Choucroute : Différence entre versions
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− | == | + | L’Alsace fait partie de la grande région du Nord de l’Europe où la choucroute a constitué un plat unique (''Eintopf'') combinant les deux modes de conservation de ses composants : par salaison et fermentation du choux et du navet, et par salaison et fumaison du porc. La choucroute se retrouve dans les comptes de l’Œuvre Notre-Dame de Strasbourg de 1432, 1439, 1440, 1459 (neuf cents choux) sous le nom de ''Gumpostkrut''. ''Gumpost'', compost, dérive du latin ''compositum'' et désigne une conserve de choux, dont il existe plusieurs catégories : ''Vorgumpost'', ''Nachgumpost'', ''Rotgumpost''. Pour Nussbaum et Voeglein, il faut distinguer le ''Gumbes'' qui désignerait une choucroute fermentée à partir de choux préalablement cuits, et le ''Sauerkappes'', où le chou reste cru. |
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+ | La préparation de la choucroute coïncide avec la venue de l’hiver. Le jour où l’on sale le chou s’appelle le ''Gumposttag''. Dans son ''Kräuterbuch'', paru en 1551, Jérôme Bock énumère parmi les travaux d’hiver de la ménagère la salaison du chou blanc : « ''Der Cappes ist eingesaltzen'' ». Le ''Sauercappes'', soit le chou aigre, n’est autre que la choucroute. Bock conseille d’en consommer pour guérir les maux d’estomac. Mentionné dans un compte strasbourgeois de 1596, le ''Sauerkraut'' figure dans le livre de cuisine de l’abbé cistercien Bernardin Buchinger de 1671. Pour préparer la choucroute, on ajoute dans le fût avec le chou cru, outre des baies de sureau et de cumin, de la sariette et de l’aneth, des grains de fenouil, du raifort, du persil, du cerfeuil. Buchinger évoque la choucroute aux poissons salés et aux carpes, d’autres documents du XVIII<sup>e</sup> siècle évoquent la choucroute aux harengs. Selon L’Hermine, vers 1682, point de repas correct en Alsace sans choucroute : « Les choux confits durant trois ou quatre mois qu’on fait cuire ensuite avec quelques morceaux de lard jaune constituent un plat fort original. Les Allemands sont si friands de ce gargotage qu’ils ne croient pas avoir été régalés, si les ''Sauerkraut'' y manquent ». L’étranger saisit l’étrange. Servie avec le lard et les pommes de terre, la choucroute ressemble davantage au ''Eintopf'' germanique qu’à la potée française, selon la belle formule de Jean-Michel Boehler. Le conditionnement original est aussi relevé par Benoît Mauge, au début du XVIII<sup>e</sup> siècle : « Après avoir haché les choux, avec une machine, on les met au tonneau, on les assaisonne de sel et de baies de genévriers, de la coriandre, de l’aubépine. On les fait fermenter, ce qui leur donne de l’aigreur ». De Paris, le 24 février 1807, la maréchale Lefèbvre remercie Jean Ulrich Metzger de l’envoi d’un petit tonnelet de ''Sauerkraut'' expédié d’Alsace (AM Rouffach, M1 D35b, f39). Dans l’''Oberrheinisches Kochbuch'' figure encore une recette de choucroute aux harengs frits. | ||
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+ | == Bibliographie == | ||
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+ | WEISBERGER (Henri), « Le mot choucroute », ''RA'', 1927, p. 198. | ||
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+ | JOACHIM (Jules), « Le mot choucroute », ''RA'', 1927, p. 302. | ||
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+ | HATT (Jacques), ''Une ville du XV<sup>ème</sup> siècle : Strasbourg,'' Strasbourg, 1929, p. 264. | ||
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+ | GERARD (Charles), ''L’ancienne Alsace à table'', Strasbourg, réédition 1971, p. 34. | ||
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+ | NUSSBAUM (Julien), « Cuisine », ''EA'', t. 4, 1982, p. 2143-2176. | ||
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+ | HELL-GIROD (Ginette), « Choucroute », ''EA'', t. 3, 1983, p. 1708-1710. | ||
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+ | BOEHLER (Jean-Michel), ''La paysannerie de la plaine d’Alsace (1648-1789)'', 3 vol., Strasbourg, 1994., III, p. 1703. | ||
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+ | == Notice connexe == | ||
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+ | <p class="mw-parser-output" style="text-align: right">'''Claude Muller '''</p> | ||
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Version du 24 septembre 2020 à 10:31
Gumpostkrut, Sauerkraut
L’Alsace fait partie de la grande région du Nord de l’Europe où la choucroute a constitué un plat unique (Eintopf) combinant les deux modes de conservation de ses composants : par salaison et fermentation du choux et du navet, et par salaison et fumaison du porc. La choucroute se retrouve dans les comptes de l’Œuvre Notre-Dame de Strasbourg de 1432, 1439, 1440, 1459 (neuf cents choux) sous le nom de Gumpostkrut. Gumpost, compost, dérive du latin compositum et désigne une conserve de choux, dont il existe plusieurs catégories : Vorgumpost, Nachgumpost, Rotgumpost. Pour Nussbaum et Voeglein, il faut distinguer le Gumbes qui désignerait une choucroute fermentée à partir de choux préalablement cuits, et le Sauerkappes, où le chou reste cru.
La préparation de la choucroute coïncide avec la venue de l’hiver. Le jour où l’on sale le chou s’appelle le Gumposttag. Dans son Kräuterbuch, paru en 1551, Jérôme Bock énumère parmi les travaux d’hiver de la ménagère la salaison du chou blanc : « Der Cappes ist eingesaltzen ». Le Sauercappes, soit le chou aigre, n’est autre que la choucroute. Bock conseille d’en consommer pour guérir les maux d’estomac. Mentionné dans un compte strasbourgeois de 1596, le Sauerkraut figure dans le livre de cuisine de l’abbé cistercien Bernardin Buchinger de 1671. Pour préparer la choucroute, on ajoute dans le fût avec le chou cru, outre des baies de sureau et de cumin, de la sariette et de l’aneth, des grains de fenouil, du raifort, du persil, du cerfeuil. Buchinger évoque la choucroute aux poissons salés et aux carpes, d’autres documents du XVIIIe siècle évoquent la choucroute aux harengs. Selon L’Hermine, vers 1682, point de repas correct en Alsace sans choucroute : « Les choux confits durant trois ou quatre mois qu’on fait cuire ensuite avec quelques morceaux de lard jaune constituent un plat fort original. Les Allemands sont si friands de ce gargotage qu’ils ne croient pas avoir été régalés, si les Sauerkraut y manquent ». L’étranger saisit l’étrange. Servie avec le lard et les pommes de terre, la choucroute ressemble davantage au Eintopf germanique qu’à la potée française, selon la belle formule de Jean-Michel Boehler. Le conditionnement original est aussi relevé par Benoît Mauge, au début du XVIIIe siècle : « Après avoir haché les choux, avec une machine, on les met au tonneau, on les assaisonne de sel et de baies de genévriers, de la coriandre, de l’aubépine. On les fait fermenter, ce qui leur donne de l’aigreur ». De Paris, le 24 février 1807, la maréchale Lefèbvre remercie Jean Ulrich Metzger de l’envoi d’un petit tonnelet de Sauerkraut expédié d’Alsace (AM Rouffach, M1 D35b, f39). Dans l’Oberrheinisches Kochbuch figure encore une recette de choucroute aux harengs frits.
Bibliographie
WEISBERGER (Henri), « Le mot choucroute », RA, 1927, p. 198.
JOACHIM (Jules), « Le mot choucroute », RA, 1927, p. 302.
HATT (Jacques), Une ville du XVème siècle : Strasbourg, Strasbourg, 1929, p. 264.
GERARD (Charles), L’ancienne Alsace à table, Strasbourg, réédition 1971, p. 34.
NUSSBAUM (Julien), « Cuisine », EA, t. 4, 1982, p. 2143-2176.
HELL-GIROD (Ginette), « Choucroute », EA, t. 3, 1983, p. 1708-1710.
BOEHLER (Jean-Michel), La paysannerie de la plaine d’Alsace (1648-1789), 3 vol., Strasbourg, 1994., III, p. 1703.
Notice connexe
Claude Muller