Inspecteur des Ponts et Chaussées : Différence entre versions

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« La multiplication et le perfectionnement des routes est l’un des grands avantages que l’Alsace doit à sa réunion avec la France », écrit Horrer dans l’article « chaussée » de son ''Dictionnaire''. C’est à l’administration provinciale des Ponts et Chaussées et à ses inspecteurs des Ponts et Chaussées qu’est confiée depuis 1716 cette tâche importante, car au sortir des guerres de Louis XIV, les routes d’Alsace étaient dans un fort mauvais état. L’ingénieur Jean-Baptiste de Règemorte, directeur des levées et turcies de la Loire qui avait été déjà chargé de travaux sous Vauban et Tarade, a été son premier directeur, nommé en 1718, avec son fils Noël de Règemorte. Ce dernier permute avec son frère Antoine de Règemorte jusqu’alors en poste sur la Loire en 1726. Ce dernier reste en fonctions jusqu’en 1744. Il est remplacé en octobre 1745 par de Clinchamp, qui avait été ingénieur de la généralité de Rouen, puis de Châlons, et nommé pour quelques mois à Metz.
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« La multiplication et le perfectionnement des routes est l’un des grands avantages que l’Alsace doit à sa réunion avec la France », écrit Horrer dans l’article « chaussée » de son ''Dictionnaire''. C’est à l’administration provinciale des Ponts et Chaussées et à ses inspecteurs des Ponts et Chaussées qu’est confiée depuis 1716 cette tâche importante, car au sortir des guerres de Louis XIV, les routes d’Alsace étaient dans un fort mauvais état. L’ingénieur Jean-Baptiste de Règemorte, directeur des levées et turcies de la Loire qui avait été déjà chargé de travaux sous Vauban et Tarade, a été son premier directeur, nommé en 1718, avec son fils Noël de Règemorte. Ce dernier permute avec son frère Antoine de Règemorte jusqu’alors en poste sur la Loire en 1726. Ce dernier reste en fonctions jusqu’en 1744. Il est remplacé en octobre 1745 par de Clinchamp, qui avait été ingénieur de la généralité de Rouen, puis de Châlons, et nommé pour quelques mois à Metz.
  
 
Dans un mémoire de 1743, Antoine de Règemorte affirme avoir donné à son service son efficacité, car à son arrivée en Alsace, ses employés devaient leurs postes à leurs protections plus qu’à leurs capacités ou à leur probité. En 1726, il a un adjoint, inspecteur principal (Pétin) et 14 inspecteurs, chargés d’ateliers sur les routes principales de la province. En 1741, le nombre d’inspections est ramené à 8. En 1743, il y a deux inspecteurs principaux, l’un pour la Haute-Alsace et l’autre pour la Basse-Alsace et cinq inspecteurs. En 1748, l’inspecteur de la Haute-Alsace n’apparaît plus.
 
Dans un mémoire de 1743, Antoine de Règemorte affirme avoir donné à son service son efficacité, car à son arrivée en Alsace, ses employés devaient leurs postes à leurs protections plus qu’à leurs capacités ou à leur probité. En 1726, il a un adjoint, inspecteur principal (Pétin) et 14 inspecteurs, chargés d’ateliers sur les routes principales de la province. En 1741, le nombre d’inspections est ramené à 8. En 1743, il y a deux inspecteurs principaux, l’un pour la Haute-Alsace et l’autre pour la Basse-Alsace et cinq inspecteurs. En 1748, l’inspecteur de la Haute-Alsace n’apparaît plus.
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Clinchamp se propose de réorganiser son service en 1754, mais le projet n’aboutit pleinement qu’en 1764. Il définit de nouvelles circonscriptions, confiées à des inspecteurs principaux, divisées en « 6 portions » chacune, « pour être desservies par autant d’inspecteurs particuliers ». Il en formule les lettres de mission. En Haute-Alsace, à Colmar, il est « chargé sous les ordres du Directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par les montagnes du Sundgau, celles des Vosges, le Rhin, et la route de Rhinau à Andlau (par Benfeld et Stotzheim) » avec des inspecteurs particuliers à Belfort, Altkirch, Neuf-Brisach.
 
Clinchamp se propose de réorganiser son service en 1754, mais le projet n’aboutit pleinement qu’en 1764. Il définit de nouvelles circonscriptions, confiées à des inspecteurs principaux, divisées en « 6 portions » chacune, « pour être desservies par autant d’inspecteurs particuliers ». Il en formule les lettres de mission. En Haute-Alsace, à Colmar, il est « chargé sous les ordres du Directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par les montagnes du Sundgau, celles des Vosges, le Rhin, et la route de Rhinau à Andlau (par Benfeld et Stotzheim) » avec des inspecteurs particuliers à Belfort, Altkirch, Neuf-Brisach.
  
En Alsace Moyenne, à Strasbourg, il est « chargé sous les ordres du Directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par le Rhin, les Vosges, et les routes de Rhinau à Andlau, et de Strasbourg à Wiltheim, au delà de Saverne » avec des inspecteurs particuliers, à Sélestat, Marckolsheim, Molsheim, Obernai. En Basse-Alsace, à Haguenau, il est «  chargé sous les ordres du directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par le Rhin, les Vosges et la route de Strasbourg à Saverne, et la route de Strasbourg à Bitche » avec des inspecteurs particuliers à Saverne, Marlenheim, Wissembourg, Lauterbourg. La grande époque de la construction des routes est-elle passée ? Cette tripartition de l’Alsace en trois inspections principales ne dure pas, et dès 1772, on en revient aux deux ressorts classiques : la Haute-Alsace et la Basse-Alsace, avec trois inspections particulières dans chacun des ressorts. Et le service des Ponts et Chaussées est chargé de plus en plus de la construction de bâtiments civils (églises et écoles). À son décès en 1785, Clinchamp est remplacé par Charpentier, qui le suppléait déjà, en qualité de directeur adjoint, depuis une dizaine d’années. En 1787, celui-ci signe le tableau du service, qui compte deux inspections principales de Basse et Haute-Alsace et sept inspections particulières (Colmar, Landser ou Ensisheim, Belfort, Saverne, Obernai, Strasbourg et Wissembourg).
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En Alsace Moyenne, à Strasbourg, il est « chargé sous les ordres du Directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par le Rhin, les Vosges, et les routes de Rhinau à Andlau, et de Strasbourg à Wiltheim, au delà de Saverne » avec des inspecteurs particuliers, à Sélestat, Marckolsheim, Molsheim, Obernai. En Basse-Alsace, à Haguenau, il est «  chargé sous les ordres du directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par le Rhin, les Vosges et la route de Strasbourg à Saverne, et la route de Strasbourg à Bitche » avec des inspecteurs particuliers à Saverne, Marlenheim, Wissembourg, Lauterbourg. La grande époque de la construction des routes est-elle passée ? Cette tripartition de l’Alsace en trois inspections principales ne dure pas, et dès 1772, on en revient aux deux ressorts classiques : la Haute-Alsace et la Basse-Alsace, avec trois inspections particulières dans chacun des ressorts. Et le service des Ponts et Chaussées est chargé de plus en plus de la construction de bâtiments civils (églises et écoles). À son décès en 1785, Clinchamp est remplacé par Charpentier, qui le suppléait déjà, en qualité de directeur adjoint, depuis une dizaine d’années. En 1787, celui-ci signe le tableau du service, qui compte deux inspections principales de Basse et Haute-Alsace et sept inspections particulières (Colmar, Landser ou Ensisheim, Belfort, Saverne, Obernai, Strasbourg et Wissembourg).
  
 
À l’origine, les inspecteurs des Ponts et Chaussées d’Alsace, nommés par l’[[Intendant|intendant]], sur proposition des [[Ingénieur_du_roi|ingénieurs du roi]] directeurs, sont issus des personnels des travaux de fortifications ou des Ponts et Chaussées du royaume, qui se sont signalés à l’attention des directeurs ou des généraux, en particulier pour le lever des cartes. Vers 1750, plus d’un tiers des inspecteurs succède à un père ou un oncle auprès de qui il a été formé. En 1754, on voit apparaître dans le tableau de service, un bureau des dessinateurs, chargé sous la direction d’un inspecteur particulier de former deux élèves, en leur enseignant le lever et le dessin des plans et cartes, la trigonométrie, les mécaniques, des éléments d’architecture. Après un examen en lever de cartes, plans, et éléments de géométrie et d’architecture, propre à vérifier s’ils sont « à portée de cultiver et perfectionner leurs connaissances et se mettre en état de les employer utilement dans le service des Ponts et chaussées », les élèves sont d’abord surnuméraires, puis ils sont placés auprès des inspecteurs particuliers et peuvent leur succéder quand un poste (et un traitement) devient vacant. La recommandation d’un personnage haut placé est signalée, mais pas toujours suivie d’effet, le concours des candidats devant départager « ceux qui auront donné le plus de preuves de zèle et de capacités » (intendant de la Galaizière, 1785).
 
À l’origine, les inspecteurs des Ponts et Chaussées d’Alsace, nommés par l’[[Intendant|intendant]], sur proposition des [[Ingénieur_du_roi|ingénieurs du roi]] directeurs, sont issus des personnels des travaux de fortifications ou des Ponts et Chaussées du royaume, qui se sont signalés à l’attention des directeurs ou des généraux, en particulier pour le lever des cartes. Vers 1750, plus d’un tiers des inspecteurs succède à un père ou un oncle auprès de qui il a été formé. En 1754, on voit apparaître dans le tableau de service, un bureau des dessinateurs, chargé sous la direction d’un inspecteur particulier de former deux élèves, en leur enseignant le lever et le dessin des plans et cartes, la trigonométrie, les mécaniques, des éléments d’architecture. Après un examen en lever de cartes, plans, et éléments de géométrie et d’architecture, propre à vérifier s’ils sont « à portée de cultiver et perfectionner leurs connaissances et se mettre en état de les employer utilement dans le service des Ponts et chaussées », les élèves sont d’abord surnuméraires, puis ils sont placés auprès des inspecteurs particuliers et peuvent leur succéder quand un poste (et un traitement) devient vacant. La recommandation d’un personnage haut placé est signalée, mais pas toujours suivie d’effet, le concours des candidats devant départager « ceux qui auront donné le plus de preuves de zèle et de capacités » (intendant de la Galaizière, 1785).
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BLANCHARD (Anne), ''Les ingénieurs du Roy de Louis XIV à Louis XVI'', Montpellier, 1979.
 
BLANCHARD (Anne), ''Les ingénieurs du Roy de Louis XIV à Louis XVI'', Montpellier, 1979.
  
WUNDER (Bernd), « Der rechtsrheinische Chaussebau zwischen Basel und Frankfurt (1717-1764) », ''ZGO'', 163, 2015, p. 143-169.
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WUNDER (Bernd), « Der rechtsrheinische Chaussebau zwischen Basel und Frankfurt (1717-1764) », ''ZGO'', 163, 2015, p. 143-169.
 
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La Révolution avait mis un terme aux chantiers de construction de bâtiments publics pendant près d’une décennie, entre&nbsp;1790 et&nbsp;1800. Sous le Consulat et l’Empire, le retour à un régime plus stable permit une réorganisation du service. Un arrêté du préfet du Bas-Rhin du 14&nbsp;messidor an&nbsp;X (1801) centralise entre les mains de l’ingénieur en chef des Ponts et Chaussées la surveillance des travaux de toute nature. L’arrêté préfectoral du 28&nbsp;octobre&nbsp;1810 charge les ingénieurs des Ponts et Chaussées de l’inspection des bâtiments communaux et du suivi de leur édification.
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Durant cette période, le nombre des constructions est très réduit&nbsp;: notons l’achèvement en&nbsp;1808 de l’église d’Epfig commencée au début de la Révolution. La seule construction d’envergure est celle de l’église de Krautergersheim en 1815. Grendelbruch et Marckolsheim envisagent déjà la reconstruction de leurs lieux de culte. Les grandes villes en revanche, possédant leurs propres services d’architectes, ont une activité plus importante. À Strasbourg, l’aménagement du parc de l’Orangerie avec le Pavillon Joséphine et la reconstruction du théâtre municipal figurent parmi les grands projets de l’époque.
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Les guerres de l’Empire entraînent la dispersion et l’aliénation partielle du patrimoine communal&nbsp;pour l’effort de guerre, puis la chute du régime par les invasions de&nbsp;1814 et&nbsp;1815 voient l’installation des armées d’occupation autrichiennes pendant plusieurs années et entraînent l’endettement croissant des communes déjà affaiblies financièrement. Cette situation empêche la réforme immédiate et la mise en place d’un service d’architecture pourtant demandée par le ministre de l’Intérieur dès 1816. Les travaux dans les arrondissements continuent à être confiés aux ingénieurs d’arrondissement des Ponts et Chaussées, situation qui subsiste jusqu’en&nbsp;1822.
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== Bibliographie ==
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BAUMANN (Fabien), ''L’architecte Antoine Ringeisen (1811-1889)&nbsp;: cinquante ans au service du patrimoine monumental alsacien'', mémoire de DEA, Arts, histoire et civilisation de l’Europe, 2005.
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BNUS. M.501.133,1081,1 et 2.
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BAUMANN (Fabien) « Les architectes d’arrondissement et la transformation du paysage communal au XIX<sup>e</sup>&nbsp;siècle&nbsp;», ''RA'', 134, 2008. p.&nbsp;271-290.
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== Notices connexes ==
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<p style="text-align: right;">'''Fabien Baumann'''</p> 
 
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Version du 25 octobre 2020 à 18:56

« La multiplication et le perfectionnement des routes est l’un des grands avantages que l’Alsace doit à sa réunion avec la France », écrit Horrer dans l’article « chaussée » de son Dictionnaire. C’est à l’administration provinciale des Ponts et Chaussées et à ses inspecteurs des Ponts et Chaussées qu’est confiée depuis 1716 cette tâche importante, car au sortir des guerres de Louis XIV, les routes d’Alsace étaient dans un fort mauvais état. L’ingénieur Jean-Baptiste de Règemorte, directeur des levées et turcies de la Loire qui avait été déjà chargé de travaux sous Vauban et Tarade, a été son premier directeur, nommé en 1718, avec son fils Noël de Règemorte. Ce dernier permute avec son frère Antoine de Règemorte jusqu’alors en poste sur la Loire en 1726. Ce dernier reste en fonctions jusqu’en 1744. Il est remplacé en octobre 1745 par de Clinchamp, qui avait été ingénieur de la généralité de Rouen, puis de Châlons, et nommé pour quelques mois à Metz.

Dans un mémoire de 1743, Antoine de Règemorte affirme avoir donné à son service son efficacité, car à son arrivée en Alsace, ses employés devaient leurs postes à leurs protections plus qu’à leurs capacités ou à leur probité. En 1726, il a un adjoint, inspecteur principal (Pétin) et 14 inspecteurs, chargés d’ateliers sur les routes principales de la province. En 1741, le nombre d’inspections est ramené à 8. En 1743, il y a deux inspecteurs principaux, l’un pour la Haute-Alsace et l’autre pour la Basse-Alsace et cinq inspecteurs. En 1748, l’inspecteur de la Haute-Alsace n’apparaît plus.

Clinchamp se propose de réorganiser son service en 1754, mais le projet n’aboutit pleinement qu’en 1764. Il définit de nouvelles circonscriptions, confiées à des inspecteurs principaux, divisées en « 6 portions » chacune, « pour être desservies par autant d’inspecteurs particuliers ». Il en formule les lettres de mission. En Haute-Alsace, à Colmar, il est « chargé sous les ordres du Directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par les montagnes du Sundgau, celles des Vosges, le Rhin, et la route de Rhinau à Andlau (par Benfeld et Stotzheim) » avec des inspecteurs particuliers à Belfort, Altkirch, Neuf-Brisach.

En Alsace Moyenne, à Strasbourg, il est « chargé sous les ordres du Directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par le Rhin, les Vosges, et les routes de Rhinau à Andlau, et de Strasbourg à Wiltheim, au delà de Saverne » avec des inspecteurs particuliers, à Sélestat, Marckolsheim, Molsheim, Obernai. En Basse-Alsace, à Haguenau, il est «  chargé sous les ordres du directeur des travaux dans cette partie de la province, bornée par le Rhin, les Vosges et la route de Strasbourg à Saverne, et la route de Strasbourg à Bitche » avec des inspecteurs particuliers à Saverne, Marlenheim, Wissembourg, Lauterbourg. La grande époque de la construction des routes est-elle passée ? Cette tripartition de l’Alsace en trois inspections principales ne dure pas, et dès 1772, on en revient aux deux ressorts classiques : la Haute-Alsace et la Basse-Alsace, avec trois inspections particulières dans chacun des ressorts. Et le service des Ponts et Chaussées est chargé de plus en plus de la construction de bâtiments civils (églises et écoles). À son décès en 1785, Clinchamp est remplacé par Charpentier, qui le suppléait déjà, en qualité de directeur adjoint, depuis une dizaine d’années. En 1787, celui-ci signe le tableau du service, qui compte deux inspections principales de Basse et Haute-Alsace et sept inspections particulières (Colmar, Landser ou Ensisheim, Belfort, Saverne, Obernai, Strasbourg et Wissembourg).

À l’origine, les inspecteurs des Ponts et Chaussées d’Alsace, nommés par l’intendant, sur proposition des ingénieurs du roi directeurs, sont issus des personnels des travaux de fortifications ou des Ponts et Chaussées du royaume, qui se sont signalés à l’attention des directeurs ou des généraux, en particulier pour le lever des cartes. Vers 1750, plus d’un tiers des inspecteurs succède à un père ou un oncle auprès de qui il a été formé. En 1754, on voit apparaître dans le tableau de service, un bureau des dessinateurs, chargé sous la direction d’un inspecteur particulier de former deux élèves, en leur enseignant le lever et le dessin des plans et cartes, la trigonométrie, les mécaniques, des éléments d’architecture. Après un examen en lever de cartes, plans, et éléments de géométrie et d’architecture, propre à vérifier s’ils sont « à portée de cultiver et perfectionner leurs connaissances et se mettre en état de les employer utilement dans le service des Ponts et chaussées », les élèves sont d’abord surnuméraires, puis ils sont placés auprès des inspecteurs particuliers et peuvent leur succéder quand un poste (et un traitement) devient vacant. La recommandation d’un personnage haut placé est signalée, mais pas toujours suivie d’effet, le concours des candidats devant départager « ceux qui auront donné le plus de preuves de zèle et de capacités » (intendant de la Galaizière, 1785).

L’œuvre du service des Ponts et Chaussées de la généralité d’Alsace a constitué un modèle pour la construction des routes en Allemagne du Sud du XVIIIe siècle. C’est un rapport sur la construction des Ponts et Chaussées rédigé par Antoine de Règemorte et mis à la disposition du bailli du margrave de Bade d’Emmendingen en 1728 qui est adopté, après avoir été traduit, par les conseillers des États des Habsbourg à Insbruck en 1736 : il sert de manuel pour la construction et l’entretien des Ponts et Chaussées de la rive droite et de toute l’Allemagne du Sud (Bernd Wunder, ZGO, 2015).

Les inspecteurs des Ponts et Chaussées peuvent également intervenir dans le domaine des mines et de l’industrie. Ainsi, dans le cadre du conflit entre les Rohan et Mackau d’Hurtigheim qui voudrait en faire une aciérie, Antoine de Régemorte est missionné pour inspecter l’état du haut-fourneau de Bitschwiller en 1736 (J.-M. Schmitt,Aux Origines, p. 57). Les inspecteurs des Ponts et Chaussées, sont très souvent sollicités par les villes et les communautés de la généralité pour superviser leurs travaux. Ainsi Chassain, inspecteur principal de Haute-Alsace, est architecte de la ville de Colmar. En 1768, il est nommé architecte-juré du Conseil souverain, chargé de déterminer quels sont les travaux à la charge des décimateurs, – grosses réparations – et à la charge des curés et vicaires perpétuels, moyennes et menues réparations, sauf cas de vétusté ou de force majeure, ouragans, tempête et autres cas de force majeure. Quant à Debordes, inspecteur principal de Basse-Alsace, il dresse le plan type des maisons curiales, cosigné par son chef, Clinchamp (1773). Les inspecteurs Christiani, Desbordes, Stroltz et Gouget ont construit de nombreux édifices. En 1780, l’intendant crée un corps des architectes des bâtiments publics et communaux, corps supprimé en 1787 par l’Assemblée provinciale, qui confie à nouveau la supervision des bâtiments publics et communaux aux Inspecteurs des Ponts et Chaussées.

Bibliographie

ABR C 508, 509. Personnel des Ponts et Chaussées, Inspecteurs des Ponts et Chaussées.

ABR C 517-518. Inspecteurs des Ponts et Chaussées - Maisons curiales, plans type par Desbordes et Clinchamp, s.l., 1773.

HORRER (Philippe-Xavier), Manuscrit de la Lettre C, Dictionnaire politique, historique et géographique de l’Alsace, s.l., 1787.

VIGNON (E.-J.-M.), Études historiques sur l’administration des voies publiques aux Dix-Septième et Dix-huitième siècles, Paris, 1862.

WERNER (Robert), Les Ponts et chaussées d’Alsace au XVIIIe siècle, Strasbourg, 1929.

PETOT (Jean), Histoire de l’administration des Ponts et chaussées, Paris, 1958.

BLANCHARD (Anne), Les ingénieurs du Roy de Louis XIV à Louis XVI, Montpellier, 1979.

WUNDER (Bernd), « Der rechtsrheinische Chaussebau zwischen Basel und Frankfurt (1717-1764) », ZGO, 163, 2015, p. 143-169.

François Igersheim

Les inspecteurs des Ponts et Chaussées sous la Révolution et l’Empire

La Révolution avait mis un terme aux chantiers de construction de bâtiments publics pendant près d’une décennie, entre 1790 et 1800. Sous le Consulat et l’Empire, le retour à un régime plus stable permit une réorganisation du service. Un arrêté du préfet du Bas-Rhin du 14 messidor an X (1801) centralise entre les mains de l’ingénieur en chef des Ponts et Chaussées la surveillance des travaux de toute nature. L’arrêté préfectoral du 28 octobre 1810 charge les ingénieurs des Ponts et Chaussées de l’inspection des bâtiments communaux et du suivi de leur édification.

Durant cette période, le nombre des constructions est très réduit : notons l’achèvement en 1808 de l’église d’Epfig commencée au début de la Révolution. La seule construction d’envergure est celle de l’église de Krautergersheim en 1815. Grendelbruch et Marckolsheim envisagent déjà la reconstruction de leurs lieux de culte. Les grandes villes en revanche, possédant leurs propres services d’architectes, ont une activité plus importante. À Strasbourg, l’aménagement du parc de l’Orangerie avec le Pavillon Joséphine et la reconstruction du théâtre municipal figurent parmi les grands projets de l’époque.

Les guerres de l’Empire entraînent la dispersion et l’aliénation partielle du patrimoine communal pour l’effort de guerre, puis la chute du régime par les invasions de 1814 et 1815 voient l’installation des armées d’occupation autrichiennes pendant plusieurs années et entraînent l’endettement croissant des communes déjà affaiblies financièrement. Cette situation empêche la réforme immédiate et la mise en place d’un service d’architecture pourtant demandée par le ministre de l’Intérieur dès 1816. Les travaux dans les arrondissements continuent à être confiés aux ingénieurs d’arrondissement des Ponts et Chaussées, situation qui subsiste jusqu’en 1822.

Bibliographie

BAUMANN (Fabien), L’architecte Antoine Ringeisen (1811-1889) : cinquante ans au service du patrimoine monumental alsacien, mémoire de DEA, Arts, histoire et civilisation de l’Europe, 2005.

BNUS. M.501.133,1081,1 et 2.

BAUMANN (Fabien) « Les architectes d’arrondissement et la transformation du paysage communal au XIXe siècle », RA, 134, 2008. p. 271-290.

Notices connexes

Assemblée provinciale

Banc_reposoir

Cadastre

Canaux

Cartographie

Chaussées

Conseil général

Digues

Directeur (des Ponts et Chaussées)

Ponts_et_Chaussées

Fabien Baumann