Edelknecht

De DHIALSACE
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(edel) kne(c)ht,armiger, écuyer

La chevalerie est toujours restée une distinction personnelle : on ne naît pas chevalier, on ne peut le devenir qu’en se faisant adouber. Mais au XIIIe siècle, la chevalerie se met à impliquer la noblesse, et par conséquent à se fermer : en principe, elle est désormais réservée aux descendants de chevaliers (Ritterbürtige). Cette nouvelle situation fait naître le besoin d’un mot pour désigner ceux qui ne sont pas (encore) chevaliers, mais qui, de par leur naissance, pourraient le devenir. Au départ, il s’agissait essentiellement de jeunes gens ayant atteint l’âge d’aller à la guerre, n’ayant pas encore eu l’occasion de se faire adouber, et qui, en attendant, accompagnaient et servaient un chevalier. C’est pourquoi on les appelait knehte ou knappen, termes qui évoquent à la fois la jeunesse et le service, mais qui ont le défaut de s’appliquer aussi à des serviteurs d’humble origine ; c’est pour échapper à cette ambiguïté qu’on s’est mis, à partir de la 2e moitié du XIIIe siècle, à les appeler edelknehte. On a eu quelque peine à trouver une traduction latine à ce mot ; juvenis et servus (nobilis), entre autres, ont été expérimentés et rejetés, et c’est armiger qui a fini par s’imposer, concurrencé (uniquement dans les pays francophones) par scutifer. On s’adresse à un chevalier en lui disant herr ou sire (en lat. dominus), à un écuyer en lui disant jungherr (qui évolue en junker, comme jungfrowe en jungfer), en fr. damoiseau ou donzel, en lat. domicellus.

Très rapidement, les écuyers n’ont plus tous été des jeunes : les frais qu’implique l’adoubement ont fait que des fils de chevaliers pauvres, et tout d’abord des cadets, n’ont pu y accéder et sont restés écuyers toute leur vie, sans que cela ne diminue la capacité de leurs propres fils à devenir chevaliers le cas échéant. Peu à peu, la majorité de la petite noblesse s’est trouvée formée d’écuyers. Il semble d’ailleurs que la chevalerie ait connu une certaine désaffection vers la fin du Moyen Âge : on voit en effet des membres de la haute noblesse, par exemple des Lichtenberg et des Ochsenstein, qui auraient largement eu les moyens de se faire adouber, omettre cette formalité, de sorte que leurs vassaux les appellent min gnediger jungherr (et non herr), et que parfois, dans des listes où les personnes sont classées par ordre hiérarchique, ils apparaissent après des membres adoubés de la petite noblesse. Le regain de vogue que connaît la chevalerie à partir du dernier quart du XVe siècle n’empêche pas la noblesse de rester constituée d’une majorité d’écuyers, au point que junker a fini par devenir presque un synonyme de noble.

D’autre part, si déjà la fermeture théorique de la chevalerie n’empêche pas des descendants de marchands comme les Wurmser ou les von Seckingen d’y accéder, à plus forte raison le titre d’écuyer est-il assez généreusement donné à des patriciens ou des officiers seigneuriaux d’extraction douteuse, et s’ils l’ont porté assez longtemps et assez régulièrement, la noblesse de leurs descendants ne sera plus remise en cause.

À partir de la 2e moitié du XVIe siècle, le titre de chevalier tend à se perdre, de sorte que celui d’écuyer perd sa fonction. Seuls ceux de junker, et en anglais d’esquire, poursuivent la carrière que l’on sait.

Bibliographie

ROTH von SCHRECKENSTEIN (Karl Heinrich), Die Ritterwürde und der Ritterstand, Fribourg-en-Brisgau, 1886.

FLECKENSTEIN (Josef), éd., Herrschaft und Stand. Untersuchungen zur Sozialgeschichte im 13. Jh., Göttingen, 1977.

METZ (Bernhard), « L’apparition de l’écuyer en Alsace au 13e siècle. De la ministérialité à la petite noblesse », RA 122, 1996, p. 83-92.

BISCHOFF (Georges), Noblesse, pouvoirs et société : les pays antérieurs de l’Autriche (milieu XIVe – milieu XVIe siècle), thèse d’habil. dactyl., 4 vol., 1997.

Notices connexes

Damoiseau, Damoiselle

Bernhard Metz