Fifres

De DHIALSACE
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ménétriers, Pfeifer

Les musiciens ambulants, désignés par le terme générique de fifres, sont des joueurs de fifre, instrument de musique essentiel au Moyen Âge et à l’époque moderne. Ils ont constitué une confrérie (Bruderschaft), à l’image des autres corps de métier dont les membres étaient géographiquement dispersés. En Alsace, la première mention connue remonte à 1400, date à laquelle le comte de Ribeaupierre, Schmasmann, sollicite tous les seigneurs présents en Alsace de reconnaître le fifre Henselin comme le « roi-König » des musiciens ambulants en Alsace (sur les titres électifs des fêtes de corporations et confréries, v. Carnaval). Ce territoire est alors défini comme l’espace compris entre les sommets vosgiens, le Rhin, la Forêt de Haguenau et au sud la Birse, affluent du Rhin au sud de Bâle, ou le col de Hauenstein.

Comme les ménétriers avaient mauvaise presse auprès de l’Église, le cardinal Cesarini, lors du concile de Bâle (1431-1448), avait fait promulguer une bulle pontificale qui autorisait les musiciens à communier.

La confrérie est structurée par des statuts, dont la version de 1606 est publiée par Mossmann (Histoire de Ribeauvillé). Elle est présidée par un « roi », choisi par le comte de Ribeauvillé jusqu’en 1789. La confrérie constitue un fief relevant de l’Empire et dont l’Empereur, comme Frédéric III en 1481, investit le comte de Ribeaupierre, puis ses successeurs, les comtes palatins, ducs de Birkenfeld (au NE de Trèves) et de Bischwiller, jusqu’en 1789. Cependant, le roi de France devient suzerain de ce fief à partir de 1673 et confirme les nominations. La confrérie est donc présidée par un « roi » nommé par le détenteur du fief. Ses devoirs consistent à maintenir l’ordre et à encaisser la cotisation annuelle des membres, qui doivent fournir chacun une poule et de l’avoine.

La patronne est la Vierge Marie, ce qui explique que les lieux et jours de réunion ont un lien avec la Vierge. Au XVe siècle, le « royaume » est divisé en cinq districts, dont deux vont disparaître, Strasbourg et Sélestat. Au sud, le lieu de réunion est Vieux-Thann, mal connu. Au centre, c’est Ribeauvillé et, en Basse-Alsace, c’est Mutzig et Rosheim en alternance ; puis il est transféré par le seigneur de Bischwiller dans sa résidence en 1687, non sans une forte résistance du prince-évêque de Strasbourg, seigneur de Mutzig.

Parmi les conditions d’admission figurent la naissance légitime, confirmée par un acte de naissance, deux ans d’apprentissage pour les citadins et une seule pour les ruraux, le port d’une médaille en argent fin et la présence à la fête annuelle.

À Ribeauvillé, le Pfiffertag a lieu le 8 septembre, fête de la Nativité de la Vierge. Il débute par un rassemblement devant le couvent des Augustins, remplacé après la sécularisation de 1537 par l’auberge Zum Stern jusqu’en 1719, puis, au XVIIIe siècle, devant d’autres auberges. Les membres de la corporation se rendent en cortège à l’église, puis au château du comte pour rendre hommage à celui-ci en tant que suzerain du « royaume des fifres », puis à l’auberge où a lieu l’après-midi le Bruderessen, repas de confrérie en commun. Le lendemain a lieu la session annuelle du tribunal et le pèlerinage à la chapelle de Dusenbach, pèlerinage très fréquenté.

À Bischwiller, le Pfiffertag a lieu à l’Assomption, le 15 août, date fixée en 1687 par lettres patentes de Louis XIV, qui y associe un marché. Chaque 15 août, les fifres de la Basse-Alsace se réunissent le matin devant la Laube (place du Marché), pour se rendre en cortège à l’église Saint-Nicolas de Hanhoffen. Ce cortège est très pittoresque, car, outre les costumes de fête très bariolés, les musiciens jouent des airs différents sur des instruments non accordés entre eux, sans former d’orchestre. Après la messe, ils se rendent au château pour renouveler le serment de fidélité au « roi » et la soumission au prince. Ils font une aubade et portent un toast au prince dans une timbale en argent. Puis ils se retrouvent à l’auberge du Lion, le poêle de la confrérie ; la foire se poursuit les deux jours suivants.

Il est très difficile d’estimer le nombre de musiciens présents. Pour le XVIIIe siècle, on estime leur nombre entre 800 et 1 000. À Ribeauvillé, ils sont 791 en 1739 et 751 en 1745. Les instruments ne peuvent pas être très volumineux à cause de la mobilité de joueurs. Les plus nombreux sont les fifres, à côté des trompettes, des flûtes, des hautbois, des clarinettes et des instruments à cordes (violons, lyres, luths).

Au XVIIIe siècle, la confrérie connaît un net déclin. Dans les villes, les meilleurs musiciens deviennent pensionnaires du Magistrat pour l’orchestre de la ville ou donnent des cours privés. Leur monopole est battu en brèche par la concurrence des musiques militaires dans les villes de garnison et des musiciens de bon niveau qui raflent les offres de fêtes, de noces et d’organismes divers. Malgré les efforts des responsables des trois confréries, le nombre des présents n’atteint plus que quelques dizaines avant leur dissolution en même temps que celle des corporations par la Révolution en 1791. À Strasbourg, dès 1780, la corporation indépendante des Ménétriers (Meistersænger), qui avait une école de chant et de poésie sacrée et avait animé les grandes fêtes depuis trois siècles, se dissout d’elle-même et transfère ses droits à la Maison des Orphelins. Elle donne un dernier concert le 24 novembre 1780.

Bibliographie

OBERLIN (Jérémie Jacques), Almanach de Strasbourg, 1781, p. 136-137.

CULMANN (Friedrich Wilhelm), Geschichte von Bischwiller, Strasbourg, 1826.

MOSSMANN (Xavier), Recherches sur l’histoire de la ville de Ribeauvillé, Ribeauvillé, 1888.

GÜNTHER (Christian), Bischwiller au fil de l’histoire, Strasbourg, 1987.

BÜSEMEYER (Hartwig),Das Königreich der Spielleute. Organisation und Lebenssituation elsässischer Spielleute zwischen Spätmittelalter und Französischer Revolution, Reichelsheim, 2003.

Notices connexes

Bruderschaft

Carnaval

Chanteurs_(Maîtres)

Confrérie

Deux-Ponts

Fêtes

 

Meistersänger_(société_des)

Ménétriers

Singerschule

Spielleute

Bernard Vogler