Bière

De DHIALSACE
Révision datée du 28 mars 2021 à 16:25 par Cpereira (discussion | contributions)
(diff) ← Version précédente | Voir la version actuelle (diff) | Version suivante → (diff)
Aller à : navigation, rechercher

Bier

Boisson fermentée faite avec de l’orge, souvent aromatisée avec du houblon.

Selon Charles Auguste Hanauer les Traditiones de Wissembourg signalent que certains tenanciers de l’abbaye fournissent à la fin du haut Moyen Âge, du malt (bracius), tandis que d’autres préparent la bière (cervisam per ordinem parare) ou livrent une certaine quantité de bière.

Un brasseur strasbourgeois, Arnold, apparaît à propos d’un échange de terrains avec le chapitre de la cathédrale. Sa maison, au 11 rue des Frères, est mentionnée en 1302, 1326, 1338, 1371 comme magna domus lapidea, das grosse stein hus zu dem Biermanne.

En 1410, deux brasseries fonctionnent à Strasbourg, l’une dans la Grand’Rue actuelle à l’enseigne du Cerf, l’autre à celle du vieux Spender. Mais la bière ne constitue qu’un succédané, « une boisson de fortune ou plutôt d’infortune » selon la formule de Jacques Hatt. On en consomme quand le vin est trop cher. Specklin rapporte qu’en 1446, les vignes ayant gelé pendant la nuit du dimanche des Rameaux, le vin coûte jusqu’à sept pfennigs le pot. Pour suppléer à la boisson manquante, on se met à brasser de la bière vendue de deux à trois pfennigs le pot selon la qualité et en peu de temps quarante micro-brasseries familiales naissent, pour disparaître à l’apparition du vin sur le marché.

Toutefois, Hanauer propose de conserver cette date comme naissance d’une fabrication régulière de la bière dans la métropole rhénane. Suite à l’instauration d’une taxe sur la bière en 1577 et 1578, les brasseurs strasbourgeois protestent en 1579. On fait venir de la bière de Lubeck, disent-ils. On pourrait la fabriquer localement de la même qualité. Mais la taxe s’y oppose et la réputation de la ville est ainsi compromise. Le magistrat cède. La taxe est supprimée pour la bière fine, à condition que la population trouve un approvisionnement suffisant de bière commune. Citons un autre arrêté du 30 juin 1736. « Comme les brasseurs se sont souvent plaints d’êtres forcés de débiter la meilleure bière au même prix que la bonne bière commune et qu’il en résulte divers désordres, nous statuons que désormais la meilleure bière se vendra toujours un sol plus cher que la bière commune ». La meilleure bière est appelée bière de mars, lagerbier, mertzbier, par opposition au schlenckbier, distinction supprimée le 3 mars 1770, à la suite d’une requête des brasseurs.

Signalons une autre taxe : Bierkieser ou Bierschauer. Aucune bière ne doit être vendue, soit en gros, soit en détail avant d’avoir été goûtée et approuvée. Si la bière ne parait pas suffisamment bonne, les contrôleurs la font débiter en dessous de la taxe. Quand la qualité leur semble mauvaise, ils en réfèrent aux trois préposés de l’Umgeld, qui, dégustation faite, prononcent la suppression de la bière. Par ailleurs, il est fait défense aux brasseurs, sous peine d’amende, même de punition corporelle, de mêler à leur bière aucune substance nuisible à la santé et d’utiliser tout autre ingrédient que l’orge et le houblon. À Strasbourg, il est obligatoire de brasser pendant le temps réglementaire, soit de la Saint-Michel (29 septembre) à la Saint-Georges (23 avril). Exception en 1579, car il n’y a pas de vin, et suppression de cet usage en 1783. Si le 9 novembre 1586, il est fait mention de six brasseries à Strasbourg, il en existe 26 en 1723, 30 en 1743, 35 en 1765. En 1789, il y a 33 brasseurs dans la ville, tous protestants. On fabrique de la bière dans d’autres localités alsaciennes, en 1709, les Jésuites de Molsheim font rénover leur brasserie : « reparatum … ahenum pro cervisia coquenda et confecta reliquia pro braxatione instrumenta » (BGS, Ms 194, p. 58). Mais la grande période de la bière est à venir, au XIXe siècle, du fait des lourdes taxes sur le vin.

Rappelons que l’histoire de la bière est, en Alsace, indissociable de celle du vin. Selon l’inventaire des biens de l’aubergiste Jean Fidèle l’Évêque (ABR., 7 E 57.2/47) du 16 mars 1821, on trouve dans la cave, quatre tonneaux, une « tonne » de choucroute, six hectolitres de vin blanc de 1819, 40 bouteilles de vin de 1818 et 126 bouteilles de bière.

Bibliographie

REIBER (Ferdinand), Etudes Gambrinales, Strasbourg, 1882.

HANAUER (Auguste-Charles), Etudes économiques sur l’Alsace ancienne et moderne, 2 t., Paris, Strasbourg, 1876-1878, t. II, p. 340‑354.

HATT (Jacques), Une ville au XVe siècle : Strasbourg, Strabourg, 1929, p. 313‑314.

Encyclopédie de l’Alsace, éd. Publitotal, Strasbourg, 12 vol, 1982-1986, p. 620-621.

Notices connexes

Houblon

Gastronomie_alsacienne

 

Claude Muller