Mariage

De DHIALSACE
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Au moment des grandes invasions, lorsque les Germains s’établissent progressivement en Alsace, l’Église chrétienne avait élaboré les grandes lignes de sa doctrine sur le mariage. Elle est en bonne partie inspirée par le droit romain, que résume la formule du jurisconsulte romain Modestin : « Le mariage est l’union du époux et de l’épouse, une communauté de toute une vie, avec la mise en commun de ce qui relève du droit divin et du droit humain ». Soit l’union conjugale de l’homme et de la femme, selon la formule du Code Justinien. Précédé de fiançailles (sponsalia), le mariage (nuptiae) procède du consentement des époux, validé par les pères de famille, dont le père de la mariée, qui pourvoit celle-ci d’une dot, au cours d’une cérémonie publique.

Nombre de notices du Dictionnaire ont traité de questions relatives au mariage, et on se reportera aux notices qui en traitent comme Concubinage-Winckelehe, Coutume, Divorce-Ehescheidung, Donations nuptiales, Ehesteuer, Heimsteuer-Morgengabe, Droit de l’Alsace, Fiançailles-Verlobung.

Sommaire

Le Moyen Âge

Les étapes du mariage germanique

En règle générale, dans les coutumes germaniques, la femme passe de la tutelle (Munt) de son père à celle de son mari. Ce dernier l’achète (Brautkauf) avec un Mahlschatz (gage du fiancé, Mahl, en français arrhes, symboliquement représenté par un anneau). C’est le fait de démarches et d’entretiens et de festivités (Brautlauf) auxquelles participent les parents, la famille, les voisins. Elles donnent lieu à la conclusion d’un contrat oral ou écrit (Eheberedung). Les leges des peuples germaniques, de plus en plus influencés par la législation romaine, adaptent ces coutumes au droit romain et l’Église chrétienne s’efforce d’en faire des rites chrétiens. Pour être conclu, le mariage des leges germaniques comprend deux étapes : la desponsatio (Verlobung) – qu’on distingue mal des sponsalia – précède la traditio puellae (ou Trauung).

Mais les leges admettent la répudiation et le divorce par consentement mutuel et une forme imparfaite de mariage (contubernium, concubinatus) continue d’exister que tolère l’Église.

Docteurs et officialités : le droit canonique du mariage

Avec la Renaissance carolingienne, dont les monastères alsaciens sont des foyers actifs, on assiste à la renaissance du droit et à la diffusion de compilations doctrinales chrétiennes, qui réaffirment les principes de l’indissolubilité du mariage et l’interdiction du divorce. Les démarches de l’Église pour imposer ses vues à des princes rétifs, polygames, divorcés, entretenant de nombreuses concubines, aboutissent à définir toute une série d’empêchements de mariage, consignés dans des recueils canoniques, comme les Fausses Décrétales (v. 850).

L’Église ne parvient pourtant à imposer cette conception du mariage – à la noblesse, aux princes et souverains – qu’à partir du Xe siècle. Progressivement, la nécessité du mariage s’impose aussi aux non-libres, qui constituent la majorité de la population, mais les serfs ne peuvent se marier qu’avec l’autorisation du seigneur et l’Église interdit la séparation d’un couple servile marié (voir : Concubinage-Winckelehe ; Formariage-Ausheirat), mais à partir du XIe siècle, le droit canonique arrête une doctrine fixe.

Le mariage est fondé sur un double lien : celui du consentement des époux, (qui doivent être de condition libre) et celui du père, du moins dans certains décrets. Ces consentements qualifient le matrimonium initiatum ; mais l’union sexuelle accomplie et possiblement féconde (copulatio carnalis) est nécessaire pour que le mariage soit complet (matrimonium perfectum).

Le « sacramentum » est donc composé de deux moments : celui du consentement valable de personnes capables et celui de la copulation. Juristes et docteurs, papes et conciles, évêques et officialités, multiplient les consultations et traités, complètent et codifient la législation canonique et développent une jurisprudence diocésaine qui encadrent un mariage qui se généralise.

Le mariage fait partie des libertés urbaines, comme à Strasbourg (UBS, I), Colmar (Franchises de 1278). À Sélestat, la liberté de mariage, quelle que soit la condition des conjoints, est expressément mentionnée (Stadtrecht 1292, art. 13).

Au Concile de Latran (1215), l’Église élève définitivement le mariage au rang des sacrements, désormais au nombre de sept. Elle ramène les empêchements pour consanguinité à quatre degrés au lieu de sept, et surtout impose aux prêtres l’obligation de réclamer des bans de mariage pour dépister ces empêchements et les bigames.

Le mariage alsacien dans l’aire du droit du Saint Empire, Schwabenspiegel et statuts urbains

Le Schwabenspiegel (Miroir des Souabes), code rédigé vers 1275, soit 50 ans après le Concile de Latran, synthétise et influence en grande partie le droit appliqué dans les villes et les campagnes du sud-ouest de l’Empire et de l’Alsace (voir : Droit de l’Alsace au Moyen Âge).

Les auteurs de ce Code – les Franciscains du couvent d’Augsbourg – connaissent le droit romain, dont ils suivent à plusieurs reprises la leçon, et le droit canonique (Décret de Gratien et ses sources), mais aussi les coutumes, dont ils codifient les dispositions et les statuts urbains qui s’en inspirent.

Pour le Schwabenspiegel, le mariage est l’un des sept sacrements, l’un des plus importants que Dieu a créés (Landrecht art. 3). Dès l’article 4, la métaphore de la tête (mari et femme) et des membres (enfants, leurs conjoints et enfants etc.) décrit la famille (Sippe) que les conjoints ont fondée et met en place la ligne successorale et les empêchements de parenté entraînant nullité. Le mariage est jugé par le juge ecclésiastique, qui peut en établir la validité et donc la légitimité des enfants (Landrecht art. 377). Mais ses conséquences patrimoniales ou ses violations – adultère, abandon de domicile conjugal ou désertion – relèvent de la compétence du juge séculier.

Le mariage procède du consentement des époux et des parents. Mais il est valide dès la consommation (copulatio) par des époux âgés de 14 ans et des épouses âgées de 12 ans (Landrecht art. 53).

Le mariage se déroule devant témoins. Ce sont eux qui seront garants du mariage en cas de contestation. L’article 319 du code cite décrit la formule de mariage prononcée par la femme : « Herr, ich bin frei von allen meinen Vorfahren her, seid ihr mein Standesgenossen, nehme ich euch gern » ; à cette promesse, le conjoint répond par une formule analogue. Les conjoints doivent tous deux être libres.

La serve qui se marie avec un libre peut être émancipée et ses enfants seront libres. Mais la femme libre qui se marie avec un serf perd sa liberté et ses enfants seront serfs (Landrecht art. 67-68). Rapt, viol, différences de statut, tromperie sur le statut, entraînent dissolution ou divorce et des pénalités très lourdes, voire la mort.

Le régime matrimonial aux XIIIe et XIVe siècles

La dot avait été le critère déterminant du mariage en droit romain, qui le distinguait du concubinage. Dans les leges germaniques, le mot dot désigne le Munt que verse l’époux à la famille de l’épouse, pour prix du passage de celle-ci dans sa propre famille. Il ne fallait pas le confondre avec la Morgengabe, que l’époux verse à l’épouse au lendemain du mariage consommé. La Morgengabe traduit en droit français par « don matutinal » est la donation que fait le mari au lendemain des noces désormais consacrées par la copula carnalis (Landesrecht art. 25). La Morgengabe est un bien réservé à la veuve en cas de prédécès du mari, d’où sa confusion avec le Widthuum, terme absent du Schwabenspiegel.

Le régime matrimonial commun du Schwabenspiegel est celui de la communauté réduite aux acquêts. En l’absence de testament, et de dissolution du mariage par décès, la veuve reprend ses apports, en particulier son trousseau (Heimsteuer), sa Morgengabe et la moitié des biens mobiliers, qu’elle partage avec ses enfants. Elle passe, si elle l’accepte, sous la tutelle de son fils aîné (Landrecht art. 27). Cette législation est celle d’une partie des dispositions matrimoniales coutumières d’Alsace, en particulier, celles dites « de la plaine » (voir : Coutume, Donations nuptiales).

Le régime du nord de l’Alsace est illustré par les dispositions du VIe statut de Strasbourg de 1322. Le régime matrimonial commun est également celui de la communauté aux acquêts. En cas de prédécès d’un des conjoints, ces derniers sont partagés entre le conjoint survivant et les enfants. Si c’est la mère qui décède, père et enfants hériteront du tiers de la masse – immeubles et meubles – des acquêts, le père conservant les deux-tiers. Et si c’est le père, la mère et les enfants se partageront les deux tiers de la masse, la mère en conserve un tiers (art. 310-311). Mais le statut strasbourgeois introduit une exception analogue à celle relevée par le Schwabenspiegel : « En cas de prédécès du père, la veuve prendra prioritairement le trousseau qui lui appartient et les bijoux jusqu’à concurrence de 5 livres strasbourgeoises et pas plus ». Et le mari prendra ce qui lui appartient, vêtements, armes, outils, jusqu’à concurrence de 5 livres. Il s’agit là de l’application de la distinction entre Schwerttheil (part de l’épée paternelle) et Spindeltheil (part du rouet).

Le rituel religieux commun avant la Réforme : le mariage en 1490

Dans les provinces ecclésiastiques du sud-ouest du Saint Empire, le mariage continue d’être une cérémonie civile et familiale, qui peuvent d’ailleurs donner lieu à une bénédiction par le prêtre. Les bans de mariage doivent être proclamés au cours de la messe, mais leur absence n’entraîne pas la nullité d’un mariage que l’on dit « contractae per seipsos ».

L’Agenda parochialum ecclesiarum Argentinensis diocesis de 1490, promulgué avant la Réforme protestante strasbourgeoise de 1530 et avant le Concile de Trente marque une étape importante dans l’évolution du mariage.

Les fiançailles religieuses, cérémonie qui accompagne la proclamation des bans et ouvre la période qui doit s’achever par la bénédiction nuptiale, apparaissent dans les rituels au courant du XVIe siècle. On n’en retrouve pas trace dans l’Agende de Strasbourg de 1490 (Agenda parochialum ecclesiarum Argentinensis diocesis 1490, Levresse P-R AEA 1980, 121-125). L’Agende prévoit cependant une interrogation discrète, pendant la confession, sur d’éventuels empêchements de mariage, en particulier auprès de ceux qui seraient déjà mariés (seipsos contraherint) et qui souhaitaient « régulariser ».

Le mariage proprement dit (Solemnisatio Matrimonii) a lieu devant le parvis de l’église. Il s’articule en plusieurs moments. Le premier est celui de l’examen et de la donation réciproque avec jonction des mains, – qui est le cœur du sacrement – puis de la remise de l’anneau, qui sont suivis de la messe de mariage qui se clôt par la bénédiction des mariés.

Le prêtre s’adresse aux fiancés dans leur langue maternelle (lingua materna) : Ir wellen ingon den stat der heiligen ee. Und begeren das die bestetiget werde in angesicht der heiligen kyrchen? Responsio: wir begerens.

Le prêtre s’adresse à l’assistance qu’il interroge : « Si quelqu’un connait un empêchement à la célébration de cette cérémonie, qu’il le dise ». Puis le prêtre joint les mains des conjoints. Mais c’est le mari qui s’adresse à sa femme : ich nim dich N. zu miner eefrowen. Et celle-ci répond : Und ich nim dich N. zu minem eeman.

Puis a lieu la remise de l’anneau (suburratio annuli). Il n’est pas fait mention de bénédiction de l’anneau et il semble bien n’en avoir qu’un. En conclusion, le prêtre prononce : Matrimonium, per vos contractum, ego confirmo in nomine patris et filii et spiritus sancti. Amen. Ce sont bien les mariés qui se sont donnés le sacrement que le curé se contente de « confirmer ».

Puis a lieu, dans l’église, la messe de mariage (missa super sponsum et sponsam), dont les textes figurent dans les missels. Dans le Missale Argentinense de 1486 (BSB, Ink M 413, contemporain de l’Agende), le prêtre a le choix entre deux évangiles, celui de Matthieu sur l’indissolubilité du mariage, –  ais le texte s’arrête avant l’incise sur le cas d’adultère – et celui sur les noces de Cana, qui est le seul proposé dans le Missale Basiliense de 1483 (BSB Ink M. 420). Dans le Missale Argentinense de 1520 (GB), le seul évangile proposé est celui de Matthieu.

Comme dans les diocèses germaniques, la bénédiction nuptiale a lieu après la messe. Les époux viennent s’agenouiller devant l’autel et le prêtre procède la bénédiction sur les mariés. Il n’y a pas de bénédiction nuptiale pour les secondes noces précise l’Agenda et les Missels strasbourgeois et bâlois. À partir de la fin du XVe siècle, le mariage religieux se généralise.

La fin du Moyen Âge et l’Époque moderne

La crise du mariage

Strasbourg et l’Alsace prennent part aux grands débats qui agitent le monde européen et germanique des XVe et XVIe siècle et qui vont déboucher dans la Réforme.

La Ville a cosigné nombre de Gravamina (plaintes) présentées aux Diètes d’Empire sur la crise de la chrétienté. Parmi elles, le mécontentement devant le relâchement des mœurs, contre lequel il faut réagir. En 1524, à la Diète d’Ulm, Strasbourg présente douze articles à débattre devant un concile national. Parmi eux, le mariage des clercs, l’abolition des ordres religieux et le caractère sacramentel du mariage.

Ce que l’on remet en cause, dans le droit du mariage, c’est le droit canonique et la juridiction des officialités. Familles et Magistrat s’insurgent contre les mariages « privés » ou « clandestins », contractés sans leur accord mais reconnus valides dès qu’il est consommé, et exigent un contrôle plus important. L’évêque de Strasbourg, dans son Agende de 1480, insiste sur la nécessité de la publicité du mariage, avec la publication des bans et le consentement prononcé devant le prêtre (Trauung), sans être fort bien écouté.

La première ordonnance matrimoniale de Strasbourg de 1530 le souligne expressément, en interdisant le mariage « alleynig zwischen inen selbst » des jeunes gens de moins 25  ans et des jeunes filles de moins de 20 ans, sans l’autorisation des parents et familles qui les plongent dans la discorde et la haine en cas de dissolution par prédécès. À la fin du siècle, le statut de Sélestat relatif aux « Eheberednungen » évoquent cette ancienne et mauvaise habitude de se marier civilement avec parents et amis, mais de ne pas confirmer, sans qu’on sache, en cas de prédécès comment opérer successions ou usufruits. Statuts urbains, ordonnances matrimoniales, études de démographie historique ont souligné l’importance du remariage religieux des veufs ou veuves, quand elles/ils se remarient officiellement : entre 25 à 30% des mariages.

Mais les doctrines elles-mêmes sont remises en cause. Erasme, en particulier, conteste la doctrine canonique du mariage, mettant en relief les hésitations des théologiens antérieurs sur son caractère « sacramentel », dispensateur de grâces. Les théologiens de la Réforme adopteront tous une définition étroite du sacrement. Luther emprunte nombre de ses arguments à Erasme. Le caractère « sacramentel » du mariage n’a pas de fondement dans l’Écriture. La séparation de corps prévue par le droit canonique contraint au célibat, ce que ne recommande pas l’Écriture, qui admet le divorce pour adultère. Enfin, le mariage est d’abord chose civile (Weltlich Ding), et il doit être réglementé par les autorités civiles, ne serait-ce que pour éviter les « mariages clandestins ». Ce point de vue est généralement celui des Réformateurs, qui renvoient au droit romain et au Code Justinien.

La Réforme en Alsace

Strasbourg

De 1521 à 1523, sous l’impulsion d’une partie de son clergé, l’opinion strasbourgeoise est gagnée à la Réforme : le mariage des clercs, la sécularisation des couvents, la municipalisation du droit et de la juridiction du mariage. Il est d’abord pris en charge par le groupe des curés devenus pasteurs, et dès 1524, le groupe des pasteurs les plus influents de la ville prononcent le premier divorce. En 1529, le Magistrat décide la suppression de la messe et confirme ainsi le ralliement définitif de la ville à la Réforme.

Suivant l’exemple de Zurich datant de 1524, et tout comme Bâle, Strasbourg institue un tribunal matrimonial, composé de juges compétents, désignés par les Conseils de la Ville, pour toutes les affaires matrimoniales (Ehegericht).

En 1530, le Magistrat promulgue une ordonnance sur le droit matrimonial (Eheordnung). Elle insiste sur l’importance religieuse du mariage : le mariage a été institué par Dieu tout puissant, Notre Seigneur, et confirmé par Jésus-Christ, notre sauveur, il convient cependant, dans les affaires pratiques de mariage, de demeurer dans la crainte de Dieu. En 1534, les pasteurs font adopter une ordonnance ecclésiastique (Kirchenordnung) qui comprend un passage sur le cérémonial du mariage : il devient un moment capital dans l’évolution du mariage protestant, en particulier pour déceler les empêchements, éviter les « mariages clandestins », tous les cas qui peuvent être cités devant l’Ehegericht. Une ordonnance de 1560, publiée en 1565, précise les empêchements pour consanguinité. L’ordonnance générale de 1598 codifie l’ensemble de ces règlements particuliers.

Les villes ralliées à la Réforme protestante

Ralliée à la Réforme, Colmar connut de 1581 à 1628 un tribunal matrimonial qui appliquait une ordonnance matrimoniale proche de celle de Strasbourg. Après le rattachement à la France, les affaires matrimoniales, y compris les divorces, relèvent du Consistoire de Colmar (Véron-Réville). Quant à Mulhouse, la ville applique et suit l’ordonnance de Bâle (1534), fort proche de celle de Strasbourg.

Principautés et seigneuries protestantes

Le comté du Hanau-Lichtenberg, celui de Horbourg-Wihr et la seigneurie de Riquewihr appliquèrent les ordonnances matrimoniales du Wurtemberg de 1537 et de 1553. Elles prévoyaient la possibilité d’un divorce pour cause d’adultère, qui entraînait la sanction du coupable, ou pour l’abandon du domicile conjugal (désertion). Le texte wurtembergeois de 1553 aborde la question de l’incompatibilité d’humeur ou de difficultés de cohabitation, mais il ne prévoit qu’une conciliation devant le juge, lui laissant en cas d’échec, la possibilité de dissoudre le mariage. Ce cas est également prévu par l’ordonnance matrimoniale de l’Électeur palatin de 1554, appliquée également à Landau et à Deux-Ponts. L’interdiction faite en 1690 aux juges strasbourgeois de prononcer des divorces vaut pour tous les sujets protestants alsaciens du roi, selon un arrêt du Conseil souverain de 1716, annulant un divorce prononcé par le consistoire de Landau, ville entrée en 1511 dans la Ligue des villes alsaciennes et soumise en tant que telle au roi de France par le traité de Munster de 1648. Cet arrêt, il est vrai, n’est pas toujours respecté par les consistoires, car à l’exception de celui de Strasbourg, bien surveillé, les consistoires prononcent encore quelques divorces après cette date (Pagny-Ber).

La Contre-Réforme catholique : le Concile de Trente

En 1563, le Concile de Trente adopte le Décret Tametsi sur le sacrement de mariage. Il réaffirme la pleine compétence de l’Église sur la législation et la réglementation et le jugement du mariage chrétien : indissolubilité, empêchements. Le mariage procède du consentement des mariés qui se prennent en mariage, mais il doit être public – devant un prêtre et trois témoins – et être précédé de bans. La séparation peut être prononcée pour adultère, désertion et absence définitive, mais sans possibilité de remariage. La réception des décrets conciliaires par les États entraînait pour eux l’obligation de les appliquer dans leurs législations. Ce fut le cas de l’empereur Ferdinand II, mais elle ne pouvait pas avoir d’effets pour l’ensemble de l’Empire, divisé entre protestants et catholiques. La Ville de Strasbourg s’oppose à la publication du concile, pour la ville et pour ses bailliages ruraux (1586). La France de Henri III refusa de publier tels quels les décrets du concile, mais les reprend en promulguant l’édit de Blois de 1579. L’assemblée générale du clergé de France les inscrit en 1615.

Les instances juridictionnelles : officialités, Ehegerichte

Les contraventions au mariage

Le contentieux du mariage n’est pas le principal objet des officialités catholiques, tribunaux ecclésiastiques. L’officialité de Strasbourg n’a été saisie que de 1036 mariages de 1685 à 1788, alors que l’on contracte de 400 à 450 mariages par an à Strasbourg au XVIIIe siècle, où depuis 1740, la population catholique a dépassé la population luthérienne et représente la moitié des plaintes, principalement pour fiançailles (Eheberednungen) non tenues. Les crimes et délits matrimoniaux (adultères, violences) ne sont jugés que pour leurs conséquences : séparation de corps, indemnisations, et il appartient aux juges séculiers de poursuivre, en vertu des législations civiles : statuts, coutumes rédigées, ordonnances, devant les tribunaux civils.

Les codes pénaux comprennent plusieurs articles sur la répression de l’adultère (voir : Caroline).

La coutume de Ferrette prévoit la prison pour les coupables d’adultère et le bannissement pour la troisième récidive. Le refus de cohabitation entraîne un bannissement de six mois.

Les Ehegerichte des villes protestantes sont à proprement parler des juridictions municipales qui sont saisies à la fois des contraventions matrimoniales (adultères, abandon de domicile conjugal, absences) et de leurs répercussions pénales et patrimoniales.

Le mariage sacrement et les mariages mixtes

Mais l’Agende de l’évêque Jean de Manderscheid en publie la doctrine en 1590 dans son Agenda Ecclesiae Argentinensis. Le chapitre « Matrimonium » s’ouvre sur les formules de Saint Thomas d’Aquin : le donation mutuelle que l’homme et la femme se font de leurs corps est la matière et leur consentement exprimé dans la cérémonie la forme du sacrement. Il développe alors les instructions données par le Concile de Trente et conclut que l’interdiction du mariage du fait de la différence de cultes ou de religions ne concerne que baptisés et non baptisés. Le mariage avec un baptisé, hérétique, apostat, excommunié, n’entraîne pas la nullité du mariage, mais des sanctions extrêmement lourdes.

La frontière matrimoniale

Réforme protestante et Contre-Réforme catholique entraînent une série de fractures en Alsace, comme dans une grande partie de l’Europe. Parmi elles, peut-être pas la plus importante du moins dans les campagnes, étant donné la faible taille des aires matrimoniales et l’application du principe cujus regio, eius religio, l’interdiction des mariages mixtes, sauf à se convertir à l’une ou l’autre des confessions, que prononcent les Eheordnungen, et les Agende des évêques. Un édit royal lève l’interdit en 1774, mais les mariages mixtes sont très minoritaires (19 mariages catholiques-protestants à Saint-Laurent de Strasbourg (J.-G. Guth), alors qu’il y avait eu 93 mariages en 1768-1769 (Dreyer-Roos).

Le mariage civil et les sponsalia ; Ehetage et Eheberednungen

Bien marquée dans le droit coutumier, puis dans les statuts urbains et les coutumes rédigées, il y a bien deux cérémonies de mariage – l’une civile, familiale qui donne lieu à un contrat à enregistrer dans les chancelleries des villes et des bailliages ou chez les notaires – et l’autre religieuse. Et ce Brautlauf dont les formalités peuvent s’étendre dans le temps n’est pas révocable et la vie commune des conjoints commence souvent dès ce moment-là. Le cas de mariage « seipsos contractae » ou « alleynig zwischen inen selbst » sont assez nombreux pour que l’on s’en plaigne.

L’évolution qui intervient au XVIe siècle est de provoquer puis de généraliser la confessionnalisation de la cérémonie civile. De plus, il semble bien que pour le remariage de veuves ou de veufs, qui représente un quart ou un tiers des mariages, on se contente de la cohabitation notoire, avec contrat civil.

La coutume de Ferrette, codifiée à la fin du XVIe siècle, reprend des dispositions plus anciennes répandues dans le sud du Saint Empire et les cantons suisses (de Berne à Bâle). L’Ehetag (assemblée de mariage) réunit les pères ou les tuteurs des conjoints, avec des témoins, qui délibèrent et passent contrat. Le mariage a lieu ensuite dans un délai variable (Bonvalot, Coutumes de Ferrette, art. 21, p. 237).

Institution analogue dans les statuts de Sélestat (Sélestat 1555, Stadtrechte p. 393) (voir : Fiançailles). C’est au cours de cet Ehetag que veuves ou veufs procèdent à l’adoption des enfants du lit précédent ou Einkindschaft. Le statut de Sélestat exige, pour éviter les disputes, que la Eheberedung soit rédigée par écrit et enregistrée au greffe (Canzlei) de la ville dans un délai de trois mois.

Après l’Ehetag, on s’est souvent considéré comme mariés : les statuts de Colmar de 1592, traduits et commentés par Chauffour, syndic du barreau de la Cour souveraine au XVIIIe siècle en témoignent : « Nous voulons qu’on ne comprenne sous ce nom de gens mariés que les personnes libres qui auront célébré leurs fiançailles et qui auront reçu la bénédiction sacerdotale à l’église, ou les veuves qui après les fiançailles auront cohabité avec leurs maris, quoique la bénédiction nuptiale à l’église ne soit pas encore intervenue. Nous nous réservons cependant de condamner à l’amende ceux qui contre l’honnêteté publique se seront connus charnellement avant la bénédiction nuptiale en face de l’église. » (Titre 25, art. Ce qu’on entend par gens mariés). Et Chauffour de commenter : « Il paraît que le Kirchgang ou cérémonie de recevoir la bénédiction nuptiale devant le propre curé… n’influe pas sur l’état du mariage, puisque l’on regarde comme mari et femme la veuve qui, après les fiançailles (qui ne constituent qu’une simple promesse de mariage faite partout où on veut en présence de qui on veut) aura couché avec son mari sans avoir célébré son mariage à l’église, ce qui est contraire aux décisions du Concile de Trente. »

Les régimes matrimoniaux alsaciens

Le syndic des avocats de Colmar auprès du Conseil souverain, commentait, en 1789, le Statut colmarien de 1593, publié par le président Corberon, dans son Recueil d’arrêts notables t. 3, 1744.

Dans son commentaire, Chauffour procède à la présentation des trois régimes matrimoniaux alsaciens. « Dans toute la province, il y a entre les conjoints communauté universelle de biens dont le mari à l’administration comme chef de la communauté. Elle se partage bien différemment. Suivant la coutume de Ferrette qui s’observe dans tout le plat pays toute la masse des biens existants de l’un d’eux soit apportés, hérités ou acquis de telle part qu’ils viennent sont partagés des deux tiers au tiers entre le survivant des conjoints et les héritiers du prédécédé de manière que le mari et ses héritiers en prennent les deux tiers et la femme et les siens un tiers. »

Dans la montagne, chacun des conjoints ou ses héritiers reprennent leurs apports et les acquêts et conquêts se partagent suivant les coutumes locales des deux tiers au tiers ou par moitié et, en quantité d’endroits, le fils cadet ou la fille cadette à défaut de mâle a préférence pour la maison paternelle ou la meilleure des maisons si il y en a plusieurs sur le pied de l’estimation.

Dans les villes ci-devant impériales dans lesquelles la dévolution a lieu le partage se fait par meubles et immeubles de toute la masse. Tous les meubles sans exception appartiennent en libre propriété au survivant et il reste propriétaire des immeubles mais sans faculté de les aliéner, que ce soit dans le cas de la nécessité absolue pour sa sustentation et sans pouvoir en disposer.

C’était là fortement résumer les régimes matrimoniaux alsaciens en vigueur jusqu’au Code Napoléon et leur géographie. Avec partage successoral, dans la majorité des cas, aux deux tiers pour le mari et un tiers pour la femme : communauté universelle majoritaire de la coutume de Ferrette, communauté réduite aux acquêts dans « la montagne » (ainsi qu’à Strasbourg) et communauté universelle avec dévolution des immeubles pour les villes ci-devant impériales (dites de la Décapole). Le Conseil souverain n’aime pas la Dévolution parce qu’elle immobilise les immeubles pour les enfants du premier lit « parce que quel qu’opulent que puisse avoir été leur père ou mère prédécédé, ils n’ont rien de sa succession jusqu’à après la mort du survivant qui n’arrive communément que quand ils n’ont plus de dents. »

Le contrat de mariage et donations nuptiales

Mais il est une institution qui est fort précieuse, c’est celle de la Morgengabe négociée dans le contrat de fiançailles avant le mariage : elle permet de tourner à la fois les duretés du régime commun et celle des immobilisations de la dévolution. De plus, les biens consignés dans la Morgengabe ne sont pas aliénables sans le consentement de la femme. Enfin, la grande liberté laissée aux mariés alsaciens de passer contrat ou d’en changer à tout moment permet d’atténuer les inconvénients des régimes communs.

On se reportera aux articles Coutume, Donations nuptiales, Droit de l’Alsace, Femme (droit de la femme et veuve) pour compléments et précisions.

Une pratique généralisée : les contrats de mariage

La Morgengabe ne disparaît pas, symbolique de l’attachement au droit local. C’est à elle que l’on reconnait les contrats de mariage alsaciens, dans l’ensemble des contrats de Société françaises (contrat de la Société Amélie de Dietrich). Il semble bien y avoir eu un tarif pour ces donations. Trousseau pour la femme, outillage pour le mari, sont réunis sous le terme « Heimsteuer » négocié avant le mariage. Les mariés venus de « vieille France » adoptent également la coutume strasbourgeoise de la Morgengabe, mais sont bien plus nombreux à préférer la communauté universelle à la coutume strasbourgeoise de la communauté réduite aux acquêts, qu’abandonnent également nombre de mariés strasbourgeois.

À Sélestat au XVIIIe siècle, on relève le recours à la coutume du don d’une Morgengabe de la veuve à son second mari pour le dédommager de la charge des enfants du premier lit, dont il a désormais aussi la charge.

Procédures et rites religieux

Les rites religieux catholiques

L’Agenda de l’évêque Jean de Manderscheid de 1590, publié soixante ans après le passage de Strasbourg à la Réforme, introduit la célébration des fiançailles dans les rites du mariage, par un chapitre « Modus celebrandi Sponsalia » (imprimé à Cologne).

Le mariage en 1590 : les fiançailles pour passer à l’église

Il suit la leçon des Agende de Mayence (1551) et de Trèves (1574-1576). [Levresse, Rituels incunables, 93-94]. Officialisant très vraisemblablement la pratique déjà en cours, l’Agenda conseille au curé d’être présent « lors de la fête de famille et d’amis. Il y prononcera en langue maternelle la prière suivante : Seigneur, ces deux N et N en toute amitié ont décidé après mûre réflexion et de bons conseils de se marier dans les 40 jours (ou un délai raisonnable) et de se rendre à l’église pour se marier selon les rites chrétiens ». Le prêtre s’enquiert de leur situation vis-à-vis de l’Église, des empêchements de mariage et s’assure que les futurs mariés ne sont pas déjà mariés. Il leur rappelle qu’ils s’engagent devant tous leurs amis à se marier dans les 40 jours. Puis, il confirme cette promesse et la bénit. Et il conclut en recommandant aux futurs de se confesser et de communier et de s’abstenir de consommer le mariage avant le passage à l’église pour la messe de mariage.

Le mariage à l’église : importance du rite de l’anneau nuptial

Quarante jours plus tard a lieu le mariage : desponsatio puis missa super sponsum et sponsam. Le cérémonial introductif a encore lieu sur le parvis. Sous l’influence probablement du rituel protestant, l’exhortation en langue maternelle allemande aux futurs époux a pris une grande importance. Puis le prêtre procède à la bénédiction de l’anneau ou de la monnaie que lui remettent les futurs. Le prêtre demande ensuite s’ils sont libres de tout engagement matrimonial antérieur ou de tout autre empêchement. Puis il demande : Ich frage dich auch, N, anstatt des allmechtigen Gottes ist es nun dein freyer und ungetrungenr will un wollbedachte meinung, diese N gegenwertig nach Gottes ordnung und auffsetzung als Ehelichs Weib und Ehegmahel anzunemmen? Ja. Puis il pose la même question à la femme. Il s’adresse alors spécialement au conjoint qu’il admoneste : Gedenkstu auch hier gegenwaertig treulich fûrzustehn als Adam seiner Eva und sie zu lieben als dein eigen fleisch nach des Apostels wort und ihr zu verschonen als einem schwachen zeug wie St Petrus schreibt? Ja. Puis l’époux prend l’anneau (ou la monnaie) de la main du prêtre et la passe à l’annulaire de l’épouse, en déclarant « mit diesem Ring (oder Gottesheller, oder Gottespfenning) vertrawe ich und vermahle ich dir mir. Im namen Gottes des Vaters, des Sons und des Heiligen Geistes ». Puis le prêtre leur joint les mains et leur enjoint de prononcer, l’un après l’autre :Ich nehme dich zu mein ehelichen Weib/Mann. Enfin, il entoure les mains des deux époux de son étole et prononce la formule « Ideo matrimonium per vos contractum confirmo, ratifico et benedico… In nomine etc. » Il les introduit alors dans l’église où aura lieu la messe. À la fin de la messe, il procède à la bénédiction nuptiale, benedictio super nubentes, qui se termine par la lecture d’un évangile. Il est bien précisé qu’il n’y aura pas de bénédiction pour les secondes noces, mais une simple prière, precatio in nuptiis bigamoruam.

Le Rituel de Bâle de 1595 adopte le même ordre pour les rites de l’anneau, mais précise encore « s’il y a un anneau ». Le Rituel de Strasbourg aurait inspiré celui de Metz de 1605, sous l’impulsion du Cardinal de Lorraine, évêque de Metz (1578 à 1607) et Strasbourg (1604-1607). Le Rituel Romain (1592) place le rite de l’anneau après la confirmation du mariage.

Le mariage en 1670

En 1670, l’Agenda Ecclesiae Argentinensis, de l’évêque François-Egon de Furstenberg, imprimé à Molsheim (Agenda ecclesiae Argentinensis, BSB), déclare s’inspirer des saints canons du Concile de Trente. Il indique que les fiançailles ne sont pas « canoniques » mais reconnait que quand la coutume est établie, il ne sera pas facile de les négliger. Le prêtre sera donc présent aux fêtes de famille et d’amis, et confirmera les promesses de fiançailles.

Le mariage proprement dit commence par la desponsatio. Elle a lieu devant l’église, ou si le temps ne le permet pas, dans l’église. L’anneau est béni tout de suite après l’exhortation. Le français apparaît pour l’examen et les répons bien maladroit. Puis il demande : Ich frage dich auch, N, anstatt des allmechtigen Gottes ist es nun dein freyer und ungetrungenr will un wollbedachte meinung, diese N gegenwertig nach Gottes ordnung und auffsetzung als Ehelichs Weib und Ehegmahel anzunemmen? Réponse : Ja! Puis il pose la même question à la femme. Puis le prêtre remet l’anneau béni à l’époux qui le passe à l’annulaire de l’épouse en disant «  Mit diesem Ring vermähle ich mich dich im Namen Gottes Vaters, des Sohns und des Heiligen Geistes / avec cet agneaulx, je vous promets la foy du mariage au Nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ». Enfin, le prêtre joint les mains des deux époux et leur commande de dire « Ich nehme dich zu mein ehelichen Weib/Mann ». En allemand, on se tutoie, en français on se vouvoie, « je vous prends ma loyale femme, mon époux ». Le prêtre couvre les mains jointes de son étole et confirme et bénit l’union contractée par les époux. S’ensuit la messe de mariage. La bénédiction nuptiale se situe encore à la fin de la messe. Il est bien précisé qu’il n’y aura pas de bénédiction pour les secondes noces, mais une simple prière, precatio in nuptiis bigamorum. La remise de l’anneau et sa formule deviennent le symbole même du mariage. Strasbourg rejoint la liste des diocèses « du Nord-Est » et d’Allemagne où se répand ce rituel et formule.

Le Rituale Argentinense de 1742 : le gallicanisme

En 1742, le cardinal de Rohan promulgue le Rituale Argentinense. Il interdit le recours aux rituels antérieurs, c’est-à-dire à celui de Furstenberg. Les auteurs de cet ouvrage une « somme liturgique » sont les bénédictins Dom Sueur et Dom Thuillier de Saint-Germain-des-Près, auteurs aussi du Rituale Rothomagense, paru en 1739 (Chatellier 394-396), et réédité en 1771. Le texte du Rituale Argentinense est d’ailleurs la copie pure et simple du Rituel rouennais : le diocèse de Strasbourg devait être un diocèse de France. Dans son introduction, les deux Rituels français affirment que le mariage a deux aspects : 1° c’est un contrat civil et une fonction naturelle et 2° c’est un sacrement. Et afin que nul n’en ignore, une note de bas de page (absente dans le Rituel rouennais) se réfère à l’édit de Blois de 1579, dans lequel la monarchie refusant de recevoir le décret du Concile de Trente, l’introduit partiellement par législation royale. La doctrine des deux cardinaux est celle du gallicanisme parlementaire : il ouvrira la voie au mariage civil. Le Cardinal de Rohan ne s’était pas montré hostile à un contrat de mariage privé pour les protestants (C. Maire).

Le mariage se déroule désormais dans l’église, devant le chœur. Les formulaires et répons sont trilingues (latin, allemand, français). Elle commence par l’exhortation (Ehrmanung) puis se poursuit par la bénédiction des anneaux, et l’examen. Les anneaux (Ringe) jouent désormais un rôle central, car ils sont « le signe du mariage » (Rouen, 1739, où l’on ajoute l’échange d’une pièce de monnaie en signe de « douaire »). « Signe du mariage », que le rite des anneaux dans le Rituale Metense de 1711. À Strasbourg, les fiancés se prennent la main, et se passent une bague au doigt en disant : « Avec cet anneau, je vous donne la foi du mariage, au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ». Puis chacun déclare « Je vous prends présentement pour ma femme et légitime épouse/mari et légitime époux ». Puis le prêtre qui a recouvert les mains des époux de son étole, confirme la mariage contracté par les époux. Dans le texte français, on se vouvoie désormais et on répond « oui Monsieur » au curé. Dans le texte allemand, on lui dit « Ja, Ihr Ehrwurden ».

Comme dans le Rituel romain dont il suit la leçon, le Rituale Basiliense (1739) n’accorde pas d’importance au rite des anneaux. Le mariage est confirmé par le prêtre après déclaration du mari et de l’épouse, et la jonction des mains. Si l’époux a un anneau, il sera béni, indique le Rituel. S’ensuit la messe de mariage. Dans la plupart des diocèses français, la bénédiction conjugale a lieu après le Notre Père. Le Rituale Basiliense précise que la bénédiction nuptiale pourra avoir lieu après la messe, selon l’usage du diocèse. C’est le cas aussi à Strasbourg.

Le rituel strasbourgeois est adopté par tout le diocèse de Strasbourg à partir du Concordat de 1802.

Le rituel protestant

Comme dans la population catholique, des fiançailles familiales et privées, par exemple à l’occasion de la passation du contrat de mariage, sont célébrées à la maison ou dans les poêles des tribus, et précèdent le mariage proprement dit. Le pasteur peut y assister.

Dans les premiers temps de la Réforme, les églises protestantes alsaciennes conservent l’essentiel du rituel de l’Agende diocésain de 1490 (engagement, jonction des mains, remise de l’anneau, confirmation).

Cependant, la cérémonie a lieu dès 1530 à l’intérieur du temple.

En 1549, le rituel de Marbach introduit une dimension nouvelle. Après la jonction des mains, le pasteur prononce la formule du mariage : « Ce que Dieu a joint, l’homme ne doit pas le séparer. Puisque N. et N. désirent contracter mariage, et qu’ils ont reconnu cela publiquement devant Dieu et sa sainte Église, et qu’ensuite ils se sont donné la main et ont échangé les anneaux de mariage, je les déclare unis, en tant que ministre régulier de l’Église, au nom du Père, etc. » (traduction F. Wendel). C’est donc le pasteur qui fait le mariage (copulation sacerdotale). Le sens de l’évolution de la cérémonie religieuse a donc été exactement inverse dans les deux confessions commente François Wendel (p. 122-124).

Avec la Kirchenordnung de 1598, Strasbourg entre définitivement dans la stricte orthodoxie luthérienne (Dörner, Die Evanglischen Kirchenordnungen des XVI. Jh. Elsass, Strasbourg). Une partie importante de l’ordonnance est consacrée aux sacrements et cérémonies. Parmi eux, le mariage. Après un long exposé sur les empêchements de consanguinité, l’on demande de procéder à la proclamation des bans au cours de deux cultes successifs, où l’on doit rappeler les noms et qualités des pères des futurs. S’il se révélait des empêchements importants, le tribunal matrimonial devra être saisi et, pour les fautes non dirimantes, des peines seront imposées lors de la cérémonie ultérieure (voir : Bâtard).

Le mariage est divisé en deux moments : les fiançailles (Eheberednung) et la cérémonie à l’église (Kirchgang). Ils est conseillé aux pasteurs de se rendre aux fiançailles et d’y procéder à une cérémonie, au cours de laquelle, ils rappelleront l’importance du mariage institué par Dieu et les devoirs à respecter. À la fin d’une longue leçon sur les devoirs et les droits respectifs de l’épouse et de l’époux, ils interrogent les fiancés : « Voulez-vous vous épouser et avec l’aide de Dieu, ne plus vous quitter ? ». Puis il pose sa main sur les mains jointes des fiancés et prononce une formule de bénédiction.

Ultérieurement, on procède à la cérémonie à l’église (Kirchgang). Le pasteur ouvre la cérémonie par une série de lectures, puis il s’adresse aux conjoints. Après l’échange des questions et réponses, il leur demande de joindre les mains, y compris l’anneau que le marié a donné à la mariée, et prononce la formule de mariage. Un seul anneau, alors que dans d’autres rituels luthériens, il y a deux anneaux, remis par chacun des conjoints à l’autre conjoint (Wendel, p. 122).

Il n’y a pas en Alsace de rituel reprenant les formules de certaines églises luthériennes, dites de donations actives, où mari et femme se donnent la main et se passent l’anneau « Mit diesem Ring, vermähle ich dich mir zu rechtmässiger Ehe… » avant le prononcé nuptial du pasteur.

À la fin du XVIIe siècle, le secrétaire du Magistrat de Strasbourg Schilter résumait « les rites essentiels de la copulation sacerdotale en usage dans les églises évangéliques sont : d’abord, l’interrogation faite par le pasteur et la promesse des future époux ou leur déclaration mutuelle de vouloir commencer le mariage ; ensuite la dation réciproque des anneaux de mariage et de la main droite ; puis la réunion ou copulation par le pasteur, die Zusammensprechung, jointe au sermon nuptial ; enfin la bénédiction des époux se présentant à genoux » (cité par Wendel 123).

Le mariage juif

Le droit du mariage juif des communautés rhénanes avait été précisé au haut Moyen Âge par les takkanot des trois communautés de Worms, Spire et Mayence adoptées par les autres communautés décidant l’interdiction de la polygamie et de la répudiation par le mari, tout en se réservant la possibilité de passer outre dans des cas d’espèce. Cette évolution résultait de l’influence du milieu chrétien environnant et de l’Église.

Comme dans les rites chrétiens, le mariage juif de rite aschkenaze rhénan, les deux moments, bien distincts au haut Moyen Âge, fiançailles (Eroussin ou Kiddoushin) et mariage proprement dit (Nissouin) ont été accolés et se déroulent le même jour à la suite l’une de l’autre. Mais une cérémonie privée, dit Quenass, avait lieu bien auparavant où était établi un contrat de fiançailles établissant le montant des dotations de l’époux et de l’épouse et la date du mariage, dont la rupture donnait lieu à indemnisation. Dans les contrats déposés, à la suite de l’arrêt du Conseil souverain (31/1/1701, de Boug, Ordonnances I. 310) ordonnant l’enregistrement des contrats de mariage juifs passés chez les rabbins, la dot maritale est appelée Morgengabe et l’apport de l’épouse Aussteuer (Haarscher). La cérémonie du mariage a lieu à la synagogue où était placé le dais nuptial (la ‘Houpa). Elle débute par les Kiddoushîn (fiançailles, consécration) : le rabbin récitait deux bénédictions sur une coupe de vin, que les fiancés boivent. Puis le fiancé, mettant à l’index droit de sa fiancée un anneau d’or, lui disait : « Tu m’es consacrée par cet anneau selon la loi de Moïse et d’Israël. » Le rabbin lit alors l’acte de mariage religieux et l’acte notarial garantissant à l’épouse le montant de sa dot et de son trousseau (Nedounya) et la contre-dot (Tossefeth) qui reprend les termes du contrat de fiançailles. La cérémonie se poursuit avec les Nissouîn avec les Sheva Berakhoth (sept bénédictions nuptiales) chantées en général par l’officiant ou réparties entre les assistants. Ces bénédictions achevées, on brisait un verre (évocation du deuil de la destruction du Temple et en même temps symbole de l’alliance entre le couple). On conduisait ensuite les époux dans une pièce où on les laissait seuls quelques instants (Yi’houd). Les témoins qui avaient signé la Ketouba constataient ce fait, considéré comme la consommation symbolique du mariage. La cérémonie nuptiale était achevée (d’après Max Warschawski). Voir aussi : Divorce.

La Révolution : la séparation du civil et du religieux

Le mariage civil ses rites et procédures

L’article 7 de la Constitution du 3 septembre 1791 – La loi ne considère le mariage que comme contrat civil – marque la réalisation positive des juristes et parlementaires gallicans. Désormais, d’après la loi du 20 septembre 1792 sur l’état civil, pour être valide, le mariage doit être passé devant un officier d’état civil, devant lequel il peut également être dissous. La loi sur le divorce abolit la séparation de corps. Les séparations sont converties en divorce, à la demande des intéressés. Conditions, empêchements, nullités, etc., le droit des canonistes est repris par les lois civiles, qui ne connaissent plus le mariage religieux. Les droits et devoirs des époux (fidélité, secours, assistance, protection de la femme par le mari, obéissance au mari par la femme, cohabitation obligatoire), tout cela est communiqué aux époux consentants avant le prononcé du mariage par l’officier d’état civil (Code Napoléon Art. 75, 213-214). Interdiction aux curés de tenir registres de baptême, de mariage, d’enterrements et de publier les bans de mariage (22 janvier 1793).

Articles organiques du 8 avril 1802

LIV. « Ils ne donneront la bénédiction nuptiale qu’à ceux qui justifieront, en bonne et due forme, avoir contracté mariage devant l’officier civil. » 

LV. « Les registres tenus par les ministres du culte, n’étant et ne pouvant être relatifs qu’à l’administration des sacrements ne pourront, dans aucun cas, suppléer les registres ordonnés par la loi pour constater l’état civil des français. »

La place du mariage religieux

Une intervention de Saurine dans un cas matrimonial fut loin de contribuer à l’apaisement des esprits. Pendant la Révolution, Georges Michel Wendling avait épousé Anne Sutter devant le curé non assermenté, mais sans se présenter à l’officier de l’État civil. En juillet 1802, Wendling épousa civilement Marie-Anne Wittersbach, puis demanda la bénédiction nuptiale à son curé, l’ancien jésuite Weissrock, lequel la lui refusa, parce que le mariage avec Anne Sutter, ayant été contracté selon la forme tridentine, était valide et par conséquent indissoluble. Tel ne fut pas l’avis de Saurine qui, à ce sujet, envoya à Weissrock une longue consultation canonique. En bon gallican, il distingue le mariage-contrat et le mariage-sacrement. À son avis, le mariage-contrat, c’est-à-dire le consentement matrimonial, ressort de l’autorité civile et constitue la matière du sacrement du mariage, tandis que la bénédiction du prêtre en est la forme. Avant la Révolution, argumente Saurine, par suite d’une délégation du prince, l’Église avait autorité sur le mariage-contrat, c’est-à-dire sur le mode de prestation du consentement matrimonial ; depuis la promulgation de la loi sur l’État civil, le consentement matrimonial doit être donné selon les prescriptions de la loi de l’État. Le consentement matrimonial de Wendling et d’Anne Sutter n’ayant pas été donne en conformité avec les prescriptions de la loi civile, Saurine en tire les conséquences que leur mariage est nul, bien qu’il ait été béni par un prêtre, car la bénédiction du prêtre qui constitue la forme du sacrement de mariage, est inopérante, quand la matière de ce sacrement fait défaut, ce qui fut le cas pour le mariage de Wendling-Sutter, vu que leur consentement n’a pas été donné conformément à la loi civile. Weissrock ayant persisté dans son refus, Saurine procéda lui-même à la bénédiction du mariage de Wendling avec Marie-Anne Wittersbach.

Le régime matrimonial commun et les régimes choisis par contrat

Les lois du 8 et 15 avril 1791 prescrivent que le régime matrimonial commun est celui de communauté universelle, avec succession égale entre tous héritiers, mais imposent le respect des conventions matrimoniales antérieures, qui pouvaient dans certaines limites y déroger. La loi du 17 nivôse an II, dont l’un des auteurs est Merlin de Douai annule les droits de dévolution (Flandres, Hainaut, Alsace, départements rhénans) : la communauté est universelle, et ne fait pas de distinction entre meubles et immeubles ni origine, apports ou acquêts. Tous les contrats contraires conclus après le 14 juillet 1789 sont annulés. Le Code Napoléon décrété en 1804 prescrit que le régime matrimonial, en l’absence de contrat est celui de la communauté des meubles et acquêts (hors donations ou héritages immobiliers postérieurs au mariage). Le mari gère l’ensemble des biens du couple, mais il ne peut aliéner les immeubles de sa femme sans son consentement.

Devenu procureur général de la Cour de cassation, Merlin de Douai va plus loin et fait casser en 1807, pour mauvaise application de la loi, un arrêt de Colmar qui avait validé la dévolution conforme au statut du Mundat de Wissembourg en se fondant sur la non rétroactivité de la loi du 17 nivôse an II : la dévolution qui favorise certains héritiers dans une succession ne donnait pas un droit certain aux héritiers et le mariage avait été conclu sans contrat mais sous l’empire du statut. Malgré l’opposition de la Cour de Cassation et de son procureur général, Merlin de Douai, la Cour de Colmar maintient pour les mariages conclus avant le 14 juillet 1789, l’application du droit de la dévolution pour le mariages conclus en vertu du statut de Kaysersberg ou de Colmar, et dûment enregistrés devant notaire.

Mais, là encore, à condition de procéder d’un contrat notarié, la nature de la communauté est cependant variable, allant du régime légal, qui s’impose quand il n’y a pas de contrat, à la séparation de biens. Les dispositions sur le préciput conventionnel permettent de prévoir un douaire ou Wittumb, tout comme dans le droit des successions, elles permettent de pérenniser la juveignerie. L’étude des contrats de mariage du XIXe siècle témoigne d’une grande continuité dans le régime matrimonial choisi par les conjoints d’Alsace (voir : Donations nuptiales).

Bibliographie

Sources

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Missale diocesis Argentinensis: denuo excusum casigatius erlagsort: Hagnoe | Erscheinungsjahr: 1520 München, Bayerische Staatsbibliothek Signatur: 2 Liturg. 183.

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Agenda ecclesiae Argentinensis per Joannem comitem a Manderscheid episcopum 1590, Cologne 1590. Google books.

KirchenOrdnung, Wie es mit der Lehre Göttliches Worts, vnd den Ceremonien, Auch mit anderen dazu nothwendigen Sachen, In der Kirchen zu Straszburg, biß hieher gehalten worden, Vnd fürohin mit verleihung Göttlicher Gnade, gehalten werden soll. Strasbourg 1598. Google books.

Agenda Ecclesiae Argentinensis. Per... Franciscum Egonem Episcopum Argentinensem, … In gratiam Pastorum suae Dioecesis Auctior & Emendatior, Ritualique Romano conformior typis evulgata … Molsheim 1670. Google Books.

Rituale Argentinense autoritate eminentissimi et serenissimi principis Armandi Gastonis cardinalis de Rohan, episcopi et principis argentinensis Alfatiae Landgravii, S. R. I. Principis, Magni Franciæ Elecmoynarii, Regii Ordinis Strasbourg 1742. Google Books.

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Notices connexes

Coutume

Divorce

Donations nuptiales

Ehe

Fiançailles

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François Igersheim