeance.
 
Mais le commandement des soldats est en principe réservée à la noblesse, dont la vocation est le métier des armes et qui s’exclut des autres carrières par l’interdit de la dérogeance.
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== Régiments et compagnies à acheter ==
 
== Régiments et compagnies à acheter ==
  
Les régiments et les compagnies sont des unités que leurs officiers doivent acheter, avec leur grade de colonel et de capitaine. Les colonels, sortes d’entrepreneurs, lèvent des régiments et, pour ce faire, s’adressent à des capitaines, sortes de sous-traitants (Bogros, « Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVII<sup>e</sup> siècle »).
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Les régiments et les compagnies sont des unités que leurs officiers doivent acheter, avec leur grade de colonel et de capitaine. Les colonels, sortes d’entrepreneurs, lèvent des régiments et, pour ce faire, s’adressent à des capitaines, sortes de sous-traitants (Bogros, «&nbsp;Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVII<sup>e</sup> siècle&nbsp;»).
  
 
<span style="letter-spacing:-.2pt">Le tarif des régiments et compagnies est fixé par le roi, mais ce tarif officiel est doublé d’un prix de marché bien plus élevé, et souvent hors de portée des aspirants peu fortunés, qui s’associent pour en permettre le rachat par l’un d’entre eux (le concordat).</span>
 
<span style="letter-spacing:-.2pt">Le tarif des régiments et compagnies est fixé par le roi, mais ce tarif officiel est doublé d’un prix de marché bien plus élevé, et souvent hors de portée des aspirants peu fortunés, qui s’associent pour en permettre le rachat par l’un d’entre eux (le concordat).</span>
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L’unité de base est désormais la compagnie. Le gouvernement royal multiplie le nombre de compagnies pour en diviser le prix et place les officiers qui n’ont plus ou pas encore de compagnies ou d’unités dans un corps de réserve d’officiers (les réformés), susceptibles d’être rappelés. Il impose le principe de la promotion au tableau d’avancement, qui associe le choix du pouvoir et l’ancienneté, et crée ainsi une carrière d’officier, à laquelle on se forme tout jeune dans des écoles de cadets.
 
L’unité de base est désormais la compagnie. Le gouvernement royal multiplie le nombre de compagnies pour en diviser le prix et place les officiers qui n’ont plus ou pas encore de compagnies ou d’unités dans un corps de réserve d’officiers (les réformés), susceptibles d’être rappelés. Il impose le principe de la promotion au tableau d’avancement, qui associe le choix du pouvoir et l’ancienneté, et crée ainsi une carrière d’officier, à laquelle on se forme tout jeune dans des écoles de cadets.
  
Le capitaine est un entrepreneur qui amène au roi une compagnie recrutée, à prix d’argent, d’hommes qu’il a habillés, équipés, armés et montés, si la troupe est à cheval. La compagnie et son capitaine possèdent un outillage de transport, de campement, d’écurie, etc. Le capitaine est moralement et pécuniairement responsable envers le ministre qui le paie ; une telle compagnie coûte cher à lever, à entretenir, à compléter. À terme, il peut ou doit, pour limiter ses pertes, vendre sa compagnie à un officier, autre capitaine, capitaine réformé, ou lieutenant, reconnu capable et pourvu d’une commission de capitaine. Le capitaine tué sans avoir revendu sa compagnie a perdu sa vie et son capital (et celui de sa famille). À titre d’exemple, une ordonnance royale fixe le prix d’une compagnie de grenadiers à 40 000 livres, et son capitaine gagne 6 000 livres par an. Le prix est très fort et le capitaine ne peut se refaire qu’en revendant assez vite, la durée moyenne d’un commandement est de quelques années dans l’infanterie, deux ans et demi dans la cavalerie (Rowlands, ''The Dynastic State and the Army under Louis XIV'', p. 252-253).
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Le capitaine est un entrepreneur qui amène au roi une compagnie recrutée, à prix d’argent, d’hommes qu’il a habillés, équipés, armés et montés, si la troupe est à cheval. La compagnie et son capitaine possèdent un outillage de transport, de campement, d’écurie, etc. Le capitaine est moralement et pécuniairement responsable envers le ministre qui le paie&nbsp;; une telle compagnie coûte cher à lever, à entretenir, à compléter. À terme, il peut ou doit, pour limiter ses pertes, vendre sa compagnie à un officier, autre capitaine, capitaine réformé, ou lieutenant, reconnu capable et pourvu d’une commission de capitaine. Le capitaine tué sans avoir revendu sa compagnie a perdu sa vie et son capital (et celui de sa famille). À titre d’exemple, une ordonnance royale fixe le prix d’une compagnie de grenadiers à 40 000 livres, et son capitaine gagne 6 000 livres par an. Le prix est très fort et le capitaine ne peut se refaire qu’en revendant assez vite, la durée moyenne d’un commandement est de quelques années dans l’infanterie, deux ans et demi dans la cavalerie (Rowlands, ''The Dynastic State and the Army under Louis XIV'', p. 252-253).
  
Quand il constitue sa compagnie, ou quand il doit en compléter l’effectif, le capitaine recrute ses soldats dans sa seigneurie, qui souvent n’est jamais assez étendue pour fournir les 40 hommes (effectif moyen d’une compagnie) dont il a besoin, et donc il compte sur une multitude de recruteurs : aubergistes, marchands, curés, officiers d’autres unités. Il doit l’équiper – uniformes, habits, etc. – et fait appel à une multitude d’intermédiaires et d’artisans. Dans les villes de garnison comme Strasbourg, des centaines d’artisans – tisserands, tailleurs, tanneurs, bottiers – vivent de ces commandes, le gouvernement se chargeant de livrer les mousquets et fusils à partir de 1680 (Rowlands, ''The Dynastic State and the Army under Louis XIV'', p. 207 et ss). De même, les officiers font appel aux maquignons pour leurs chevaux (Ingold, « Les juifs de Haute-Alsace au XVII<sup>e</sup> siècle, le grand retour », ''RA'', 2008, p. 107-129). À partir du milieu du XVIII<sup>e</sup> siècle, les intendants développent le réseau de l’élevage chevalin, auquel l’Alsace sera si attachée, autour des haras et des chevaux placés de la réserve pour la remonte (Bogros, « Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVII<sup>e</sup> siècle »). Outre les deux importantes garnisons de Strasbourg et Belfort, l’Alsace abrite dix autres places-fortes. En 1704 et jusqu’en 1753, la grande majorité des Strasbourgeois doivent partager leurs logements avec des soldats ou des officiers (v. Garnison).
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Quand il constitue sa compagnie, ou quand il doit en compléter l’effectif, le capitaine recrute ses soldats dans sa seigneurie, qui souvent n’est jamais assez étendue pour fournir les 40 hommes (effectif moyen d’une compagnie) dont il a besoin, et donc il compte sur une multitude de recruteurs&nbsp;: aubergistes, marchands, curés, officiers d’autres unités. Il doit l’équiper – uniformes, habits, etc. – et fait appel à une multitude d’intermédiaires et d’artisans. Dans les villes de garnison comme Strasbourg, des centaines d’artisans – tisserands, tailleurs, tanneurs, bottiers – vivent de ces commandes, le gouvernement se chargeant de livrer les mousquets et fusils à partir de 1680 (Rowlands, ''The Dynastic State and the Army under Louis XIV'', p. 207 et ss). De même, les officiers font appel aux maquignons pour leurs chevaux (Ingold, «&nbsp;Les juifs de Haute-Alsace au XVII<sup>e</sup> siècle, le grand retour&nbsp;», ''RA'', 2008, p. 107-129). À partir du milieu du XVIII<sup>e</sup> siècle, les intendants développent le réseau de l’élevage chevalin, auquel l’Alsace sera si attachée, autour des haras et des chevaux placés de la réserve pour la remonte (Bogros, «&nbsp;Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVII<sup>e</sup> siècle&nbsp;»). Outre les deux importantes garnisons de Strasbourg et Belfort, l’Alsace abrite dix autres places-fortes. En 1704 et jusqu’en 1753, la grande majorité des Strasbourgeois doivent partager leurs logements avec des soldats ou des officiers (v. Garnison).
  
 
== Le beau XVIII<sup>e</sup> siècle de l’Alsace française ==
 
== Le beau XVIII<sup>e</sup> siècle de l’Alsace française ==
  
La noblesse alsacienne a volontiers servi dans les armées françaises, comme officiers des régiments d’infanterie ou des régiments étrangers, comme en témoignent mémoires et correspondances. L’évocation des familles et des sociétés d’officiers nobles avec leur genre de vie – châteaux, salons, théâtre et opéra, chasses réservées, mais aussi architecture et arts – a figuré parmi les thèmes dominants d’un XVIII<sup>e</sup> siècle « français » en Alsace, dans des publications souvent bien postérieures et bien proches d’une littérature de propagande.
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La noblesse alsacienne a volontiers servi dans les armées françaises, comme officiers des régiments d’infanterie ou des régiments étrangers, comme en témoignent mémoires et correspondances. L’évocation des familles et des sociétés d’officiers nobles avec leur genre de vie – châteaux, salons, théâtre et opéra, chasses réservées, mais aussi architecture et arts – a figuré parmi les thèmes dominants d’un XVIII<sup>e</sup> siècle «&nbsp;français&nbsp;» en Alsace, dans des publications souvent bien postérieures et bien proches d’une littérature de propagande.
  
 
Certains princes du Saint Empire tiennent à être colonels de régiments français, avec des lieutenants-colonels alsaciens pour le commandement effectif. Ainsi du Royal-Wurtemberg (Montbéliard), devenu après 100 ans de service le Royal-Allemand de cavalerie, dans lequel sert l’enseigne Antoine-Joseph Zorn de Bulach de 1756 jusqu’à 1778 (ENGEL (Karl), ''Der Fähnrich Zorn von Bulach vom Regimente Württemberg zu Pferd im Siebenjährigen Kriege 1757-1758 nach seinem Tagebuche'', Strasbourg, 1908), où il se retire comme capitaine (réformé, soit sans compagnie) et chevalier de l’Ordre de Saint-Louis. Le régiment est commandé par le colonel propriétaire, le lieutenant-général prince Louis de Wurtemberg, assisté des lieutenants-colonels, le comte de Rosen, petit-fils d’un colonel de Bernard de Saxe-Weimar, et on trouve dans ce régiment plusieurs officiers issus de la noblesse de Haute ou de Basse-Alsace, comme Güntzer, Eptingen, de Gohr, Montjoie-Froherg… Les unités de la garnison de Strasbourg rassemblent près de 600 officiers (Engel, ''Strassburg als Garnisonsstadt''). Les régiments étrangers, dont les noms peuvent changer avec ceux de leurs colonels – Royal Wurtemberg, Royal Allemand, Royal Alsace, Royal Nassau, Royal Saxe, Royal Bavière, Royal Suédois, Anhalt, Hesse-Darmstadt –, ont périodiquement des bataillons en garnison à Strasbourg et leurs colonels propriétaires y résident parfois dans des résidences somptueuses, dont ils dotent Strasbourg, la principale garnison et sa campagne.
 
Certains princes du Saint Empire tiennent à être colonels de régiments français, avec des lieutenants-colonels alsaciens pour le commandement effectif. Ainsi du Royal-Wurtemberg (Montbéliard), devenu après 100 ans de service le Royal-Allemand de cavalerie, dans lequel sert l’enseigne Antoine-Joseph Zorn de Bulach de 1756 jusqu’à 1778 (ENGEL (Karl), ''Der Fähnrich Zorn von Bulach vom Regimente Württemberg zu Pferd im Siebenjährigen Kriege 1757-1758 nach seinem Tagebuche'', Strasbourg, 1908), où il se retire comme capitaine (réformé, soit sans compagnie) et chevalier de l’Ordre de Saint-Louis. Le régiment est commandé par le colonel propriétaire, le lieutenant-général prince Louis de Wurtemberg, assisté des lieutenants-colonels, le comte de Rosen, petit-fils d’un colonel de Bernard de Saxe-Weimar, et on trouve dans ce régiment plusieurs officiers issus de la noblesse de Haute ou de Basse-Alsace, comme Güntzer, Eptingen, de Gohr, Montjoie-Froherg… Les unités de la garnison de Strasbourg rassemblent près de 600 officiers (Engel, ''Strassburg als Garnisonsstadt''). Les régiments étrangers, dont les noms peuvent changer avec ceux de leurs colonels – Royal Wurtemberg, Royal Allemand, Royal Alsace, Royal Nassau, Royal Saxe, Royal Bavière, Royal Suédois, Anhalt, Hesse-Darmstadt –, ont périodiquement des bataillons en garnison à Strasbourg et leurs colonels propriétaires y résident parfois dans des résidences somptueuses, dont ils dotent Strasbourg, la principale garnison et sa campagne.
  
Les officiers nobles tiennent à s’assurer que leurs fils pourront à leur tour accéder aux grades et aux commandements. La formation des cadets passe par les écoles régimentaires, comme celle de Royal Alsace Infanterie (v. Alsace Infanterie) ou celles des cadets-gentilshommes de Strasbourg et Neuf-Brisach sous Louvois (v. Cadets-gentilshommes). En 1727, est créée et logée à la citadelle de Strasbourg une école de cadets. Mais le caractère extrêmement turbulent et violent de cette jeune noblesse querelleuse et duelleuse a été relevé par tous les témoins : « La citadelle sert aujourd’hui d’école à plus de cent cadets, qu’on y instruit dans les mathématiques et la science des fortifications. Le tempérament fougueux de la nation, ainsi que l’ardeur juvénile dont les Français ne se démettent que très tard, fait que très souvent ces jeunes gens ont des querelles entre eux et plus encore avec d’autres ; c’est pourquoi ils vivent internés dans la citadelle et on n’en laisse sortir que quelques-uns à la fois. » Elle semble avoir été supprimée en 1733 (v. Cadets-gentilshommes). Une formation plus complète doit être assurée par les douze collèges militaires, dont Brienne, Sorrèze, Strasbourg et l’École militaire de Paris, (v. Artillerie, École d’ -). L’école de Mézières forme les ingénieurs et officiers du génie (v. Génie, Ingénieurs du roi).
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Les officiers nobles tiennent à s’assurer que leurs fils pourront à leur tour accéder aux grades et aux commandements. La formation des cadets passe par les écoles régimentaires, comme celle de Royal Alsace Infanterie (v. Alsace Infanterie) ou celles des cadets-gentilshommes de Strasbourg et Neuf-Brisach sous Louvois (v. Cadets-gentilshommes). En 1727, est créée et logée à la citadelle de Strasbourg une école de cadets. Mais le caractère extrêmement turbulent et violent de cette jeune noblesse querelleuse et duelleuse a été relevé par tous les témoins&nbsp;: «&nbsp;La citadelle sert aujourd’hui d’école à plus de cent cadets, qu’on y instruit dans les mathématiques et la science des fortifications. Le tempérament fougueux de la nation, ainsi que l’ardeur juvénile dont les Français ne se démettent que très tard, fait que très souvent ces jeunes gens ont des querelles entre eux et plus encore avec d’autres&nbsp;; c’est pourquoi ils vivent internés dans la citadelle et on n’en laisse sortir que quelques-uns à la fois.&nbsp;» Elle semble avoir été supprimée en 1733 (v. Cadets-gentilshommes). Une formation plus complète doit être assurée par les douze collèges militaires, dont Brienne, Sorrèze, Strasbourg et l’École militaire de Paris, (v. Artillerie, École d’ -). L’école de Mézières forme les ingénieurs et officiers du génie (v. Génie, Ingénieurs du roi).
  
 
== Les milices provinciales ==
 
== Les milices provinciales ==
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Princes, seigneurs et Villes d’Alsace ont nommé les officiers de leurs milices (v. Milices urbaines, Milices provinciales). Les officiers des milices bourgeoises sont nommés par les magistrats, à partir d’un vivier d’anciens officiers ou de cadres des S''chutzenvereine''. Elles sont supprimées à partir de l’annexion à la France (v. Milices bourgeoises).
 
Princes, seigneurs et Villes d’Alsace ont nommé les officiers de leurs milices (v. Milices urbaines, Milices provinciales). Les officiers des milices bourgeoises sont nommés par les magistrats, à partir d’un vivier d’anciens officiers ou de cadres des S''chutzenvereine''. Elles sont supprimées à partir de l’annexion à la France (v. Milices bourgeoises).
  
À partir de 1692, la monarchie impose la constitution de milices provinciales procédant des levées opérées par les paroisses. Régiments et compagnies des milices ainsi que leurs grades ne sont pas en vente : les officiers sont nommés par les gouverneurs militaires et commandants de province, choisis parmi les officiers de réserve. À partir de 1770, les deux bataillons de milices de Basse et de Haute-Alsace servent avant tout de réserve pour les régiments de l’armée permanente (v. Milices provinciales).
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À partir de 1692, la monarchie impose la constitution de milices provinciales procédant des levées opérées par les paroisses. Régiments et compagnies des milices ainsi que leurs grades ne sont pas en vente&nbsp;: les officiers sont nommés par les gouverneurs militaires et commandants de province, choisis parmi les officiers de réserve. À partir de 1770, les deux bataillons de milices de Basse et de Haute-Alsace servent avant tout de réserve pour les régiments de l’armée permanente (v. Milices provinciales).
  
 
== La réaction nobiliaire et la Révolution ==
 
== La réaction nobiliaire et la Révolution ==
  
À partir de 1750, les édits royaux prévoient l’annoblissement des officiers roturiers dont les pères ont déjà été officiers, mais la mesure est appliquée très chichement. En 1781, la carrière des officiers est réservée à la noblesse et, en 1788, les ordonnances du ministre de la Guerre Ségur prévoient un avancement accéléré pour la haute noblesse, ce qui entraîne les protestations du gros du corps des officiers. « Le noble de cour touchait à peu près cinq fois plus et servait deux fois moins que le noble de province » protestent, en 1789, les officiers de la garnison de Strasbourg (les régiments Royal Alsace, Artillerie, Hesse-Darmstadt, Corps royal du génie Arch. hist. de la Guerre, A. 28) (cité par Louis Hartmann, « Les officiers de l’armée royale à la veille de la Révolution », ''Revue Historique'', 1910.)
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À partir de 1750, les édits royaux prévoient l’annoblissement des officiers roturiers dont les pères ont déjà été officiers, mais la mesure est appliquée très chichement. En 1781, la carrière des officiers est réservée à la noblesse et, en 1788, les ordonnances du ministre de la Guerre Ségur prévoient un avancement accéléré pour la haute noblesse, ce qui entraîne les protestations du gros du corps des officiers. «&nbsp;Le noble de cour touchait à peu près cinq fois plus et servait deux fois moins que le noble de province&nbsp;» protestent, en 1789, les officiers de la garnison de Strasbourg (les régiments Royal Alsace, Artillerie, Hesse-Darmstadt, Corps royal du génie Arch. hist. de la Guerre, A. 28) (cité par Louis Hartmann, «&nbsp;Les officiers de l’armée royale à la veille de la Révolution&nbsp;», ''Revue Historique'', 1910.)
  
== Les états généraux de 1789 : les officiers majoritaires dans l’ordre de la noblesse ==
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== Les états généraux de 1789&nbsp;: les officiers majoritaires dans l’ordre de la noblesse ==
  
Dans les assemblées électorales de 1789, en Alsace comme ailleurs dans le Royaume, les officiers d’active ou de réserve représentent le corps professionnel majoritaire dans l’ordre de la noblesse. En Alsace, sur dix députés de la noblesse, cinq sont officiers, colonels ou généraux, ayant servi dans les régiments au fort recrutement d’Alsaciens : Flachslanden (Royal Allemand, puis Nassau, puis Bouillon de 1756 à 1780, commandant d’Alsace en second) ; Rathsamhausen (colonel du régiment Deux-Ponts de 1777 à 1779, en retraite) ; Andlau-Hombourg (colonel Royal Allemand, brigadier 1781) ; Landenberg (régiment de Nassau, en retraite) ; Broglie (officier au régiment de Saintonge, en retraite) (De la Roque, Barthélemy, ''Catalogue des gentilshommes d’Alsace…'' et ''NDBA'').
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Dans les assemblées électorales de 1789, en Alsace comme ailleurs dans le Royaume, les officiers d’active ou de réserve représentent le corps professionnel majoritaire dans l’ordre de la noblesse. En Alsace, sur dix députés de la noblesse, cinq sont officiers, colonels ou généraux, ayant servi dans les régiments au fort recrutement d’Alsaciens&nbsp;: Flachslanden (Royal Allemand, puis Nassau, puis Bouillon de 1756 à 1780, commandant d’Alsace en second)&nbsp;; Rathsamhausen (colonel du régiment Deux-Ponts de 1777 à 1779, en retraite)&nbsp;; Andlau-Hombourg (colonel Royal Allemand, brigadier 1781)&nbsp;; Landenberg (régiment de Nassau, en retraite)&nbsp;; Broglie (officier au régiment de Saintonge, en retraite) (De la Roque, Barthélemy, ''Catalogue des gentilshommes d’Alsace…'' et ''NDBA'').
  
 
= III. La Révolution et l’Empire =
 
= III. La Révolution et l’Empire =
  
== La Révolution : les soldats et officiers de l’an II ==
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== La Révolution&nbsp;: les soldats et officiers de l’an II ==
  
 
La Révolution abroge les règlements qui réservaient l’accès aux grades militaires à la noblesse.
 
La Révolution abroge les règlements qui réservaient l’accès aux grades militaires à la noblesse.
  
Dans la garde nationale, créée en 1789, organisée en 1790, c’est le principe électif qui régit le choix des officiers. Les gardes d’une compagnie, réunis avec les maires au chef-lieu de canton, procèdent à l’élection à la majorité absolue des officiers des compagnies : capitaine, lieutenants, sous-lieutenants. Puis, ils élisent les sergents et caporaux, etc. Les officiers se réunissent alors au chef-lieu de canton et, sous la présidence du capitaine le plus âgé, répartissent les compagnies en bataillons, à raison de cinq compagnies par bataillon (v. Garde nationale).
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Dans la garde nationale, créée en 1789, organisée en 1790, c’est le principe électif qui régit le choix des officiers. Les gardes d’une compagnie, réunis avec les maires au chef-lieu de canton, procèdent à l’élection à la majorité absolue des officiers des compagnies&nbsp;: capitaine, lieutenants, sous-lieutenants. Puis, ils élisent les sergents et caporaux, etc. Les officiers se réunissent alors au chef-lieu de canton et, sous la présidence du capitaine le plus âgé, répartissent les compagnies en bataillons, à raison de cinq compagnies par bataillon (v. Garde nationale).
  
C’est aussi le principe électif qui est appliqué pour le choix des officiers des unités de volontaires : sont élus des anciens officiers ou sous-officiers.
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C’est aussi le principe électif qui est appliqué pour le choix des officiers des unités de volontaires&nbsp;: sont élus des anciens officiers ou sous-officiers.
  
== Émigration et épurations nobiliaires : officiers d’origine populaire ==
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== Émigration et épurations nobiliaires&nbsp;: officiers d’origine populaire ==
  
 
Le nombre d’officiers nommés aux postes vacants se multiplie dans l’armée de ligne, avec l’émigration et l’épuration nobiliaire de 1791 à 1794 et les pertes de la guerre. En Alsace, la plupart des officiers nobles émigrent ou se retirent. Un certain nombre d’entre eux se rallient et poursuivent leurs carrières, d’autres reviennent à l’armée après Thermidor, ou sous le Consulat. Cependant, la majorité des officiers est désormais d’origine populaire. La grande majorité de ces officiers sont d’anciens soldats, ou sous-officiers. Le plus célèbre d’entre eux, Kléber, a même servi dix ans dans l’armée bavaroise et dans l’armée autrichienne, ce qui le désigne au vote de ses compatriotes du bataillon des volontaires du Haut-Rhin (1792). Kellermann, autre général alsacien de la Révolution, était déjà général en 1788 et ne s’était pas retiré, mais il avait échappé à la guillotine avec le 9 Thermidor.
 
Le nombre d’officiers nommés aux postes vacants se multiplie dans l’armée de ligne, avec l’émigration et l’épuration nobiliaire de 1791 à 1794 et les pertes de la guerre. En Alsace, la plupart des officiers nobles émigrent ou se retirent. Un certain nombre d’entre eux se rallient et poursuivent leurs carrières, d’autres reviennent à l’armée après Thermidor, ou sous le Consulat. Cependant, la majorité des officiers est désormais d’origine populaire. La grande majorité de ces officiers sont d’anciens soldats, ou sous-officiers. Le plus célèbre d’entre eux, Kléber, a même servi dix ans dans l’armée bavaroise et dans l’armée autrichienne, ce qui le désigne au vote de ses compatriotes du bataillon des volontaires du Haut-Rhin (1792). Kellermann, autre général alsacien de la Révolution, était déjà général en 1788 et ne s’était pas retiré, mais il avait échappé à la guillotine avec le 9 Thermidor.
  
Parmi les 149 généraux, dont Dubois de Crancé demande la nomination à la Convention à la fin de 1793, on relève que tous les Alsaciens nommés sont d’anciens soldats des régiments étrangers. À l’armée du Nord, un divisionnaire, le baron de Schauenbourg, est un ancien du régiment Alsace, en dernier lieu colonel du régiment Nassau (1791). Kléber est divisionnaire à l’armée de Sambre‑et‑Meuse, avec un général de brigade alsacien, Rewbel, issu des milices provinciales. On trouve trois divisionnaires à l’armée de Rhin et Moselle : Scherr, ancien du régiment d’Anhalt, Schaal du régiment de Nassau et Dorsner du régiment de Bavière (prince Max) (Dubois de Crancé, ''Rapport et tableau des officiers généraux, adjudans généraux et commissaires des guerres…'').
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Parmi les 149 généraux, dont Dubois de Crancé demande la nomination à la Convention à la fin de 1793, on relève que tous les Alsaciens nommés sont d’anciens soldats des régiments étrangers. À l’armée du Nord, un divisionnaire, le baron de Schauenbourg, est un ancien du régiment Alsace, en dernier lieu colonel du régiment Nassau (1791). Kléber est divisionnaire à l’armée de Sambre‑et‑Meuse, avec un général de brigade alsacien, Rewbel, issu des milices provinciales. On trouve trois divisionnaires à l’armée de Rhin et Moselle&nbsp;: Scherr, ancien du régiment d’Anhalt, Schaal du régiment de Nassau et Dorsner du régiment de Bavière (prince Max) (Dubois de Crancé, ''Rapport et tableau des officiers généraux, adjudans généraux et commissaires des guerres…'').
  
 
== L’amalgame des bataillons et celui des officiers ==
 
== L’amalgame des bataillons et celui des officiers ==
  
En 1793, une série de lois et décrets arrête les règles de nomination des officiers dans les demi-brigades, amalgamées de trois bataillons, l’un de la ligne, les deux autres de volontaires. On y applique une règle des trois tiers : un tiers à l’ancienneté, un par l’élection (dans une liste de trois officiers du grade inférieur) et un au choix par le commandement.
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En 1793, une série de lois et décrets arrête les règles de nomination des officiers dans les demi-brigades, amalgamées de trois bataillons, l’un de la ligne, les deux autres de volontaires. On y applique une règle des trois tiers&nbsp;: un tiers à l’ancienneté, un par l’élection (dans une liste de trois officiers du grade inférieur) et un au choix par le commandement.
  
 
Mais, au cours des campagnes de la Révolution, les nécessités imposent souvent d’ignorer ces règles et c’est le commandant de l’unité ou le représentant du peuple en mission qui procède aux nominations.
 
Mais, au cours des campagnes de la Révolution, les nécessités imposent souvent d’ignorer ces règles et c’est le commandant de l’unité ou le représentant du peuple en mission qui procède aux nominations.
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== Après Thermidor, réexamen général des recrutements et promotions d’officiers ==
 
== Après Thermidor, réexamen général des recrutements et promotions d’officiers ==
  
Après Thermidor, et sous le Directoire, on procède à un examen généralisé du corps des officiers (dont on exige par exemple qu’ils sachent lire et écrire), ainsi qu’à la mise à la retraite d’une bonne partie des insuffisants (Bertaud). Cela peut entraîner des problèmes pour les officiers d’origine alsacienne ou mosellane. En avril 1794, certains officiers, exclus par cette mesure, poussent leurs soldats à la désertion : ils furent fusillés. Il y eut une révolte semblable parmi les Mosellans de l’armée du Rhin : ils savaient lire et écrire l’allemand et pas le français, la justice militaire admit l’erreur et ils eurent la vie sauve (Bertaud, ''Le recrutement et l’avancement des officiers de la Révolution''). Mais l’émigration, la désertion et l’amalgame ont eu raison de la langue allemande, encore utilisée comme langue de commandement dans les régiments allemands jusqu’en 1792.
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Après Thermidor, et sous le Directoire, on procède à un examen généralisé du corps des officiers (dont on exige par exemple qu’ils sachent lire et écrire), ainsi qu’à la mise à la retraite d’une bonne partie des insuffisants (Bertaud). Cela peut entraîner des problèmes pour les officiers d’origine alsacienne ou mosellane. En avril 1794, certains officiers, exclus par cette mesure, poussent leurs soldats à la désertion&nbsp;: ils furent fusillés. Il y eut une révolte semblable parmi les Mosellans de l’armée du Rhin&nbsp;: ils savaient lire et écrire l’allemand et pas le français, la justice militaire admit l’erreur et ils eurent la vie sauve (Bertaud, ''Le recrutement et l’avancement des officiers de la Révolution''). Mais l’émigration, la désertion et l’amalgame ont eu raison de la langue allemande, encore utilisée comme langue de commandement dans les régiments allemands jusqu’en 1792.
  
 
== La loi Jourdan et la conscription universelle (1798) ==
 
== La loi Jourdan et la conscription universelle (1798) ==
  
La loi Jourdan de 1798 institue la conscription universelle. Avec les guerres quasiment ininterrompues (1798-1802 ; 1804-1805 ; 1806-1807 ; 1809-1812 ; 1814-1815), l’armée est devenue une institution centrale et les officiers prennent place dans la société des notables. Mais, reconstituée depuis la Révolution, elle est désormais « le conservatoire du patriotisme républicain » (Gainot, ''Honneurs et Malheurs, héritages et mutations de l’armée napoléonienne (1795-1815)'', p. 563). Les officiers occupent la première place dans la société, comme le prévoit le décret du 24 messidor an XII (13 juillet 1804) sur « les honneurs et préséances ». Les officiers militaires ont toujours préséance sur les officiers civils, le général sur le préfet et sur l’évêque. Les traitements des militaires sont toujours supérieurs à ceux des civils à niveau hiérarchique correspondant (Gainot, p. 590).
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La loi Jourdan de 1798 institue la conscription universelle. Avec les guerres quasiment ininterrompues (1798-1802&nbsp;; 1804-1805&nbsp;; 1806-1807&nbsp;; 1809-1812&nbsp;; 1814-1815), l’armée est devenue une institution centrale et les officiers prennent place dans la société des notables. Mais, reconstituée depuis la Révolution, elle est désormais «&nbsp;le conservatoire du patriotisme républicain&nbsp;» (Gainot, ''Honneurs et Malheurs, héritages et mutations de l’armée napoléonienne (1795-1815)'', p. 563). Les officiers occupent la première place dans la société, comme le prévoit le décret du 24 messidor an XII (13 juillet 1804) sur «&nbsp;les honneurs et préséances&nbsp;». Les officiers militaires ont toujours préséance sur les officiers civils, le général sur le préfet et sur l’évêque. Les traitements des militaires sont toujours supérieurs à ceux des civils à niveau hiérarchique correspondant (Gainot, p. 590).
  
 
À partir du Consulat, le choix des officiers de troupe jusqu’à colonel est laissé à la cooptation par les grades supérieurs, sous réserve de confirmation par le commandement. Les nominations de généraux relèvent du commandant en chef, le Premier consul ou l’Empereur.
 
À partir du Consulat, le choix des officiers de troupe jusqu’à colonel est laissé à la cooptation par les grades supérieurs, sous réserve de confirmation par le commandement. Les nominations de généraux relèvent du commandant en chef, le Premier consul ou l’Empereur.
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En 1814 et 1815, des milliers d’officiers sont placés en demi-solde ou mis à la retraite. Le nombre d’officiers démobilisés ou demi-soldes effraie le nouveau pouvoir et les quelques émigrés officiers d’Ancien Régime, ayant servi dans l’armée de Condé ou les armées des princes ennemis, revenus au pays (Leuilliot, ''La première Restauration, les Cent Jours en Alsace'').
 
En 1814 et 1815, des milliers d’officiers sont placés en demi-solde ou mis à la retraite. Le nombre d’officiers démobilisés ou demi-soldes effraie le nouveau pouvoir et les quelques émigrés officiers d’Ancien Régime, ayant servi dans l’armée de Condé ou les armées des princes ennemis, revenus au pays (Leuilliot, ''La première Restauration, les Cent Jours en Alsace'').
  
La plupart des officiers d’active ou réformés ne remplit pas les conditions pour faire partie du corps électoral censitaire. Mais une partie de la noblesse alsacienne, qui a pu reconstituer ses domaines, s’est souvent ralliée et a servi dans les armées de l’Empire : elle reprend sa place dans le corps politique (v. Noblesse Alsacienne, Révolution et Empire). Cependant, la loi Gouvion-Saint-Cyr maintient le principe essentiel des lois de la Révolution : le lien entre la défense nationale et la citoyenneté.
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La plupart des officiers d’active ou réformés ne remplit pas les conditions pour faire partie du corps électoral censitaire. Mais une partie de la noblesse alsacienne, qui a pu reconstituer ses domaines, s’est souvent ralliée et a servi dans les armées de l’Empire&nbsp;: elle reprend sa place dans le corps politique (v. Noblesse Alsacienne, Révolution et Empire). Cependant, la loi Gouvion-Saint-Cyr maintient le principe essentiel des lois de la Révolution&nbsp;: le lien entre la défense nationale et la citoyenneté.
  
Pourtant, les quatre mille officiers retraités ou en demi-solde dans les départements d’Alsace sont surveillés de près, car ils sont « travaillés par le jacobinisme, portent leurs anciens uniformes et de grosses moustaches », car on craint leur influence sur les garnisons ou sur la garde nationale (Leuilliot, ''L’Alsace au début du XIX<sup>e</sup> siècle'', p. 130-140).
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Pourtant, les quatre mille officiers retraités ou en demi-solde dans les départements d’Alsace sont surveillés de près, car ils sont «&nbsp;travaillés par le jacobinisme, portent leurs anciens uniformes et de grosses moustaches&nbsp;», car on craint leur influence sur les garnisons ou sur la garde nationale (Leuilliot, ''L’Alsace au début du XIX<sup>e</sup> siècle'', p. 130-140).
  
 
== Libéralisme et nationalités ==
 
== Libéralisme et nationalités ==
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Ces hommes et leur milieu, marqués par le Premier Empire, constituent le foyer de la culture libérale et nationaliste de l’Alsace qui s’imposera, après la période de compression de la Sainte-Alliance, dans la décennie entre 1830 et 1840.
 
Ces hommes et leur milieu, marqués par le Premier Empire, constituent le foyer de la culture libérale et nationaliste de l’Alsace qui s’imposera, après la période de compression de la Sainte-Alliance, dans la décennie entre 1830 et 1840.
  
== Bibliographie ==
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= Bibliographie =
  
 
''Code militaire, ou Compilation des règlemens et ordonnances de Louis XIV... faites pour les gens de guerre depuis 1651 jusques à présent, par M. le chevalier de Sparre....'', Paris, 1707 (Gallica).
 
''Code militaire, ou Compilation des règlemens et ordonnances de Louis XIV... faites pour les gens de guerre depuis 1651 jusques à présent, par M. le chevalier de Sparre....'', Paris, 1707 (Gallica).
  
''Tarif. Capitation des troupes 1713. De l’état des sommes que le Roi veut et ordonne être payées par les officiers généraux et autres des troupes de Sa Majesté et par les soldats, cavaliers et dragons, par les officiers, majors des places, officiers d’artillerie et autres, pour leur capitation, en exécution de la déclaration du 12 mars 1701'', http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb33674897n.
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''Tarif. Capitation des troupes 1713. De l’état des sommes que le Roi veut et ordonne être payées par les officiers généraux et autres des troupes de Sa Majesté et par les soldats, cavaliers et dragons, par les officiers, majors des places, officiers d’artillerie et autres, pour leur capitation, en exécution de la déclaration du 12 mars 1701'', [http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb33674897n http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb33674897n].
  
''L’État de la France'', t. IV : ''Des ordres du roi. Des chevaliers du S. Esprit, de S. Michel, de la Toison d’or & de S. Lazare. Du connétable, des maréchaux de France & autres officiers de guerre. Du grand-maître de l’artillerie. De l’amiral & de la marine. Du général des galeres. Des conseils du roi & gouvernemens des provinces'', Paris, 1789.
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''L’État de la France'', t. IV&nbsp;: ''Des ordres du roi. Des chevaliers du S. Esprit, de S. Michel, de la Toison d’or & de S. Lazare. Du connétable, des maréchaux de France & autres officiers de guerre. Du grand-maître de l’artillerie. De l’amiral & de la marine. Du général des galeres. Des conseils du roi & gouvernemens des provinces'', Paris, 1789.
  
DUBOIS DE CRANCÉ (Edmond-Louis-Alexis), ''Rapport et tableau des officiers généraux, adjudans généraux et commissaires des guerres qui doivent être en activité de service la campagne prochaine dans les armées de la République : présentés à la discussion de la Convention nationale au nom du Comité de salut public'', Paris, 1794.
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DUBOIS DE CRANCÉ (Edmond-Louis-Alexis), ''Rapport et tableau des officiers généraux, adjudans généraux et commissaires des guerres qui doivent être en activité de service la campagne prochaine dans les armées de la République&nbsp;: présentés à la discussion de la Convention nationale au nom du Comité de salut public'', Paris, 1794.
  
 
<span style="text-transform:uppercase">de la Roque</span> (Louis), <span style="text-transform:uppercase">de Barthélemy</span> (Edouard), ''Catalogue des gentilshommes d’Alsace, Corse, Comtat-Venaissin qui ont pris part ou ont envoyé leurs procurations aux Assemblées de la noblesse pour l’élection des députés aux Etats-généraux de ''1789, Paris, 1865.
 
<span style="text-transform:uppercase">de la Roque</span> (Louis), <span style="text-transform:uppercase">de Barthélemy</span> (Edouard), ''Catalogue des gentilshommes d’Alsace, Corse, Comtat-Venaissin qui ont pris part ou ont envoyé leurs procurations aux Assemblées de la noblesse pour l’élection des députés aux Etats-généraux de ''1789, Paris, 1865.
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ENGEL (Karl), ''Der Fähnrich Zorn von Bulach vom Regimente Württemberg zu Pferd im Siebenjährigen Kriege 1757-1758 nach seinem Tagebuche'', Strasbourg, 1908.
 
ENGEL (Karl), ''Der Fähnrich Zorn von Bulach vom Regimente Württemberg zu Pferd im Siebenjährigen Kriege 1757-1758 nach seinem Tagebuche'', Strasbourg, 1908.
  
SAUTAI (Maurice), ''Les milices provinciales sous Louvois et Barbezieux (1688-1697)'', Paris, 1909, http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb31303460q.
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SAUTAI (Maurice), ''Les milices provinciales sous Louvois et Barbezieux (1688-1697)'', Paris, 1909, [http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb31303460q http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb31303460q].
  
HARTMANN (Louis), « Les officiers de l’armée royale à la veille de la Révolution », ''Revue Historique'', 101, 1910, p. 38-79.
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HARTMANN (Louis), «&nbsp;Les officiers de l’armée royale à la veille de la Révolution&nbsp;», ''Revue Historique'', 101, 1910, p. 38-79.
  
 
LEUILLIOT (Paul), ''La première Restauration, les Cent Jours en Alsace'', Paris, 1958.
 
LEUILLIOT (Paul), ''La première Restauration, les Cent Jours en Alsace'', Paris, 1958.
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LEUILLIOT (Paul), ''L’Alsace au début du XIX<sup>e</sup> siècle'', Paris, 1959, p. 130-140.
 
LEUILLIOT (Paul), ''L’Alsace au début du XIX<sup>e</sup> siècle'', Paris, 1959, p. 130-140.
  
BERTAUD (Jean-Paul), « Le recrutement et l’avancement des officiers de la Révolution », ''Annales historiques de la Révolution française'', 210, 1972, p. 513-536, https://www.persee.fr/doc/ahrf_0003-4436_1972_num_210_1_4681<span style="color:navy">.</span>
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BERTAUD (Jean-Paul), «&nbsp;Le recrutement et l’avancement des officiers de la Révolution&nbsp;», ''Annales historiques de la Révolution française'', 210, 1972, p. 513-536, [https://www.persee.fr/doc/ahrf_0003-4436_1972_num_210_1_4681 https://www.persee.fr/doc/ahrf_0003-4436_1972_num_210_1_4681]<span style="color:navy">.</span>
  
CHAGNIOT (Jean), « Mobilité sociale et armée (vers 1660-vers 1760) », ''XVII<sup>e</sup> siècle'', 122, 1979, p. 34-49.
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CHAGNIOT (Jean), «&nbsp;Mobilité sociale et armée (vers 1660-vers 1760)&nbsp;», ''XVII<sup>e</sup> siècle'', 122, 1979, p. 34-49.
  
 
CORVISIER (André), ''Histoire militaire de la France'', Paris, 1992, 2 tomes.
 
CORVISIER (André), ''Histoire militaire de la France'', Paris, 1992, 2 tomes.
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PARKER (Geoffrey), ''La révolution militaire - La guerre et l’essor de l’Occident 1500-1800'', Paris, 1993.
 
PARKER (Geoffrey), ''La révolution militaire - La guerre et l’essor de l’Occident 1500-1800'', Paris, 1993.
  
BOGROS (Denis), « Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVII<sup>e</sup> siècle », ''Histoire, économie et société'', 15, 1996, p. 105-112.
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BOGROS (Denis), «&nbsp;Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVII<sup>e</sup> siècle&nbsp;», ''Histoire, économie et société'', 15, 1996, p. 105-112.
  
<span style="text-transform:uppercase">Lynn</span> (John), SANCONIE (Maïca), « L’évolution de l’armée du roi, 1659-1672 », ''Histoire, économie et société'', 19/4, 2000, p. 481-495.
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<span style="text-transform:uppercase">Lynn</span> (John), SANCONIE (Maïca), «&nbsp;L’évolution de l’armée du roi, 1659-1672&nbsp;», ''Histoire, économie et société'', 19/4, 2000, p. 481-495.
  
 
CHAGNIOT (Jean), ''Guerre et société à l’époque moderne'', Paris, 2001.
 
CHAGNIOT (Jean), ''Guerre et société à l’époque moderne'', Paris, 2001.
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ROWLANDS (Guy), ''The Dynastic State and the Army under Louis XIV'', Cambridge, 2002.
 
ROWLANDS (Guy), ''The Dynastic State and the Army under Louis XIV'', Cambridge, 2002.
  
HIPPLER (Thomas), « Service militaire et intégration nationale pendant la Révolution française », ''Annales historiques de la Révolution française'', 329, 2002, p. 1-16.
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HIPPLER (Thomas), «&nbsp;Service militaire et intégration nationale pendant la Révolution française&nbsp;», ''Annales historiques de la Révolution française'', 329, 2002, p. 1-16.
  
HUMBERT (R.-P.), « Offizier », ''Handwörterbuch zur deutschen Rechtsgeschichte'', Berlin, 2004, p. 1217-1223.
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HUMBERT (R.-P.), «&nbsp;Offizier&nbsp;», ''Handwörterbuch zur deutschen Rechtsgeschichte'', Berlin, 2004, p. 1217-1223.
  
SONKAJÄRVI (Hanna), « Die Unerwünschten Fremden. Ehemalige Söldner in Strassburg in der zweiten Hälfte des 18. Jahrhunderts », ASCHE (Matthias), HERRMANN (Michael), LUDWIG (Ulrike), SCHINDLING (Anton) (Hg.), ''Krieg, Militar und Migration in der Frühen Neuzeit'', Berlin, 2008.
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SONKAJÄRVI (Hanna), «&nbsp;Die Unerwünschten Fremden. Ehemalige Söldner in Strassburg in der zweiten Hälfte des 18. Jahrhunderts&nbsp;», ASCHE (Matthias), HERRMANN (Michael), LUDWIG (Ulrike), SCHINDLING (Anton) (Hg.), ''Krieg, Militar und Migration in der Frühen Neuzeit'', Berlin, 2008.
  
HENNINGER (Laurent), « La « révolution militaire ». Quelques éléments historiographiques », ''Mots.'' ''Les langages du politique'', 73, 2003, mis en ligne le 09 octobre 2008, consulté le 10 janvier 2022, http://journals.openedition.org/mots/16312.
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HENNINGER (Laurent), «&nbsp;La «&nbsp;révolution militaire&nbsp;». Quelques éléments historiographiques&nbsp;», ''Mots.'' ''Les langages du politique'', 73, 2003, mis en ligne le 09 octobre 2008, consulté le 10 janvier 2022, [http://journals.openedition.org/mots/16312 http://journals.openedition.org/mots/16312].
  
BRUYERE-OSTELLS (Walter) « Le parcours d’officiers issus de la Grande Armée : une redéfinition des cultures politiques dans la première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle ? », ''Histoire, économie et société'', 2008/2 (27<sup>e</sup> année), p. 89-101.
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BRUYERE-OSTELLS (Walter) «&nbsp;Le parcours d’officiers issus de la Grande Armée&nbsp;: une redéfinition des cultures politiques dans la première moitié du XIX<sup>e</sup> siècle ?&nbsp;», ''Histoire, économie et société'', 2008/2 (27<sup>e</sup> année), p. 89-101.
  
 
LYNN (John), ''Les guerres de Louis XIV'', Paris, 2010.
 
LYNN (John), ''Les guerres de Louis XIV'', Paris, 2010.
  
GAINOT (Bernard), « La noblesse militaire, une source d’inspiration des révolutionnaires ? », BOURDIN (Philippe), ''Les noblesses françaises dans l’Europe de la Révolution'', Rennes, 2010, p. 87-99, https://books.openedition.org/pur/129801?lang=fr 2/20.
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GAINOT (Bernard), «&nbsp;La noblesse militaire, une source d’inspiration des révolutionnaires ?&nbsp;», BOURDIN (Philippe), ''Les noblesses françaises dans l’Europe de la Révolution'', Rennes, 2010, p. 87-99, [https://books.openedition.org/pur/129801?lang=fr https://books.openedition.org/pur/129801?lang=fr] 2/20.
  
PARROTT (David), ''The Business of War'',''Cambridge, 2012.
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PARROTT (David), ''The Business of War'',''Cambridge, 2012.''
  
 
LOMBARD (Norbert), ''L’art de la guerre, comment aborder l’histoire militaire de l’Alsace du Moyen Age à la guerre de 1870'' (avec les planches illustrées de J. Vinot), Strasbourg, 2013.
 
LOMBARD (Norbert), ''L’art de la guerre, comment aborder l’histoire militaire de l’Alsace du Moyen Age à la guerre de 1870'' (avec les planches illustrées de J. Vinot), Strasbourg, 2013.
  
CREPIN (Annie), « L’armée de 1789 à 1798 : de la régénération à la réforme, de la révolution à la recréation », ''Inflexions'', 25, 2014, p. 159-168, https://www.cairn.info/revue-inflexions-2014-1-page-159.htm.
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CREPIN (Annie), «&nbsp;L’armée de 1789 à 1798&nbsp;: de la régénération à la réforme, de la révolution à la recréation&nbsp;», ''Inflexions'', 25, 2014, p. 159-168, [https://www.cairn.info/revue-inflexions-2014-1-page-159.htm https://www.cairn.info/revue-inflexions-2014-1-page-159.htm].
  
BLAUFARB (Rafe), « Une révolution dans la Révolution : mérite et naissance dans la pensée et le comportement politiques de la noblesse militaire de province en 1789-1790 », ''Histoire, économie & ''société, 33, 2014, p. 32-51.
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BLAUFARB (Rafe), «&nbsp;Une révolution dans la Révolution&nbsp;: mérite et naissance dans la pensée et le comportement politiques de la noblesse militaire de province en 1789-1790&nbsp;», ''Histoire, économie & ''société, 33, 2014, p. 32-51.
  
 
<span style="letter-spacing:-.2pt">KINTZ (Jean-Pierre), ''La conquête de l’Alsace'', Strasbourg, 2018.</span>
 
<span style="letter-spacing:-.2pt">KINTZ (Jean-Pierre), ''La conquête de l’Alsace'', Strasbourg, 2018.</span>
  
<span style="letter-spacing:-.1pt">DREVILLON (Hervé), WIEVORKA (Olivier), ''Histoire militaire de la France'', t. 1, Paris, 2021 : DERUELLE (Benjamin), « Le temps des expériences. 1450-1650 », p. 151-306 ; DREVILLON (Hervé), « Raison militaire, raison d’Etat. 1660-1789», p. 307-448 ; DREVILLON (Hervé), « Une Révolution militaire. 1789-1795 », p. 449-540 ; GAINOT (Bernard), « Honneurs et Malheurs, héritages et mutations de l’armée napoléonienne (1795-1815) », p. 541-680 ; CREPIN (Annie), « Défendre la France. Aux commencements de l’ère contemporaine », p. 681-789.</span>
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<span style="letter-spacing:-.1pt">DREVILLON (Hervé), WIEVORKA (Olivier), ''Histoire militaire de la France'', t. 1, Paris, 2021&nbsp;: DERUELLE (Benjamin), «&nbsp;Le temps des expériences. 1450-1650&nbsp;», p. 151-306&nbsp;; DREVILLON (Hervé), «&nbsp;Raison militaire, raison d’Etat. 1660-1789», p. 307-448&nbsp;; DREVILLON (Hervé), «&nbsp;Une Révolution militaire. 1789-1795&nbsp;», p. 449-540&nbsp;; GAINOT (Bernard), «&nbsp;Honneurs et Malheurs, héritages et mutations de l’armée napoléonienne (1795-1815)&nbsp;», p. 541-680&nbsp;; CREPIN (Annie), «&nbsp;Défendre la France. Aux commencements de l’ère contemporaine&nbsp;», p. 681-789.</span>
  
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== Notices connexes ==
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<p class="9-Signature" style="text-align: right;">'''François Igersheim'''</p>
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Offizier

Titulaire d’une charge d’office. En français, officier peut désigner le titulaire d’une charge d’office et toutes les sortes d’offices (v. Office).

Offizier, en allemand, désigne exclusivement l’officier militaire. Emprunté au vocabulaire et à la réglementation française, le terme se répand dans d’autres armées et langues européennes. Le mot français « officier »finira par désigner prioritairement l’officier militaire.

Après la guerre de Trente Ans, les réglementations de Louis XIV et de ses secrétaires à la guerre ont inspiré toutes les organisations militaires des États européens et en particulier celles, quelques décennies plus tard, de l’État prussien.

I. La guerre de Trente Ans, le temps des mercenaires

Les hiérarchies fluctuantes des armées de mercenaires

Succédant à celles des armées féodales, le modèle dominant de l’organisation des unités militaires des armées européennes de la fin du Moyen Âge et de la Renaissance est celui de la compagnie de lansquenets des Suisses ou des Allemands (v. Landsknecht) avec son capitaine (Hauptmann ou Fähnlein, v.Fähnlein) et ses Gemeinämter, soit un ou plusieurs « Führer » et ses sous-officiers, les Waibel ou Gemeinwaibel et ses composantes, les escouades (Rotte) commandées par les Rottmeister, élus par les lansquenets (v. Krieg – la guerre au Moyen Âge et à l’époque moderne). Ces unités adoptent pour la guerre la formation des Tercios espagnoles (v. Infanterie), soit les grands carrés de mousquetaires et de hallebardes (Parrott, The Business of War).

Les entrepreneurs de guerre, colonels et capitaines

Les compagnies, recrutées par les capitaines, rassemblées dans des régiments achetés par les colonels, se mettent au service des grands entrepreneurs de guerres, rois, princes, villes… qui en échange promettant aux associés, amortissements de leurs mises de fonds et gros profits par le pillage des territoires (ennemis, neutres et parfois alliés) et les contributions extraordinaires (Parrott, The Business of War).

Une hiérarchie standardisée pour des unités bien coordonnées

Intervenant dans la guerre de Trente Ans contre la Ligue catholique, dans ces campagnes militaires qui balaient le Saint Empire de la Baltique jusqu’au Danube, le roi de Suède Gustave-Adolphe impose un nouveau modèle d’armée, mieux articulée, avec une hiérarchie de grades militaires : général, colonel, major, capitaine, lieutenant. Un des corps de son armée, celui de Bernard de Saxe-Weimar, est embauché par le roi de France, pour le prix d’une principauté – la Haute-Alsace des Habsbourg –, et, pour ses colonels, les nombreux fiefs de cette principauté donnés pour pillage et contribution (Humbert, Offizier, Historische Rechtswörterbuch, p. 1217-1223). La France reprendra ces territoires à partir de la mort de Bernard de Saxe-Weimar, puis les annexe à partir des traités de Westphalie (Kintz, La conquête de l’Alsace).

Notice connexe

Ius supremi domini

II. L’armée de la monarchie absolue

Les armées de Louis XIV

Cette hiérarchie des grades militaires a été reprise par Louis XIV et ses secrétaires d’État à la guerre, les Le Tellier père, fils (Louvois), petit-fils (Barbezieux). Louis XIV, qui souhaite prendre le contrôle des armées, l’étend en 1663 à toutes les armes de son armée : infanterie, artillerie, cavalerie, avec une hiérarchie correspondante pour la marine. Les tarifs de capitation des officiers français de 1701 énumèrent ces grades pour l’infanterie : « les Colonels d’Infanterie, & autres Officiers qui ont rang de Colonels, les Lieutenants-Colonels d’Infanterie, les Majors, les Capitaines, les Aides-Majors, les Lieutenants, Les Enseignes, Les Officiers Reformés». Suivis des sous-officiers et soldats : « les Sergents, les Soldats, les Fifres & Tambours, les Aumôniers, le Chirurgien, le Prevost, le Greffier, les Fourriers, les Archers & Executeur(…) ». Dans certains régiments de cavalerie, le colonel prend l’appellation de « mestre de camp ». La hiérarchie des officiers généraux est arrêtée comme suit : « Lieutenans généraux des armées du Roy, Mareschaux de Camp des armées du Roy, Mareschaux des logis des camps & armées, Brigadiers des armées du Roy, Mareschaux généraux de la Cavalerie ». (Tarif. Capitation des troupes 1713…).

Cette norme est imitée désormais par toutes les armées européennes, un des éléments institutionnels de ce que les historiens appellent « la Révolution militaire de l’époque moderne ». Elle procède de l’œuvre réglementaire accomplie par Louis XIV et ses collaborateurs, ministres, intendants, commissaires des guerres, généraux et officiers dans la réalisation de l’outil militaire français exposée dans les compilations des Codes militaires. Mais avec cette réglementation et le bagage professionnel qu’il impose à un corps d’État, c’est dans les sociétés des grands États européens que se répand le type social de l’officier militaire issu de la noblesse, avec son bagage professionnel, son idéologie, sa culture, et … ses intérêts.

L’armée d’un État entrepreneur de guerre ou celle d’un État avec ses associés : la vénalité des grades et offices

Mais l’armée de Louis XIV n’est pas celle de l’entrepreneur militaire, elle est celle d’un État qui entend contrôler les différents éléments d’une armée, dont il arrête la structure et la composition.

Entre la vénalité des charges civiles (v. Offices) et celles des grades militaires, imposées toutes deux par un pouvoir qui entend associer les élites du pays à l’État en ponctionnant une partie de leurs ressources, il y une différence : la vénalité des grades militaires, qui ne sont pas héréditaires, prolonge, en la contrôlant, la pratique du recrutement des mercenaires, par les capitaines et les colonels. Surtout, elle prolonge les levées des bans et arrière-bans de la période féodale, auxquelles on a renoncé au début du XVIIe siècle, du fait de l’impossibilité de fondre ces contingents dépareillés en unités militaires efficaces.

Mais le commandement des soldats est en principe réservée à la noblesse, dont la vocation est le métier des armes et qui s’exclut des autres carrières par l’interdit de la dérogeance.

Maintenu et légitimé, l’achat des grades militaires et l’accès au commandement des différentes unités dépend cependant de la commission et du brevet, donnés par le roi qui se réserve la nomination exclusive du commandement des grands corps et des grades supérieurs, de maréchaux et généraux soustraits à la vénalité (Chagniot, Guerre et société à l’époque moderne, 2001).

Régiments et compagnies à acheter

Les régiments et les compagnies sont des unités que leurs officiers doivent acheter, avec leur grade de colonel et de capitaine. Les colonels, sortes d’entrepreneurs, lèvent des régiments et, pour ce faire, s’adressent à des capitaines, sortes de sous-traitants (Bogros, « Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVIIe siècle »).

Le tarif des régiments et compagnies est fixé par le roi, mais ce tarif officiel est doublé d’un prix de marché bien plus élevé, et souvent hors de portée des aspirants peu fortunés, qui s’associent pour en permettre le rachat par l’un d’entre eux (le concordat).

L’unité de base est désormais la compagnie. Le gouvernement royal multiplie le nombre de compagnies pour en diviser le prix et place les officiers qui n’ont plus ou pas encore de compagnies ou d’unités dans un corps de réserve d’officiers (les réformés), susceptibles d’être rappelés. Il impose le principe de la promotion au tableau d’avancement, qui associe le choix du pouvoir et l’ancienneté, et crée ainsi une carrière d’officier, à laquelle on se forme tout jeune dans des écoles de cadets.

Le capitaine est un entrepreneur qui amène au roi une compagnie recrutée, à prix d’argent, d’hommes qu’il a habillés, équipés, armés et montés, si la troupe est à cheval. La compagnie et son capitaine possèdent un outillage de transport, de campement, d’écurie, etc. Le capitaine est moralement et pécuniairement responsable envers le ministre qui le paie ; une telle compagnie coûte cher à lever, à entretenir, à compléter. À terme, il peut ou doit, pour limiter ses pertes, vendre sa compagnie à un officier, autre capitaine, capitaine réformé, ou lieutenant, reconnu capable et pourvu d’une commission de capitaine. Le capitaine tué sans avoir revendu sa compagnie a perdu sa vie et son capital (et celui de sa famille). À titre d’exemple, une ordonnance royale fixe le prix d’une compagnie de grenadiers à 40 000 livres, et son capitaine gagne 6 000 livres par an. Le prix est très fort et le capitaine ne peut se refaire qu’en revendant assez vite, la durée moyenne d’un commandement est de quelques années dans l’infanterie, deux ans et demi dans la cavalerie (Rowlands, The Dynastic State and the Army under Louis XIV, p. 252-253).

Quand il constitue sa compagnie, ou quand il doit en compléter l’effectif, le capitaine recrute ses soldats dans sa seigneurie, qui souvent n’est jamais assez étendue pour fournir les 40 hommes (effectif moyen d’une compagnie) dont il a besoin, et donc il compte sur une multitude de recruteurs : aubergistes, marchands, curés, officiers d’autres unités. Il doit l’équiper – uniformes, habits, etc. – et fait appel à une multitude d’intermédiaires et d’artisans. Dans les villes de garnison comme Strasbourg, des centaines d’artisans – tisserands, tailleurs, tanneurs, bottiers – vivent de ces commandes, le gouvernement se chargeant de livrer les mousquets et fusils à partir de 1680 (Rowlands, The Dynastic State and the Army under Louis XIV, p. 207 et ss). De même, les officiers font appel aux maquignons pour leurs chevaux (Ingold, « Les juifs de Haute-Alsace au XVIIe siècle, le grand retour », RA, 2008, p. 107-129). À partir du milieu du XVIIIe siècle, les intendants développent le réseau de l’élevage chevalin, auquel l’Alsace sera si attachée, autour des haras et des chevaux placés de la réserve pour la remonte (Bogros, « Les chevaux de la Cavalerie française à la fin du XVIIe siècle »). Outre les deux importantes garnisons de Strasbourg et Belfort, l’Alsace abrite dix autres places-fortes. En 1704 et jusqu’en 1753, la grande majorité des Strasbourgeois doivent partager leurs logements avec des soldats ou des officiers (v. Garnison).

Le beau XVIIIe siècle de l’Alsace française

La noblesse alsacienne a volontiers servi dans les armées françaises, comme officiers des régiments d’infanterie ou des régiments étrangers, comme en témoignent mémoires et correspondances. L’évocation des familles et des sociétés d’officiers nobles avec leur genre de vie – châteaux, salons, théâtre et opéra, chasses réservées, mais aussi architecture et arts – a figuré parmi les thèmes dominants d’un XVIIIe siècle « français » en Alsace, dans des publications souvent bien postérieures et bien proches d’une littérature de propagande.

Certains princes du Saint Empire tiennent à être colonels de régiments français, avec des lieutenants-colonels alsaciens pour le commandement effectif. Ainsi du Royal-Wurtemberg (Montbéliard), devenu après 100 ans de service le Royal-Allemand de cavalerie, dans lequel sert l’enseigne Antoine-Joseph Zorn de Bulach de 1756 jusqu’à 1778 (ENGEL (Karl), Der Fähnrich Zorn von Bulach vom Regimente Württemberg zu Pferd im Siebenjährigen Kriege 1757-1758 nach seinem Tagebuche, Strasbourg, 1908), où il se retire comme capitaine (réformé, soit sans compagnie) et chevalier de l’Ordre de Saint-Louis. Le régiment est commandé par le colonel propriétaire, le lieutenant-général prince Louis de Wurtemberg, assisté des lieutenants-colonels, le comte de Rosen, petit-fils d’un colonel de Bernard de Saxe-Weimar, et on trouve dans ce régiment plusieurs officiers issus de la noblesse de Haute ou de Basse-Alsace, comme Güntzer, Eptingen, de Gohr, Montjoie-Froherg… Les unités de la garnison de Strasbourg rassemblent près de 600 officiers (Engel, Strassburg als Garnisonsstadt). Les régiments étrangers, dont les noms peuvent changer avec ceux de leurs colonels – Royal Wurtemberg, Royal Allemand, Royal Alsace, Royal Nassau, Royal Saxe, Royal Bavière, Royal Suédois, Anhalt, Hesse-Darmstadt –, ont périodiquement des bataillons en garnison à Strasbourg et leurs colonels propriétaires y résident parfois dans des résidences somptueuses, dont ils dotent Strasbourg, la principale garnison et sa campagne.

Les officiers nobles tiennent à s’assurer que leurs fils pourront à leur tour accéder aux grades et aux commandements. La formation des cadets passe par les écoles régimentaires, comme celle de Royal Alsace Infanterie (v. Alsace Infanterie) ou celles des cadets-gentilshommes de Strasbourg et Neuf-Brisach sous Louvois (v. Cadets-gentilshommes). En 1727, est créée et logée à la citadelle de Strasbourg une école de cadets. Mais le caractère extrêmement turbulent et violent de cette jeune noblesse querelleuse et duelleuse a été relevé par tous les témoins : « La citadelle sert aujourd’hui d’école à plus de cent cadets, qu’on y instruit dans les mathématiques et la science des fortifications. Le tempérament fougueux de la nation, ainsi que l’ardeur juvénile dont les Français ne se démettent que très tard, fait que très souvent ces jeunes gens ont des querelles entre eux et plus encore avec d’autres ; c’est pourquoi ils vivent internés dans la citadelle et on n’en laisse sortir que quelques-uns à la fois. » Elle semble avoir été supprimée en 1733 (v. Cadets-gentilshommes). Une formation plus complète doit être assurée par les douze collèges militaires, dont Brienne, Sorrèze, Strasbourg et l’École militaire de Paris, (v. Artillerie, École d’ -). L’école de Mézières forme les ingénieurs et officiers du génie (v. Génie, Ingénieurs du roi).

Les milices provinciales

Princes, seigneurs et Villes d’Alsace ont nommé les officiers de leurs milices (v. Milices urbaines, Milices provinciales). Les officiers des milices bourgeoises sont nommés par les magistrats, à partir d’un vivier d’anciens officiers ou de cadres des Schutzenvereine. Elles sont supprimées à partir de l’annexion à la France (v. Milices bourgeoises).

À partir de 1692, la monarchie impose la constitution de milices provinciales procédant des levées opérées par les paroisses. Régiments et compagnies des milices ainsi que leurs grades ne sont pas en vente : les officiers sont nommés par les gouverneurs militaires et commandants de province, choisis parmi les officiers de réserve. À partir de 1770, les deux bataillons de milices de Basse et de Haute-Alsace servent avant tout de réserve pour les régiments de l’armée permanente (v. Milices provinciales).

La réaction nobiliaire et la Révolution

À partir de 1750, les édits royaux prévoient l’annoblissement des officiers roturiers dont les pères ont déjà été officiers, mais la mesure est appliquée très chichement. En 1781, la carrière des officiers est réservée à la noblesse et, en 1788, les ordonnances du ministre de la Guerre Ségur prévoient un avancement accéléré pour la haute noblesse, ce qui entraîne les protestations du gros du corps des officiers. « Le noble de cour touchait à peu près cinq fois plus et servait deux fois moins que le noble de province » protestent, en 1789, les officiers de la garnison de Strasbourg (les régiments Royal Alsace, Artillerie, Hesse-Darmstadt, Corps royal du génie Arch. hist. de la Guerre, A. 28) (cité par Louis Hartmann, « Les officiers de l’armée royale à la veille de la Révolution », Revue Historique, 1910.)

Les états généraux de 1789 : les officiers majoritaires dans l’ordre de la noblesse

Dans les assemblées électorales de 1789, en Alsace comme ailleurs dans le Royaume, les officiers d’active ou de réserve représentent le corps professionnel majoritaire dans l’ordre de la noblesse. En Alsace, sur dix députés de la noblesse, cinq sont officiers, colonels ou généraux, ayant servi dans les régiments au fort recrutement d’Alsaciens : Flachslanden (Royal Allemand, puis Nassau, puis Bouillon de 1756 à 1780, commandant d’Alsace en second) ; Rathsamhausen (colonel du régiment Deux-Ponts de 1777 à 1779, en retraite) ; Andlau-Hombourg (colonel Royal Allemand, brigadier 1781) ; Landenberg (régiment de Nassau, en retraite) ; Broglie (officier au régiment de Saintonge, en retraite) (De la Roque, Barthélemy, Catalogue des gentilshommes d’Alsace… et NDBA).

III. La Révolution et l’Empire

La Révolution : les soldats et officiers de l’an II

La Révolution abroge les règlements qui réservaient l’accès aux grades militaires à la noblesse.

Dans la garde nationale, créée en 1789, organisée en 1790, c’est le principe électif qui régit le choix des officiers. Les gardes d’une compagnie, réunis avec les maires au chef-lieu de canton, procèdent à l’élection à la majorité absolue des officiers des compagnies : capitaine, lieutenants, sous-lieutenants. Puis, ils élisent les sergents et caporaux, etc. Les officiers se réunissent alors au chef-lieu de canton et, sous la présidence du capitaine le plus âgé, répartissent les compagnies en bataillons, à raison de cinq compagnies par bataillon (v. Garde nationale).

C’est aussi le principe électif qui est appliqué pour le choix des officiers des unités de volontaires : sont élus des anciens officiers ou sous-officiers.

Émigration et épurations nobiliaires : officiers d’origine populaire

Le nombre d’officiers nommés aux postes vacants se multiplie dans l’armée de ligne, avec l’émigration et l’épuration nobiliaire de 1791 à 1794 et les pertes de la guerre. En Alsace, la plupart des officiers nobles émigrent ou se retirent. Un certain nombre d’entre eux se rallient et poursuivent leurs carrières, d’autres reviennent à l’armée après Thermidor, ou sous le Consulat. Cependant, la majorité des officiers est désormais d’origine populaire. La grande majorité de ces officiers sont d’anciens soldats, ou sous-officiers. Le plus célèbre d’entre eux, Kléber, a même servi dix ans dans l’armée bavaroise et dans l’armée autrichienne, ce qui le désigne au vote de ses compatriotes du bataillon des volontaires du Haut-Rhin (1792). Kellermann, autre général alsacien de la Révolution, était déjà général en 1788 et ne s’était pas retiré, mais il avait échappé à la guillotine avec le 9 Thermidor.

Parmi les 149 généraux, dont Dubois de Crancé demande la nomination à la Convention à la fin de 1793, on relève que tous les Alsaciens nommés sont d’anciens soldats des régiments étrangers. À l’armée du Nord, un divisionnaire, le baron de Schauenbourg, est un ancien du régiment Alsace, en dernier lieu colonel du régiment Nassau (1791). Kléber est divisionnaire à l’armée de Sambre‑et‑Meuse, avec un général de brigade alsacien, Rewbel, issu des milices provinciales. On trouve trois divisionnaires à l’armée de Rhin et Moselle : Scherr, ancien du régiment d’Anhalt, Schaal du régiment de Nassau et Dorsner du régiment de Bavière (prince Max) (Dubois de Crancé, Rapport et tableau des officiers généraux, adjudans généraux et commissaires des guerres…).

L’amalgame des bataillons et celui des officiers

En 1793, une série de lois et décrets arrête les règles de nomination des officiers dans les demi-brigades, amalgamées de trois bataillons, l’un de la ligne, les deux autres de volontaires. On y applique une règle des trois tiers : un tiers à l’ancienneté, un par l’élection (dans une liste de trois officiers du grade inférieur) et un au choix par le commandement.

Mais, au cours des campagnes de la Révolution, les nécessités imposent souvent d’ignorer ces règles et c’est le commandant de l’unité ou le représentant du peuple en mission qui procède aux nominations.

Après Thermidor, réexamen général des recrutements et promotions d’officiers

Après Thermidor, et sous le Directoire, on procède à un examen généralisé du corps des officiers (dont on exige par exemple qu’ils sachent lire et écrire), ainsi qu’à la mise à la retraite d’une bonne partie des insuffisants (Bertaud). Cela peut entraîner des problèmes pour les officiers d’origine alsacienne ou mosellane. En avril 1794, certains officiers, exclus par cette mesure, poussent leurs soldats à la désertion : ils furent fusillés. Il y eut une révolte semblable parmi les Mosellans de l’armée du Rhin : ils savaient lire et écrire l’allemand et pas le français, la justice militaire admit l’erreur et ils eurent la vie sauve (Bertaud, Le recrutement et l’avancement des officiers de la Révolution). Mais l’émigration, la désertion et l’amalgame ont eu raison de la langue allemande, encore utilisée comme langue de commandement dans les régiments allemands jusqu’en 1792.

La loi Jourdan et la conscription universelle (1798)

La loi Jourdan de 1798 institue la conscription universelle. Avec les guerres quasiment ininterrompues (1798-1802 ; 1804-1805 ; 1806-1807 ; 1809-1812 ; 1814-1815), l’armée est devenue une institution centrale et les officiers prennent place dans la société des notables. Mais, reconstituée depuis la Révolution, elle est désormais « le conservatoire du patriotisme républicain » (Gainot, Honneurs et Malheurs, héritages et mutations de l’armée napoléonienne (1795-1815), p. 563). Les officiers occupent la première place dans la société, comme le prévoit le décret du 24 messidor an XII (13 juillet 1804) sur « les honneurs et préséances ». Les officiers militaires ont toujours préséance sur les officiers civils, le général sur le préfet et sur l’évêque. Les traitements des militaires sont toujours supérieurs à ceux des civils à niveau hiérarchique correspondant (Gainot, p. 590).

À partir du Consulat, le choix des officiers de troupe jusqu’à colonel est laissé à la cooptation par les grades supérieurs, sous réserve de confirmation par le commandement. Les nominations de généraux relèvent du commandant en chef, le Premier consul ou l’Empereur.

L’accent est mis sur la formation des futurs officiers. L’école du génie de Mézières (v. Génie), qui avait été supprimée en 1793, est remplacée en 1795 par l’École polytechnique. L’école spéciale militaire, créée en 1802 à Fontainebleau, mais déplacée à Saint-Cyr, parce que les chahuts et disputes des élèves-officiers incommodaient l’Empereur, assure la formation des futurs officiers, qui s’y préparent aussi par la scolarité des classes terminales des lycées. Il est en outre créé des écoles d’instruction militaire dans les camps et garnisons pour s’approprier les connaissances indispensables à l’encadrement des unités.

L’Alsace et l’armée

L’Alsace, toujours aux premières loges des opérations militaires pendant les vingt années de guerre de la Révolution et de l’Empire, qui se terminent par le siège de Strasbourg, est marquée depuis toujours par la présence de l’armée, soldats et officiers, dans ses garnisons ou dans la société de ses petites villes et campagnes.

En 1814 et 1815, des milliers d’officiers sont placés en demi-solde ou mis à la retraite. Le nombre d’officiers démobilisés ou demi-soldes effraie le nouveau pouvoir et les quelques émigrés officiers d’Ancien Régime, ayant servi dans l’armée de Condé ou les armées des princes ennemis, revenus au pays (Leuilliot, La première Restauration, les Cent Jours en Alsace).

La plupart des officiers d’active ou réformés ne remplit pas les conditions pour faire partie du corps électoral censitaire. Mais une partie de la noblesse alsacienne, qui a pu reconstituer ses domaines, s’est souvent ralliée et a servi dans les armées de l’Empire : elle reprend sa place dans le corps politique (v. Noblesse Alsacienne, Révolution et Empire). Cependant, la loi Gouvion-Saint-Cyr maintient le principe essentiel des lois de la Révolution : le lien entre la défense nationale et la citoyenneté.

Pourtant, les quatre mille officiers retraités ou en demi-solde dans les départements d’Alsace sont surveillés de près, car ils sont « travaillés par le jacobinisme, portent leurs anciens uniformes et de grosses moustaches », car on craint leur influence sur les garnisons ou sur la garde nationale (Leuilliot, L’Alsace au début du XIXe siècle, p. 130-140).

Libéralisme et nationalités

Ces hommes et leur milieu, marqués par le Premier Empire, constituent le foyer de la culture libérale et nationaliste de l’Alsace qui s’imposera, après la période de compression de la Sainte-Alliance, dans la décennie entre 1830 et 1840.

Bibliographie

Code militaire, ou Compilation des règlemens et ordonnances de Louis XIV... faites pour les gens de guerre depuis 1651 jusques à présent, par M. le chevalier de Sparre...., Paris, 1707 (Gallica).

Tarif. Capitation des troupes 1713. De l’état des sommes que le Roi veut et ordonne être payées par les officiers généraux et autres des troupes de Sa Majesté et par les soldats, cavaliers et dragons, par les officiers, majors des places, officiers d’artillerie et autres, pour leur capitation, en exécution de la déclaration du 12 mars 1701, http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb33674897n.

L’État de la France, t. IV : Des ordres du roi. Des chevaliers du S. Esprit, de S. Michel, de la Toison d’or & de S. Lazare. Du connétable, des maréchaux de France & autres officiers de guerre. Du grand-maître de l’artillerie. De l’amiral & de la marine. Du général des galeres. Des conseils du roi & gouvernemens des provinces, Paris, 1789.

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Notices connexes

Alsace-Infanterie, Cadets-Gentilshommes, Fähnlein, Garde d’honneur, Garde_nationale, Garnison, Génie, Infanterie, Ingénieurs du roi, Inspecteurs aux armées, Louis (Ordre de Saint Louis, Ordre du mérite militaire), Mercenaires, Milice_bourgeoise, Milice_provinciale_ou_royale

François Igersheim