Lauch

De DHIALSACE
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Carte de Cassini- Cours de la Lauch, tel qu’il est décrit par l’élève inspecteur des Ponts et Chaussées en 1756. Sa description est contemporaine des levées opérées pour la carte de Cassini en Alsace.

Loche, Louche.

Affluent de l’Ill, la Lauch prend source sur les pentes des Lauchenkopf et Klintzkopf (marcairie et chaume du Lauchen, le lac de retenue date de 1889-1894), puis irrigue la seigneurie de la collégiale de Lautenbach – relevant du diocèse de Strasbourg –, et en amont la principauté de l’abbaye de Murbach, avant de se jeter dans l’Ill au sud de Horbourg. À partir de la fin du XVIIIe siècle, il alimente plusieurs canaux, principalement autour de Colmar, de même que la Fecht et la Thur.

Un rapport anonyme, dû probablement à un élève inspecteur des Ponts et Chaussées, en décrit le cours et les équipements en 1750. On pourra en suivre les descriptions en se reportant sur la carte de Cassini, et sur la carte dressée par l’état-major français (https://www.geoportail.gouv.fr/donnees/cartede-letat-major-1820-1866), ainsi que sur la carte dressée par l’état major allemand et qui a servi de fond de carte aux randonnées du club vosgien (https://www.landkartenarchiv.de/).

Le rapport sur la Lauch : le ban de Sengern et Lautenbach

« Observations faites sur le cours de la rivière de la Lauch. Rivière de Lauch, moulins, usines, et ponts établis. La Rivière de Lauch tire son origine dans le ban de Sengern, bailliage de Guebwiller, d’une source nommée installée Steinlebachwasen qui sort de la montagne à l’entrée du village de Heffen [un hameau du Linthal]. Elle joint un ruisseau sur la rive gauche nommée Hirtzgraben, tirant son origine d’une source sans nom. Éloigné de la chute d’environ une demie lieue. Le dit ruisseau traverse une partie dudit village sur lequel est un pont de charpente en état nommé Heffenbroucken. De là, passant par le bois de Heffen dans lequel il entre dans la grosse Lauchbach où il prend le nom de Lauch ».

« Un quart de lieu plus bas, joint un ruisseau sur la rive droite nommée Seebach, prenant son origine d’un lac nommé Pelchensee, sis sur le ban de Gebwiller, éloigné de la chute d’environ deux lieues. Par en dessous de cette jonction est une scierie sur la rive gauche de la Lauch nommé Lauchsegen. Un peu plus bas, un pont de maçonnerie nommé Klausbruck. Un peu plus bas est le village de Sengern où la Lauch passe sur la rive droite dudit village. Peu au-dessus dudit village joint sur la rive droite un ruisseau de la Lauch appelé Kletterbach, tirant son origine de la montagne de Kahlenberg éloignée de la chute d’environ une lieue. Dans cette distance et près la chute, une chapelle nommée Saint-Nicolas ». 

Le rapport décrit ensuite « le cours de la Lauch, par Lautenbachzell (avec une scierie appartenant à Messieurs du chapitre) de laissé sur la rive droite, Lautenbach sur la rive gauche puis la jonction avec la Murbach, puis après avoir passé le premier moulin à farine du cours de la Lauch, la rivière parvient à Schweighausen, où passait autrefois un canal qui servait à flotter du bois. Elle passe alors dans le ban de Pulle [Buhl], et le village équipé d’un pont de maçonnerie, passable, nommé Pullebroucken. Environ un quart de lieue plus bas que ledit village, joint un ruisseau à la Lauch… éloigné de la chute d’environ une demie lieue, dans cette distance est le château du prince de Murbach, sur la rive droite et peu éloignée ».

De Guebwiller à Colmar

Le rapport décrit ensuite le parcours de la Lauch dans le ban de Guebwiller. La ville est irriguée par un canal « tiré de la rive droite de la Lauch et traversant ladite ville sur une longueur jusqu’à sa rentrée dans son lit ». La ville concentre dix moulins à farine, dont deux à foulons à draps, et deux à huile et un foulon… « Sur ledit canal, dans ladite ville, il y a cinq ponts de maçonnerie et deux de charpente en état le tout servant pour les meuniers, et aussi 24 ponceaux des charpentes posées et entretenues par différents particuliers le tout en état et sans nom. Ledit canal rentre dans son lit environ 80 toises au-dessous du dernier moulin ». « À la fin du ban est une chapelle sur la rive gauche de la Lauch nommée Frau Capel ». 

C’est la même technique d’urbanisme que l’on applique à Issenheim : « La rivière de Lauch traverse le ban environ 300 toises au-dessus du village d’Issenheim. Est tiré un canal de la Lauch sur la rive droite d’environ un quart de lieue de longueur traversant le village qui fait aller deux moulins à farine, deux à huile, et deux foulons », dont l’un « appartient à Messieurs de Saint-Antoine ». « Et dans la ville, il y a deux ponts, le premier de maçonnerie en état le deuxième de charpente passable et sans nom, aussi un ponceau de charpente. Ledit canal rentrant dans son lit peu en dessous dudit village. La Lauch traverse ensuite le dit ban et aussi le village de Merxen sur laquelle est un moulin à farine et foulon ». 

C’est à l’entrée du ban de Condelsheim [Gundolsheim], que le rapport situe la confluence de la Lauch et de ce que le carte de Cassini appelle « Neugraben » et que le rapport appelle Belchenseebach. À l’entrée du ban, « joint un ruisseau à la Lauch sur la rive droite nommée Belch Seepach. Prend son origine d’une source nommée Fünstbrüne dans le ban de Soulce ». Il décrit ensuite le cours qu’il assigne à cet affluent de la Lauch, qui parcourt le ban et le village de Rimbach, le ban et le village de Jungholtz (un foulon à drap et à chanvre), et la ville de Soultz (six moulins à farine, deux à huile et trois foulons à drap), le ban de Soultz et la ville de Soultz (avec deux moulins, le 1er sur la rive droite à l’entrée de ladite ville, à farine, huile et foulon, le second est dans la ville, à farine et foulons, sur la rive gauche). Puis ledit ruisseau de Belchenbach traverse le ban d’Issenheim sur lequel un pont de maçonnerie sur la grande route et sans nom laissant le village d’Issenheim sur la gauche d’environ un quart de lieue puis entre et traverse le ban de Retersheim [Raedersheim] et aussi le village de Retersheim dans lequel est deux ponceaux de charpente en état. Peu au-dessous ledit ruisseau se décharge dans la Lauch à l’entrée du ban de Condelsheim ». Après Gundolsheim (un moulin à farine), la Lauch entre dans le ban de Rouffach, ville irriguée par l’Ohmbach, dont le rapport décrit à nouveau le cours en amont, à partir d’une source située à une demie lieue au dessus de Soulzmatt (avec ses 4 moulins à farine), Westhalten (2 moulins à farine), Rouffach (5 moulins à farine). À la sortie de ville de Rouffach, ledit ruisseau se décharge dans la rivière de Lauch au-dessus du grand pont de maçonnerie, où le dit ruisseau perd son nom.

La Lauch entre et passe dans le ban de Pfaffenheim traversant celui d’Hattstatt, celui d’Herrlisheim, celui de Colmar, où elle pénètre et irrigue les quartiers des Tanneurs et la Krutenau, pour rejoindre l’Ill, à Horbourg.

Les cours d’eau et les villes

Les agglomérations, et principalement les villes, ont un rapport étroit à l’eau courante, qui leur est indispensable. Non pas pour l’eau potable, qui provient pour l’essentiel de puits, mais pour la défense et l’économie de la ville. La rivière proprement dite passe à l’écart de la ville, quelque fois fort loin, dont elle est séparée par une zone d’inondation. Sur son cours, se branche un grand nombre de canaux et de rigoles d’irrigation, desservis en un ordre strictement hiérarchisé. À l’abri de ses remparts, la ville est reliée la rivière par une prise d’eau avec une ou plusieurs écluses, un ou plusieurs canaux ou aqueducs, un ou plusieurs réservoirs. Elle alimente les fossés des remparts, réserve de poissons, nid à moustiques et égouts. Un canal alimente les caniveaux de la rue principale, parfois de ruelles adjacentes, et une fois par semaine, une chasse permet le nettoyage des rues. Mais le long des canaux s’établissent les moulins, tanneurs, bouchers, drapiers, teinturiers, bains ou étuves, et les lavoirs. Ce système est celui de toutes les villes du cours de la Lauch, du Belchenbach et de l’Ohmbach (Guebwiller, Roufach, Soultz etc.).

Usinage et irrigation

Prenant la suite des administrations abbatiales, seigneuriales et communautaires, l’administration royale (Ponts et Chaussées, Intendants) exerce la tutelle des villes et communautés. Elle met au point les arbitrages et transactions des conflits entre meuniers et paysans, s’accusant les uns les autres de prendre trop d’eau et d’en priver les autres, dans leurs canaux de service ou les rigoles d’irrigation (comme à Guebwiller en 1749), ou entre communautés, comme pour la transaction intervenue entre Lautenbach, Bühl, Guebwiller, Issenheim, Merxheim, Gundolsheim, Rouffach, Pfaffenheim, Hattstatt et Herlisheim, « touchant à l’écoulement des eaux de la rivière de Lauch pour l’arrosement des prairies ainsi que pour l’exploitation des moulins situés le long de la rivière » renouvelée en 1755. Ponts et Chaussées interviennent par exemple pour préparer et pour ordonnancer les travaux rendus nécessaires par les dommages créées par les crues exceptionnelles. Ainsi celle de 1780, qui impose la réfection des rives de la Lauch à Lautenbachzell et Lautenbach. L’inspecteur des Ponts et Chaussées de Haute-Alsace établit plans, devis, adjudications (fascines, enrochements, tableau des corvées, crédits affectés, etc.). Les travaux n’auront lieu qu’à l’été 1783. De même pour les rectifications intervenues à l’aval, par exemple, la régularisation des rivières irriguant Colmar et ses environs, et la connexion des canaux, comme le Logelbach, le Muhlbach, le transfert de la Lauch dans l’ancien lit de la Thur, etc. Ou encore en liaison avec la ville de Colmar pour l’élargissement et la régularisation des confluents de la Lauch et de l’Ill près de Horbourg (1779).

La vallée de la Lauch s’est bien développée, conclut Clauss dans son Dictionnaire, de grandes « établissements industriels ont pris la place des nombreux moulins ».

Bibliographie

ADHR 5C 1257 1750-1785 : Observations sur le cours de la Lauch, Plans du cours à Guebwiller, Bühl, Issenheim, Merxheim, entre Roufach et Herllisheim… plans et devis concernant le redressement, le curage et l’élargissement de la Lauch dans les banlieues de Colmar, Wettolsheim Eguisheim, Herlisheim et Hattstatt…

C 1258 1751-1789 : Curage du lit de la Lauch… curage des trois bras de la Lauch, au ban de Colmar etc.

CLAUSS, Historisches Topographisches Wörterbuch, p. 594.

BISCHOFF (Georges), « L’insurrection paysanne de 1525 et la principauté de Murbach », Annuaire de la Société d’histoire des régions de Thann-Guebwiller, 1971-1972.

DELSALLE (Paul), « L’eau, l’industrie et la ville en Haute-Alsace et dans le Nord de la Franche-Comté aux XVIe, XVIIe, et XVIIIsiècles », Colloque Urban Oberrhein : la ville et l’eau, Mulhouse, 1994.

FAUST (Pierre-Paul), « Roufach-Rubeacum, l’importance de l’eau dans le devenir et la vie de l’ancienne cité épiscopale », Colloque Urban Oberrhein, La ville et l’eau, Mulhouse, 1994.

OHLIG (Christoph), Historische Wassernutzung an Donau und Hochrhein zwischen Schwarzwald und Vogesen. Schriften der Deutschen Wasserhistorischen Gesellschaft, Siegburg, 2008.

Notices connexes

Andlau

Bains, Bruche

Canaux, Colmar

Ehn (ou Ergers)

Fecht, Flottage

Giessen

Hardt

Ingénieur du roi

Ladhof, Landgraben, Largue, Lautenbach, Liepvrette

Moder

Ports, Ponts et Chaussées

Rhin, Rouffach

Sauer, Scheer

Thur

Usine

Zinsel, Zorn

François Igersheim