Bâtard

De DHIALSACE
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Bankert, Bastard, Hurenkind

S’est dit de tout enfant né hors mariage.

Du XIVe au XVIe siècle, surtout au XVe siècle, nombreux furent les princes, les grands seigneurs et les prêtres séculiers à engendrer des enfants illégitimes (unehelich). Ainsi pour l’Alsace, le capitaine Nicolas de Hattstatt (11 bâtards connus), avant lui Jean d’Ochsenstein, chanoine du Grand Chapitre de Strasbourg (6 connus), son collègue Conrad de Bussnang, évêque de 1439 à 1440 (6 connus) et le successeur de celui-ci, Albert de Bavière, père d’Elsa, ditedie Pfaffentochter, pour ne citer que les plus illustres.

Le statut du bâtard l’excluait de tout droit de succession sur l’héritage paternel et maternel, notamment sur les fiefs. Même né d’un père noble, il ne pouvait l’être lui-même si sa mère ne l’était pas. Il semble en revanche que cet état lui était reconnu, en admettant que sa mère était noble (cas de Henri de Bussnang, l’un des enfants de l’évêque, et d’Elsa de Bavière). Sous la Monarchie, il était admis que les bâtards des rois naquissent princes, ceux des princes gentilshommes et ceux des gentilshommes roturiers. Certains nobles et des ecclésiastiques faisaient légitimer leurs enfants illégitimes par l’empereur ou le pape pour leur permettre d’hériter et de tenir des fiefs ou des bénéfices. Il leur était de toute manière licite de faire en leur faveur des donations entre vifs pour leur entretien.

Les enfants naturels pouvaient être légitimés par l’empereur lorsqu’il s’agissait de familles nobles et illustres, ainsi de Smassmann de Ribeaupierre et d’Elisabeth Wetzel au XVe siècle. Par la suite, il délégua ce pouvoir aux comtes palatins d’empire. Ces hauts fonctionnaires ou universitaires éminents avaient été distingués par ce titre pour leurs mérites et avaient en outre la faculté d’accorder des armoiries et de nommer des notaires. Après 1648, le Conseil souverain d’Alsace prit leur relais, à partir notamment d’une ordonnance du 31 mars 1701 qui dépouilla les comtes palatins du droit de légitimation. L’Alsace n’en comptait d’ailleurs plus depuis quelque temps déjà.

À la veille de la Réformation, le concubinage des simples prêtres séculiers était chose courante, de sorte que les réformateurs montrèrent l’exemple en se mariant publiquement, ce qui sera la règle pour les pasteurs. Un bâtard ne pouvait entrer dans les ordres religieux et obtenir de bénéfice que sur dispense du pape ou de son évêque. Il ne pouvait pas hériter, sauf par legs ou donations entre vifs, en revanche, il pouvait disposer à sa guise de tous ses biens et occuper toutes les fonctions civiles. Dès le XVIIe siècle, le Conseil souverain d’Alsace obligea les prêtres qui s’y refusaient à administrer le sacrement du baptême aux enfants naturels.

Louis XIV, dans son zèle religieux, ordonna par un édit du 13 avril 1682 que tout enfant illégitime né de parents luthériens serait baptisé et élevé dans la confession catholique, le roi se considérant comme son père légal. Dans une lettre au procureur général du Conseil souverain d’Alsace du 14 juillet 1767, Choiseul confirme cette règle, en autorisant toutefois les parents à élever leur enfant illégitime dans leur foi s’ils l’ont reconnu par mariage subséquent avant qu’il n’atteigne l’âge de cinq ans. Le sort des bâtards nés de parents calvinistes ou anabaptistes n’y est pas évoqué, mais il devait en aller de même pour eux. Par contre, Choiseul estime que c’est un privilège pour les bâtards nés de parents juifs que d’être baptisés et élevés dans la religion du roi, même s’ils ont été légitimés par mariage subséquent. Il ne souffre pas d’exception pour eux. Ils reçoivent alors généralement un nom de baptême différent et parfois même un nouveau patronyme (exemple de la famille Tauflieb).

Sources - Bibliographie

FERRIERE (Claude Joseph de), Dictionnaire de droit et de pratique, contenant l’explication des termes de droit, d’ordonnances, de coutumes et de pratique avec les juridictions de France, Paris, Saint-Etienne, 1762, 2e éd., 1771, I, p. 181‑186.

De BOUG, Recueil des Edits, Déclarations... du Conseil d’Etat et du Conseil Souverain d’Alsace... , Colmar, 1775.  II, p. 763.

HOFFMANN (Charles), L’Alsace au XVIIIe siècle, 1906, III, p. 45 et s.

LIVET (Georges), WILSDORF (Nicole), Le Conseil Souverain d’Alsace au XVIIe siècle. Les traités de Westphalie et les lieux de mémoire, Strasbourg, 1997, p. 282.

Notices connexes

Comte Palatin

Légitimation

Poeta laureatus

Reichspfalzgraf

Christian Wolff