Canaux
Kanäle
Cours d’eau creusé ou amélioré par le travail de l’homme. Il existe de nombreuses variétés de canaux : canaux de navigation fluviale, canaux latéraux doublant une voie d’eau naturelle pour pallier les difficultés de navigation, canaux de flottage, d’irrigation, de drainage, d’alimentation en eau d’industries diverses telles que les moulins ou les tanneries ou encore des douves des forteresses.
On appelle aussi canal des rivières aménagées par des travaux destinées à les rendre navigables.
Sommaire
I. Les « canaux » de l’Alsace au Moyen Âge
Les « canaux » du Moyen Âge sont pour l’essentiel des aménagements apportés aux fort nombreuses rivières de manière à en accroître l’étiage et à assurer un niveau suffisant pendant la partie de l’année où elles ont suffisamment d’eau, de l’automne à la fin du printemps. Le bois, en planches et surtout en bûches, est transporté de la sorte (v. Bois). Mais on peut rencontrer également des canaux destinés à la force hydraulique des moulins, à l’irrigation – ou drainage – des champs et prairies, à fournir l’eau pour la lessive des habitants, et à servir de « collecteurs » d’où les innombrables Muhlbach de l’Alsace. Le « canal » Rosenmeer (fin XVe à 1950) d’une dizaine de kilomètres avec prise d’eau dans la Magel à la Fischhütte, parcours par Rosenwiller et Rosheim et débouché dans l’Ehn entre Krautergersheim et Blaesheim, n’en est qu’un exemple parmi de très nombreux autres (mais seul le cours supérieur est artificiel, le cours inférieur est un ruisseau appelé das Meer dès le XIVe siècle).
La voie d’eau principale de l’Alsace, l’Ill, était navigable à partir de Colmar qui avait construit un port, le Ladhof, et avait vu se créer une corporation de bateliers pour se charger de la navigation. Il y avait des ports tout au long de son parcours, à Sélestat (avec également un Ladhof et une corporation des bateliers). Les bateliers des ports de Kogenheim et Benfeld formaient également une corporation des bateliers et pêcheurs du bailliage de Benfeld ; Illkirch, Strasbourg et la Wantzenau avaient eux aussi équipé les rives de l’Ill d’un ou plusieurs ports. Les bateaux étaient petits, d’une douzaine de mètres de long et 3 m de large, et pouvant transporter 100 sacs au maximum. Pourtant l’Ill est mal entretenue et les travaux de canalisation « sporadiques » (Descombes).
1. Les canaux de Basse-Alsace.
L’historien Charles Schmidt (Propriété rurale, p. 165) a cru pouvoir repérer dans les sources plusieurs canaux entre Strasbourg et Sélestat dès le commencement du XIIIe siècle.
- L’Andlau
L’Andlau semble avoir été rendue navigable jusqu’à sa jonction avec l’Ill, au-dessus de Fegersheim. On voyait encore des traces de ces travaux au XVIIIe siècle. Les villages de Barr, Mittelbergheim, Valff, Zellwiller, Heiligenstein, Gertwiller, Goxwiller, Bourgheim profitaient de ce cours d’eau pour l’expédition de leur vin. Leurs habitants payaient deux deniers par foudre, un étranger le double. Il y avait un entrepôt (Ladhof) à Zellwiller et un agent, choisi par les huit communes, en assurait la gestion (Hoffmann) avec des jurés délégués par les communautés. Ils se réunissaient en un tribunal qui délibérait sous le tilleul de Zellwiller. Les communautés étaient seules chargées de l’entretien du canal.
V. Andlau.
- La Bruche
Un canal utilisait un bras de la Bruche depuis Molsheim jusqu’à Strasbourg.
V. Bruche.
- Le Schiffbach
Utilisait l’Ehn et passait dans les bans de Blaesheim et Geispolsheim, où ce canal s’appelait « der alte Schiffgraben » dès le début du XIIIe siècle.
- Les canaux de Strasbourg
Strasbourg possède, dès le Moyen Âge, un réseau de canaux et de fossés, communiquant avec le Rhin, l’Ill, l’Aar, la Bruche. Le Fossé des Faux-Remparts semble avoir été creusé dans un terrain marécageux et constituer un élément des fortifications de la cité carolingienne. Il ne sera doté de son mur central qu’en 1202. Le Fossé des Tanneurs est destiné aux besoins des tanneurs, le Petit Rhin ou Rheingiessen, bras du Rhin canalisé qui rejoint l’Ill près de l’église Saint-Guillaume, permet aux bateliers de rejoindre le grand fleuve en passant par la Krutenau. Le Rheingiessen mérite une mention particulière, car depuis le Moyen Âge, il avait été la voie principale de communication entre les ports de Strasbourg et le Rhin. Il reliait le port de la Douane et celui du quai des Pêcheurs au Petit Rhin, à l’endroit où se dresse l’actuel pont d’Anvers. Le trafic – actif – était assuré par des bateaux d’environ 30 m de long, et 3,5 m de large, transportant une cinquantaine de tonnes. Il a été comblé en 1872, alors que le Petit Rhin a été comblé en 1957 (Descombes).
2. Les canaux de Haute-Alsace
- Le Quattelbach
Ce « Muhlbach » qui prend le nom de « canal Catherine » a sans doute fait l’objet de nouveaux travaux sous le gouvernement de Catherine de Bourgogne (1378-1425), épouse de l’archiduc Léopold III d’Autriche. Il va de l’Ill au Nord du Mulhouse jusqu’à la hauteur de Neuf-Brisach. Il sert à irriguer la Hardt et alimente les prises d’eaux des moulins en cas de sécheresse.
- Le canal du Mühlbach
Il sera appelé plus tard canal de la Fecht puis Logelbach, et est attesté dès 1293 (MGH SS 17, 258, ligne 27). En 1478, les Colmariens obtiennent le droit au profit de Colmar de canaliser l’eau de la Fecht depuis sa source, et de l’alimenter par des réservoirs de chasse ou lacs situés dans la vallée de Munster en cas de sécheresse. Un canal de dérivation est construit près de Turckheim, puis parvient dans Colmar où il prend le nom de Sinnbach ou Gerberbach, avec ses bras et de nombreux établissements industriels (moulins, fabriques) (Scherlen 1996, 99). Les cartes de Daniel Specklin (XVIe siècle) témoignent de l’établissement de nombreuses digues et barrages dans les vallées vosgiennes, autour de lacs de montagne, tels que Lac Blanc, Lac Noir, Lac Vert, Lac du Ballon, afin de les transformer en réservoirs naturels d’eau pour l’agriculture et le flottage.
- Le Landgraben ou Bornenbach
Le fossé provincial est un ouvrage construit à des fins défensives, entre la Haute et la Basse Alsace. En 1446, Bergheim le recreuse et est chargée de son entretien. (cf. thèse Zundel p. 91).
II. L’époque moderne : les débuts de l’âge des canaux
1. Les canaux militaires