Octroi

De DHIALSACE
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Terme français de droit fiscal. S’applique, à partir de l’annexion à la France, à toutes sortes de droits de circulation des villes alsaciennes, mais principalement à l’Umgeld. Désigne, enfin, le bâtiment de l’octroi ou Stadtzoll.

Lorsque les produits des biens patrimoniaux des villes ne suffisent pas pour l’acquittement de leurs charges, les communes demandaient au roi de les autoriser à percevoir certains droits sur la circulation des marchandises (par péages ou sur la vente par marchands ou particuliers). Ces perceptions doivent être autorisées par le roi, « sans l’autorité et la permission duquel aucune levée de deniers ne peut être faite dans le royaume » (Guyot, Répertoire, t. 43), d’où le nom d’octroi.

Le terme d’octroi, utilisé aux XVIIe et XVIIIe siècles, désigne principalement les droits de circulation ou de péages anciens. L’ancien maire de Strasbourg Hermann, dans ses Notices historiques, statistiques et littéraires (1819), désigne par « Octroi » l’Umgeld ou droit sur les boissons et sur la mouture des grains et « toutes sortes de droits perçus aux portes de la ville close » : grains et farines, vins (entrées et transit), mais aussi le débit des cabaretiers et aubergistes, ventes des cavistes aux particuliers, drèches livrées par les brasseurs aux moulins, exportation de bières par les brasseurs (Umgeld des années 1786, 87 et 88, cf. tableau dans Notices,p. 213).

L’octroi peut être accordé par le pouvoir royal à certaines villes fortes (Huningue, lettre patente de juillet 1684, renouvelée en 1752). Le terme « octroi » y prend le sens de taxe prélevée sur les produits commercialisés : boucheries, cabarets, marchés… (de Boug, I, p. 141 ; II, p. 412). Une « ressource supplémentaire est accordée à certaines communes, dépourvues de banlieue, de pâturage de communaux », comme Neuf-Brisach en 1787 (Hofmann, I, p. 48, 525).

En 1758, un édit royal oblige les villes et faubourgs et les bourgs du Royaume, pour financer les dépenses de la guerre (de Sept Ans, 1756-1763), à s’acquitter d’un don gratuit à l’État et, pour ce faire, autorise les villes et faubourgs et les bourgs du ressort du Conseil souverain d’Alsace à prélever à partir du 1er janvier 1759 un octroi sur les marchandises au tarif fixé par l’édit, soit Strasbourg, Colmar, Sélestat, Haguenau, Landau, Kaysersberg, Wissembourg, Munster, Belfort, Fort-Louis, Delle, Altkirch, Ferrette, Huningue, Thann, Rouffach, Ensisheim, Soultz, Guebwiller, Rhinau, Masevaux, Dambach, Ribeauvillé, Bergheim, Riquewihr, Turckheim, Obernai, Rosheim, Saverne, Wasselonne, Barr, Bouxwiller, Pfaffenhoffen, Engwiller, Neuwiller, Woerth, Hatten, Brumath (de Boug, II, p. 515-516).

En 1763, un nouvel édit reprend la liste et y ajoute des villes : Barr, Benfeld, Blotzheim Châtenois, Guémar, Cernay, Drusenheim, Dannemarie, Erstein, Eguisheim, Epfig, Florimont, Gueberschwihr, Grandvillars, Ingwiller, Ensisheim, Kientzheim, Landau, Molsheim, Mutzig, Marckolsheim, Mittelbergheim, Pfaffenheim, Reichshoffen, Sainte-Marie, Soultz-sous-Forêts, Soultzmatt, Thann, Villé, Wintzenheim. Mais les villes et bourgs sont autorisées à choisir, en lieu de l’imposition d’un octroi, la levée d’un impôt de répartition, ce qui est le cas de la ville de Landau, au surplus autorisée à émettre pour l’acquittement un emprunt au denier vingt (5%) (de Boug, Ordonnances d’Alsace, II, p. 661). Le don gratuit temporaire était devenu perpétuel et était acquitté par abonnement. Nouvelles listes de villes et bourgs astreintes à ce prélèvement en 1768, puis en 1782 et 1783. Mais les villes et bourgs peuvent renoncer à la perception de l’octroi (Hofmann, II, p. 490-495).

 

Villes, bourgs et communautés autorisées à percevoir l’octroi (outre Strasbourg)

Landau Mittelbergheim Sainte-Croix
Wissembourg Benfeldt Soultz
Woerth Rhinau Guebwiller
Fort-Louis Erstein Soultzmatt
Drusenheim Epfig Rouffach
Haguenau Dambach Blotzheim
Bischwiller Villé Huningue
Reichsoffen Sainte-Marie Kientzheim
Soultz-sous-Forêts Ribeauvillé Riensheim
Schlestat Guemar Wintzenheim
Pfaffenhoffen Bergheim Kaysersberg
Ingwiller Marcholsheim Munster
Dettewiller Thann Neuf-Brisach
Bouxwiller Masevaux Ostheim
Brumath Cernay Riquewihr
Saverne Grandvilars Altkirch
Wasselone Giromagny Belfort
Molsheim Delle Dannemarie
Mutzig Florimont Colmar
Rosheim Ferrette Gueberschwihr
Obernai Ensisheim Turckheil
Barr Eguisheim Pfaffenheim

« Etat des sommes à payer annuellement en exécution des articles de l’arrêt du Conseil du 27 mars1782 par les Villes, bourgs et communautés d’Alsace… en sus des droits et octrois dont elles jouissent par l’Edit d’avril 1768 », Arrêt du Conseil d’État, 1783.

 

Les droits d’octroi sont supprimés en 1791. Ils sont rétablis à Paris dès 1797 et à Strasbourg en 1801. En 1807, l’octroi remplace la contribution mobilière. Affecté aux dépenses assurées par les municipalités, l’État en perçoit une partie dans les villes de garnison, finançant la soupe des militaires.

L’octroi est perçu aux portes de l’enceinte fortifiée de la ville. Le bureau ou pavillon d’octroi est un équipement architectural, qui fait partie des type d’édifices publics imposés. Dans Enceintes urbaines en Moyen-Alsace (1200-1850) (thèse, 2015, p. 272-273), Adrien Vuillemin relève l’importance qu’au XVIIIe et au début du XIXe siècle, les villes continuent d’accorder aux enceintes fortifiées pour leurs fonctions « policières et douanières ». Ainsi, en 1812, le maire de Boersch : « Les portes de la ville sont fermées tous les soirs et pendant la nuit pour empêcher l’exercice de la contrebande, pour empêcher l’introduction des biens (…), pour prévenir les fraudes en matière d’octroi municipal (…) et en plus de ne pas faciliter le vagabondage qui sans cela ne trouverait que trop de facilité. » (p. 389). La liste des villes avec corps de garde, octrois ouwachthaus, relevée par Vuillemin, confirme l’importance que les villes accordent à cet équipement urbain : Ammerschwihr (1779), Andlau (1779), Barr (1790), Bergheim (reconstruction), Boersch (maintien 1812), Eguisheim (démolition 1805) Guémar (1772), Kaysersberg (1752), Kientzheim, Marckolsheim (1779, 1789), Marmoutier (démolition 1821), Molsheim (gravure Weiss, 1761), Mutzig (en ruines), Obernai (1780), Ribeauvillé (1778), Saint-Hippolyte (1779), Turckheim (1737), Villé (1779).

À la fin du XVIIIe siècle, le modèle qui s’impose en France est celui du pavillon de Nicolas Ledoux à Paris, de style néo-classique (1787). Il est imité, à Strasbourg, au début du XIXe siècle.

Bibliographie

BOUG (de), Ordonnances d’Alsace, t. I, 1735 ; t. II, 1774.

GUYOT, Répertoire, « Octroi », t. 43.

Arrêt du conseil d’Etat qui fixe les abonnements des villes d’Alsace (Strasbourg exceptée) pour les sous pour livre des droits et octrois appartenant auxdites villes, les droits réservés, et ceux des courtiers-jaugeurs, inspecteurs aux boissons et aux boucheries, Paris, 1783, https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b86204845/f7.

HERMANN (Jean Frédéric), Notices historiques, statistiques et littéraires, Strasbourg, 1819.

GOURLIER, BIET, GRILLON, Choix des édifices publics projetés et construits en France…, 3 vol., 1845-1850, (architectures strasbourgeoises, alsaciennes).

HOFFMANN, L’Alsace au XVIIIe siècle (1906), t. II, p. 490-495, t. III, p. 422-423.

VUILLEMIN (Adrien), Les enceintes urbaines en moyenne Alsace (1200-1850), Thèse, Strasbourg, 2015, p. 87-101.

Notices connexes

Accise, Angal-Ungeld, Ausbürger, Ban, Bannmeile, Douane, Droits_urbains, Étape, Faubourg, Finances des villes, Hausmann, Impositions, Kaufhaus, Lager, Marché, Péage

François Igersheim